Nous connaissons tous l'excellence de votre expertise juridique, car vous avez présidé pendant longtemps la section du contentieux. C'est davantage à l'universitaire et au membre de l'Institut que nous voudrions faire appel aujourd'hui, pour bénéficier de votre liberté intellectuelle dans l'analyse de ces sujets.
Comment établir le dialogue entre le Parlement et le pouvoir politique que représente le juge, en particulier le juge administratif ? Vous nous avez indiqué à très juste titre que, l'instauration des contrôles de constitutionnalité et de conventionnalité, la rigueur du contrôle juridique ou le contrôle de proportionnalité avaient eu pour conséquence de créer une situation où la loi n'est plus notre référence juridique suprême. Nous sommes dans un État de droit qui surplombe la loi et qui obéit à des principes sur lesquels le juge a une assez grande liberté d'analyse.
En outre, à partir du moment où la loi a perdu son caractère de suprématie, celui qui la vote voit son rôle s'affaiblir. Mon propos n'est pas de faire un plaidoyer pro domo pour le Parlement. Cependant, dans un système hyperprésidentialisé et dans un contexte d'abaissement de la loi en tant que norme juridique, l'affaiblissement politique du Parlement est un sujet dont on ne peut nier l'importance. Le rôle des juges, ou des systèmes de juges qui se renvoient l'exercice des responsabilités, monte en puissance. Force est d'admettre, me semble-t-il, que le juge dispose désormais d'un pouvoir politique extrêmement important. Ne serait-il pas plus simple de le reconnaître, de manière à pouvoir trouver la manière d'instaurer un dialogue entre le Parlement et les juges ? Ne faudrait-il pas que les institutions soient plus sincères sur le fait qu'il existe plusieurs pouvoirs et que nous devons gérer leurs interactions ?