Intervention de Denis Baupin

Commission d'enquête sur le coût réel de l'électricité — Réunion du 9 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Denis Baupin adjoint au maire de paris chargé du développement durable de l'environnement et du plan climat

Denis Baupin, chargé du développement durable, de l'environnement et du plan climat :

Oui, il était notre partenaire. Nous n'avions pas, nous, le fichier. Nous avons travaillé en partenariat.

Cette opération les intéressait parce qu'il y avait des certificats d'économie d'énergie à la clef. Nous avions donc des intérêts conjoints.

Puisque cela intéresse tout le monde, faisons-le ! Cela prouve d'ailleurs bien l'intérêt des certificats d'économie d'énergie : sans eux, peut-être qu'EDF n'aurait pas été intéressé par l'idée de remplacer des ampoules très consommatrices par des ampoules qui le sont moins.

Ce que nous pensons, puisque la question est posée, c'est qu'il faut aller vers une tarification progressive des énergies. Je crois que le Président de la République qui vient d'être élu s'y est engagé ; cela devrait, comme je l'espère, voir le jour à un moment ou à un autre. Vous serez alors appelés, en tant que parlementaires, à voter sur ces questions. Faire en sorte que celui qui consomme peu ait droit à un tarif de base et que ce soient les gaspillages qui soient plus facturés paraît une mesure de bon sens en matière d'efficacité énergétique.

Cependant, et c'est ma conclusion sur cette question, pour notre part, nous préférerions largement prévenir la précarité énergétique par des mesures d'isolation thermique des bâtiments et de moindre consommation qu'apporter des aides sociales pour contribuer au paiement des factures. Il est plus pertinent de fermer le robinet lorsque la baignoire fuit que de passer son temps à éponger sans fermer le robinet...

J'en viens au chauffage électrique. Cela ne vous surprendra pas, nous y sommes très peu favorables. D'un point de vue thermodynamique, c'est une aberration qui conduit aujourd'hui la France à être très largement importatrice d'électricité en hiver, en période de pointe de consommation, alors que, pendant des années, paraît-il, nous devions être indépendants d'un point de vue non pas énergétique - je ne crois pas que quiconque y ait jamais cru -, mais au moins électrique.

Dans les périodes de grand froid, la généralisation du chauffage électrique conduit la France à être responsable de la moitié de la pointe de consommation électrique et à acheter de l'électricité quand elle est à la fois la plus chère et la plus carbonée. D'une certaine façon, heureusement que l'Allemagne compte beaucoup d'éoliennes : cela permet de décarboner l'électricité française en période de pic de consommation. Mais je ne suis pas sûr que ce soit la logique qui a été jusqu'à présent développée à l'échelon national, celle qui consiste à dire qu'on a de l'électricité décarbonée, et cela grâce aux éoliennes de nos voisins !

Bien sûr, c'est une petite pique un peu ironique, mais la situation est assez aberrante, d'autant que le chauffage électrique contribue beaucoup à la précarité énergétique.

Que faire face à un bâti dans lequel sont largement installés des chauffages électriques ? À cette question très pertinente posée par le rapporteur, je dois avouer que je ne suis pas en mesure de répondre complètement.

Évidemment, dans les constructions neuves, il faut arrêter d'installer des chauffages électriques et, chaque fois que l'opportunité de rénover un bâtiment se présente, il faut les remplacer. Certes, passer d'un système de chauffage à un autre peut impliquer des travaux relativement lourds, ce n'est pas simple, mais la rénovation thermique d'un bâtiment doit à chaque fois être l'occasion de procéder à ce changement.

On peut malgré tout d'ores et déjà agir pour installer des systèmes de chauffage électrique plus performants que ceux qui existent dans de nombreux bâtiments, par exemple en installant des thermostats. En d'autres termes, il est possible de faire beaucoup mieux que les grille-pain qui ont été posés dans beaucoup de logements et à cause desquels nous sommes aujourd'hui confrontés à ce problème de précarité énergétique !

J'en viens à la question de la production. On a beau être sur un territoire exigu avec une énorme consommation par habitant, nous voulons affirmer la potentialité de production d'énergie locale. Nous avons réalisé des simulations. Certes, elles valent ce qu'elles valent, car elles ont été menées sur ce qu'on pouvait imaginer de ce qu'on sait aujourd'hui des potentialités du territoire parisien.

Ces études nous permettent de penser que, même sur un territoire comme le nôtre, à l'horizon 2020, si l'on développait l'ensemble des potentialités d'énergies renouvelables que l'on a identifiées, 5 % de la consommation énergétique - je dis bien énergétique et non électrique, parce qu'une bonne partie de tout cela est dans le chauffage, au travers du réseau de chauffage urbain - pourraient venir d'énergies renouvelables produites intra-muros, et ce dans le cadre où l'on aurait réduit globalement la consommation énergétique du territoire de 25 %.

Bien sûr, 5 % de la consommation d'énergie en renouvelable, ce n'est pas 25 % de renouvelable, soit l'objectif que nous nous sommes fixé à l'horizon de 2020. Cela signifie que, si 5 % de la consommation énergétique provenaient de la production d'énergie renouvelable locale, il faudrait aller chercher ailleurs les 20 % restants. Dans le plan climat, on n'a pas affirmé l'autarcie énergétique de Paris ! Je ne sais pas si nous pourrons l'atteindre un jour, mais ce n'est pas dans un horizon proche.

La photo que vous voyez n'est pas très parlante si vous ne connaissez pas le petit livre produit par l'Agence parisienne du climat, que j'aurais d'ailleurs dû vous apporter. Voilà un an, nous avons fait réaliser une étude « + 2° C... Paris s'invente » par une équipe d'architectes et d'artistes qui avaient déjà accompli ce travail pour des villes comme Rennes. Nous leur avons demandé de « positiver » l'adaptation de la ville à un réchauffement de deux degrés et d'envisager ce que l'on pouvait faire sur le territoire. Ils ont pris vingt images pour les vingt arrondissements de Paris et ont imaginé tout ce qui était possible en matière d'adaptation de réseaux de transport, qu'il s'agisse du tramway, notamment pour le transport de marchandises, de montgolfières, de téléphérique, ou en matière de récupération d'eau sur les immeubles.

Ce que vous voyez sur cette photo, c'est la couverture des voies du réseau gare de Lyon. Il s'agit de couvrir ce réseau, de faire de l'agriculture urbaine dans Paris et de s'autoriser à installer de grandes éoliennes. Cette image n'a pas de valeur contractuelle, comme disent les agences immobilières. Si je vous présente cette photo, c'est pour souligner que les 5 % que j'ai évoqués précédemment, c'est à technologies et à réglementation existantes. Si l'on s'autorise demain à installer de grandes éoliennes sur le Champ-de-Mars ou dans des zones similaires, par exemple parce que l'on a besoin de plus de production énergétique locale, on pourra produire plus ! Il ne faut pas s'interdire de penser ces choses-là.

Mais parlons de l'actualité, et pas seulement de l'avenir rêvé. Aujourd'hui, en matière de production énergétique, nous essayons vraiment de travailler sur tout ce qui est opportunité locale en matière d'énergies renouvelables. Cela signifie qu'il faut regarder tout ce que nous offre notre territoire, avec ses spécificités.

Je pense tout d'abord à la géothermie. Elle constitue un potentiel extrêmement important sur le territoire de l'Île-de-France. Le puits de géothermie que l'on a creusé à Paris-Nord-Est nous permet de chauffer 50 000 logements. C'est l'équivalent d'une petite ville, grâce à un puits de 1 500 mètres de profondeur.

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