Nous ne pouvons accepter cet état de fait.
C’est pourquoi j’ai souhaité que cette question orale avec débat soit l’occasion de dresser un premier bilan de l’expérimentation, mais aussi de revenir sur les présupposés idéologiques qui ont présidé à la création de cette structure.
Selon votre annonce initiale, 8 000 places de jardin d’éveil devaient être créées pour la période 2009-2012, avec une amorce dès la rentrée de 2009. Qu’en est-il ?
D’après les informations que nous avons pu recueillir, très peu de places ont été réellement créées. Ainsi, dans ma région, l’Aquitaine, aucun jardin d’éveil n’a vu le jour malgré une grande faiblesse de l’accueil des enfants de deux ans.
Les quelques structures mises en place restent très marginales et représentent seulement 300 places, si mes informations sont exactes. On est loin d’une adhésion enthousiaste !
Ainsi, à Paris, la municipalité a considéré que cette initiative constituait une concurrence inacceptable pour l’école maternelle et ne répondait absolument pas aux besoins de la capitale en matière de garde des enfants de deux ans.
Cette concurrence est facilement quantifiable puisque l’académie a encore réduit le nombre de places en école maternelle lors de la dernière rentrée. Seulement 327 élèves de deux ans sont scolarisés dans la capitale cette année, contre 528 élèves en 2008, soit une chute de 40 %, alors même que Paris était déjà la ville comptant le moins d’enfants scolarisés à cet âge.
C’est pourquoi la municipalité a adopté un vœu de l’exécutif s’opposant à l’expérimentation des jardins d’éveil, dont les financements incomberaient à la ville.
Ce cas n’est pas isolé et de nombreuses collectivités, qui n’avaient été aucunement concertées lors de l’élaboration du projet, se sont déclarées opposées à votre expérimentation.
J’imagine bien que vous allez caricaturer cette opposition des élus locaux pour la résumer à une prise de position politique, qui s’avère pourtant partagée par des élus de toutes sensibilités.
De plus, le 30 septembre dernier, un collectif baptisé « Pas de bébés à la consigne ! » regroupant une trentaine de syndicats et associations familiales et professionnelles a tenu à mettre en garde le Gouvernement contre les dangers pesant sur l’accueil des tout-petits en crèches et en maternelles.
Lors des auditions que nous avons organisées avec le groupe socialiste, nous avons également pu constater que les deux principales associations de parents d’élèves regrettaient de ne pas avoir été associées à la création des jardins d’éveil et estimaient que cette structure répondrait évidemment moins bien aux besoins des enfants que l’école maternelle.
Cette méfiance pour les jardins d’éveil s’explique par les incertitudes entourant la nouvelle structure et par son inadaptation aux besoins des enfants et de leurs familles.
En effet, les jardins d’éveil tels qu’ils se dessinent ne rempliront aucune des promesses faites par les rapports parlementaires ou par vous-mêmes.
Le jardin d’éveil pourra-t-il être « une structure adaptée aux moins de trois ans », comme le promettaient les rapports parlementaires ? Y aura-t-il un aménagement fonctionnel des locaux pour répondre aux besoins de mouvements, de jeux, de repos des jeunes enfants ? L’espace sera-t-il conçu à leur échelle ? Tout reste flou ou ambigu.
Concernant les lieux où seront installés les jardins d’éveil, les rapports parlementaires et vous-mêmes aviez prévu à l’origine qu’ils pourraient être situés dans les locaux mêmes des écoles maternelles. Aujourd’hui, on nous dit que cette structure pourra être adossée à une structure d’accueil collectif existante.
En prévoyant d’installer le jardin d’éveil au sein même de l’école, vous ouvrez, de toute évidence, une brèche dans l’école maternelle, accréditant l’idée selon laquelle les instituteurs n’ont pas à s’occuper des jeunes enfants.
Aujourd’hui, il s’agit des enfants de deux ans. Qui nous dit que demain les enfants de trois ans ou de quatre ans ne seront pas concernés, avec au final une véritable remise en cause de la scolarisation préélémentaire ?
On nous a dit que les locaux scolaires étaient inadaptés aux plus jeunes. Quelle solution espérez-vous mettre en place avec une enveloppe de seulement 23 millions d’euros pour la période 2009-2012 ?
Malheureusement pour vos projets, l’installation des jardins d’éveil dans les écoles pose de multiples problèmes. Les enseignants y sont farouchement opposés et le précédent ministre de l’éducation nationale, M. Darcos lui-même, s’était finalement prononcé contre l’installation des jardins d’éveil dans l’enceinte de l’école. Où allez-vous donc les construire et avec quel argent le ferez-vous ?
On peut malheureusement le craindre, seules les communes les plus riches pourront s’offrir de telles structures, …