Intervention de Jean-François Conil-Lacoste

Commission d'enquête sur le coût réel de l'électricité — Réunion du 9 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-François Conil-lacoste directeur général de powernext et d'epex spot

Jean-François Conil-Lacoste, directeur général de Powernext et d'EPEX SPOT :

Oui, en dehors de la bourse, par le biais de contrats bilatéraux. Les courtiers s'intéressent un peu moins au day-ahead qu'au marché à terme, plus rémunérateur, sur lequel les contrats annuels génèrent beaucoup plus de commissions. C'est donc plus rentable pour un courtier, qui s'intéressera moins à ce travail de fourmi qu'est le marché day-ahead, très compliqué, avec des couplages de marchés, etc. Certes, il existe toujours un marché de gré à gré, mais la part du marché organisé en France est passée progressivement de 30 % à 75 % du volume traité aujourd'hui.

Le slide 14 est une photographie des différents acheteurs et vendeurs qui peuvent intervenir sur les marchés d'EPEX SPOT. Il y avait, en avril 2012, 203 membres, provenant de 19 pays différents : des gestionnaires de réseaux de transport intervenant pour l'achat de leurs pertes mais également, en Allemagne, quand ils doivent verser le renouvelable de manière systématique sur la bourse ; des fournisseurs, avec ou sans actifs ; des courtiers en énergie, qui peuvent être des banques travaillant pour leurs clients industriels ; des traders purs, qui sont évidemment beaucoup moins présents sur le marché spot que sur le marché à terme. Le premier est en effet beaucoup plus industriel et il offre davantage de risques, en raison d'une volatilité importante, même si celle-ci s'est réduite grâce au couplage des marchés.

Je me permets juste une petite digression sur le risque TVA. Vous n'êtes pas sans savoir qu'une fraude à la TVA extrêmement importante touchant les marchés spot s'est révélée sur BlueNext. Nous sommes très vigilants sur ce sujet. La France est un peu à l'abri de ce genre de pratiques : en effet, les fraudeurs à la TVA, que nous avons vu opérer sur les marchés spot du CO2, ne se propagent pas sur les marchés de l'électricité et du gaz que nous gérons. Nous exerçons une surveillance et menons une lutte permanente contre ces phénomènes, qui seraient extrêmement dommageables, non seulement pour la réputation du marché, mais aussi pour la formation des prix.

Je reviens à mon propos. La moitié des membres sont en Allemagne et en Autriche, où il y a notamment beaucoup de stadtwerken, des municipalités, qui interviennent directement sur le marché.

Au milieu des trois cercles figurant dans le slide 15, vous voyez qu'il y a 49 membres intervenant sur l'ensemble des marchés que nous gérons, contre une vingtaine voilà quelques années. On constate donc un appel à la liquidité. La liquidité entraîne la liquidité et il est bénéfique de pouvoir regrouper, au sein d'une même structure, plusieurs marchés ayant le même système de négociation, le même système de compensation et les mêmes règles de marché. Cela constitue un facteur de développement de la liquidité.

Le slide 16 retrace l'évolution du prix spot en France entre 2001 et le premier trimestre 2012. Nous avons recensé une dizaine de pointes. Vous reconnaîtrez, complètement à gauche, celle qui correspond à la canicule de 2003, et, à droite, celle qui correspond au grand froid de février 2012, où nous avons connu des températures inférieures de 10 degrés aux normales saisonnières, avec un record de consommation de près de 102 000 mégawatts. Vous retrouvez plus de détails dans le slide 17 : vous y remarquerez une tendance à la hausse progressive du prix spot de l'électricité en France, laquelle est cependant nettement moins accentuée que la tendance à la hausse du brent. Il y a une corrélation à 82 % avec les prix du brent résultant logiquement de l'appel en dernier recours aux centrales thermiques, qui sont calées sur le prix du brent pour la gestion des heures de pointe.

Mais il est intéressant d'observer qu'il y a eu une stabilisation, voire un recul du prix de l'électricité en France en 2010-2011, alors qu'il y a eu une envolée du prix du brent sur la même période. Dans la colonne ratio volatilité/prix base, vous remarquez une stabilisation de la volatilité à 13 %. Il s'agit d'un effet du couplage des marchés mis en place entre la France, l'Allemagne et le Benelux en novembre 2010, lequel a entraîné un prix unique sur 60 % à 65 % de l'ensemble des heures traitées. Il y a donc non seulement un effet positif de lissage des marchés, mais également des bénéfices clairs en termes de fluidité d'importation et d'exportation.

Les prix allemands et français ont fait le yo-yo, les premiers étant tantôt inférieurs, tantôt supérieurs aux seconds. La hausse des prix constatée aujourd'hui par rapport à l'Allemagne - nous sommes en moyenne, au 30 avril 2012, à 53 euros du mégawatt-heure contre 44 euros outre-Rhin - s'explique par le fait que la France a plus souffert des pics de prix du grand froid, avec une hausse du prix de la base, c'est-à-dire la moyenne des vingt-quatre heures de la journée, à 82 euros. Nous avons connu une pointe le 9 février à 367 euros du mégawatt-heure et nous avons alors été contents de pouvoir importer d'Allemagne, d'Angleterre, d'Italie, d'Espagne, pour limiter la hausse. L'Allemagne, pour sa part, a connu une pointe, le 9 février, limitée à 76 euros du mégawatt-heure. C'est la conséquence à la fois d'un mix énergétique différent, d'un appel à des centrales plus facilement mobilisables, mais également de la liquidité plus importante du marché en Allemagne.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion