Intervention de Françoise Cartron

Réunion du 21 octobre 2009 à 14h30
Jardins d'éveil — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Françoise CartronFrançoise Cartron :

… et l’accueil des enfants de deux à trois ans sera partout ailleurs impossible. Le principe d’égalité de notre République est bien chahuté !

Pour ce qui est de l’encadrement des enfants et des effectifs, on ne perçoit pas non plus l’apport des jardins d’éveil.

Les rapports parlementaires mettaient l’accent sur les effectifs trop élevés dans les petites sections de maternelle. On ne peut qu’être d’accord : les tout-petits ont, bien évidemment, besoin d’être accueillis dans des structures plus restreintes, capables d’assurer leur sécurité affective. En quoi un tel constat disqualifierait-il l’école maternelle ?

Les effectifs parfois surchargés, à l’heure actuelle, sont avant tout la résultante d’une politique de suppressions de postes menée par le Gouvernement. Aussi, il est pour le moins hypocrite de priver l’école de moyens pour ensuite constater, faussement navré, son échec. Abaissons le taux d’encadrement des classes d’enfants de deux ans et de trois ans et le problème sera résolu !

D’ailleurs, dans les jardins d’éveil, il est prévu un taux d’encadrement d’un adulte pour douze enfants, pour deux unités, soit en réalité deux adultes pour vingt-quatre enfants. Ce niveau n’est pas si éloigné des réalités de l’école maternelle !

Nous n’en savons pas beaucoup plus sur les enfants qui seront accueillis. On nous dit que les jardins d’éveil ne sont pas destinés à concurrencer l’école maternelle pour les enfants de plus de trois ans. C’est difficile à croire puisque la méthodologie des jardins d’éveil prévoit que la durée privilégiée du passage dans cette structure sera de dix-huit mois. Ces enfants seraient donc accueillis jusqu’à trois ans et demi, âge auquel la scolarisation est pourtant bien préférable.

Autre incertitude, le plus grand flou règne autour des contenus. Il s’agirait, si nous avons bien compris, d’une « préparation à la scolarisation », avec davantage d’activités libres, qui seraient mieux adaptées aux enfants de deux ans.

Quelle ignorance, encore une fois, de la qualité de l’enseignement dispensé à l’école maternelle, qui permet l’éveil du jeune enfant, sa socialisation et le développement de ses capacités intellectuelles ou physiques. L’école maternelle permet, à la fois, d’apprendre et d’apprendre ensemble.

Il nous apparaît donc que la création des jardins d’éveil s’inscrit dans un contexte de mise en cause de l’école maternelle, parfaitement reflété par le rapport de Mme Papon et de M. Martin, qui énonce un certain nombre de constats sur lesquels je voudrais revenir.

Selon le premier de ces constats, les parents seraient réticents à scolariser les enfants de deux ans à l’école maternelle.

L’idée de créer les jardins d’éveil s’appuie sur un constat démographique bien réel, mais dévoyé dans son analyse, car de moins en moins d’enfants de deux à trois ans sont scolarisés. La fréquentation de l’école maternelle est en baisse, nous ne pouvons pas nier ce fait. Dans son rapport sur l’accueil du jeune enfant pour 2008, l’Observatoire national de la petite enfance estime qu’entre les rentrées de 2007 et de 2008, l’école maternelle française a perdu environ 500 classes et, de ce fait, 16 000 élèves. Selon ce même observatoire, cette baisse de fréquentation s’expliquerait par la moindre scolarisation des enfants de deux ans. Seulement 168 000 enfants de moins de trois ans fréquentaient une école maternelle pendant l’année scolaire 2007-2008, contre 250 000 en 2001. Dans ma région, l’Aquitaine, le taux de scolarisation des enfants de deux ans est passé de 35 % en 2000 à moins de 18 % aujourd’hui. Les 300 places de jardin d’éveil créées à cette rentrée ne constituent donc pas une solution ! L’enjeu est tout autre.

De ce constat, faut-il tirer la conclusion que les familles répugnent aujourd’hui à scolariser les enfants de deux ans ? Non, bien sûr ! Je cite une nouvelle fois le rapport de l’Observatoire national de la petite enfance : « L’accueil des enfants dès deux ans en maternelle se fait en fonction des places disponibles et dépend fortement de l’évolution des effectifs des enfants âgés de trois à cinq ans ». En d’autres termes, les enfants de deux ans sont bien une variable d’ajustement de la politique de l’éducation.

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