Je crois qu'en matière industrielle, nous vivons effectivement la fin d'un cycle. La révolution industrielle commencée à la fin du XVIIIème siècle s'est fondée sur les sciences et les techniques liées à l'énergie - c'était la thermodynamique avec Carnot, la physique mécanique, l'électricité, et jusqu'au nucléaire ; cette révolution est terminée : l'épuisement progressif des ressources fossiles oblige à sortir de ce modèle, ou bien on détruit la planète ; cette révolution industrielle finissante, me semble-t-il, est relayée par une autre révolution, assise sur un nouvel organon scientifique : les sciences de la vie et de la terre (SVT), de la géologie à la biochimie, associées à l'informatique - c'est la révolution industrielle de ce matin et c'est elle qui me fait voir certains grands groupes énergétiques d'aujourd'hui, comme déjà morts.
Quelles sont les capacités européennes sur le numérique, comparées à celles des Etats-Unis ? Le développement du numérique est une fusée à trois étages : on a commencé par faire du hardware, c'était l'époque où IBM dominait le monde - que pèse cette entreprise aujourd'hui ? Rien. Deuxième étage : le software, c'est-à-dire les logiciels, nous sommes dedans, avec Microsoft et Apple en locomotives - qui me paraissent déjà près de la voie de garage. Troisième étage, celui qui apparaît à peine : les applications sociétales, c'est Google et d'autres opérateurs de réseaux sociaux. Les étages de cette fusée se détachent très vite : IBM est tombée, Microsoft ne va pas tarder à devenir « Minimou », comme je l'appelle en traduisant l'anglais, et Google va devoir changer pour résister à la révolte qui ne manquera pas de se produire si elle abuse de sa position. Le travail humain est transformation constante, à un rythme très soutenu pour le numérique ; notre monde change, cela nous oblige à nous adapter, en inventant un nouveau modèle de gouvernance : c'est à quoi je vous invite !