Intervention de Pascale Gruny

Commission des affaires européennes — Réunion du 14 avril 2021 à 14h00
Questions sociales travail santé — Socle européen des droits sociaux - communication de mmes pascale gruny et laurence harribey

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny :

M. Bacchi ayant un empêchement dont il vous prie de l'excuser, nous vous présenterons cette communication à deux voix au lieu de trois. Celle-ci concerne le plan d'action de la Commission européenne relatif au socle européen des droits sociaux, publié le 4 mars dernier. Nous allons vous en présenter les principales avancées, mais également les quelques difficultés de mise en oeuvre que nous avons pu identifier. Nous terminerons notre intervention, en détaillant quelques initiatives législatives contenues dans ce plan, qui nous semblent essentielles et sur lesquelles nous pourrions travailler dans les prochains mois.

Comme vous le savez, la pandémie a conduit la Commission et les présidences croate et allemande à revoir leur agenda de l'année 2020 pour se concentrer sur la gestion de la crise, et notamment sur son volet social, avec des dispositifs de relance, de soutien au marché de l'emploi et de protection des publics les plus vulnérables, victimes collatérales de la pandémie. Plusieurs initiatives importantes, prévues par la feuille de route de la Commission européenne intitulée « une Europe sociale pour une transition juste » et publiée en janvier 2020, ont tout de même pu voir le jour, comme la proposition de directive sur les salaires minimaux, sur laquelle nous reviendrons.

Ce plan, qui nous intéresse aujourd'hui, se veut être le programme de travail de la Commission sur les cinq à dix prochaines années, avec des objectifs à horizon 2030. Il est présenté comme la traduction concrète du fameux socle européen des droits sociaux, proclamé au sommet de Göteborg en 2017. En effet, ce socle - constitué d'un ensemble de vingt principes et droits sociaux essentiels, en matière de marché du travail, de protection sociale et d'égalité - est malheureusement peu contraignant juridiquement, comme nous avions pu le souligner dans un de nos rapports sur le sujet en avril 2018.

Ce plan, qui procède d'une vaste consultation lancée il y a un an, propose des actions concrètes, à l'aune de la crise et des profonds bouleversements causés par le changement climatique, la numérisation, la mondialisation et les évolutions démographiques.

Il fixe trois objectifs à atteindre à l'horizon 2030, concernant le taux d'emploi, la formation et la réduction de la pauvreté, et il invite parallèlement les États membres à se doter d'objectifs nationaux en cohérence. Ainsi, d'ici à 2030, au moins 78 % de la population âgée de 20 à 64 ans devrait être en emploi ; au moins 60 % des adultes devraient suivre une formation chaque année ; et le nombre de personnes menacées de pauvreté ou d'exclusion sociale devrait être réduit d'au moins 15 millions, dont 5 millions d'enfants. En 2019, environ 91 millions de personnes, dont près de 18 millions d'enfants, étaient concernées.

Pour atteindre ces objectifs, la Commission établit, dans son plan, une liste d'actions à mener au niveau de l'Union, et des États membres, qui se déclinent selon trois axes : emploi ; compétences et égalité ; protection sociale et inclusion.

Je ne vais pas présenter toutes les mesures, car elles sont très nombreuses - près de 70 -, sans compter les actions demandées aux États membres. Mais je vais revenir sur les plus significatives d'entre elles.

S'agissant du premier axe qui concerne l'emploi, la Commission estime qu'il est temps de préparer la relance économique par des mesures de long terme, visant la création d'emplois. Ce volet repose principalement sur les États membres, qui sont invités à se conformer à la recommandation de la Commission concernant un soutien actif et efficace à l'emploi. Ce texte met l'accent sur l'investissement dans la formation professionnelle, le service public de l'emploi et des subventions ciblées pour l'emploi.

Le volet « emploi » du plan d'action rassemble, par ailleurs, un certain nombre d'initiatives de la Commission, relatives aux conditions de travail, dont la directive relative à des salaires minimaux adéquats, présentée en octobre 2020 ; une proposition législative sur les conditions de travail des travailleurs des plateformes, qui sera présentée au quatrième trimestre 2021 ; et un nouveau cadre stratégique 2021-2027 en matière de sécurité et de santé au travail, qui sera présenté au deuxième trimestre 2021.

Concernant le deuxième axe de ce plan d'action, intitulé « compétences et égalité », la Commission insiste sur l'importance, d'une part, d'investir davantage dans l'éducation et la formation et, d'autre part, de lutter contre les stéréotypes de genre ainsi que toute discrimination.

Sur le volet « compétences », la Commission prévoit plusieurs initiatives législatives, comme celle sur les comptes de formation individuels, qui sera présentée au quatrième trimestre 2021.

Sur la question de l'égalité, la Commission annonce plusieurs mesures, telles que la stratégie sur les droits des personnes handicapées, présentée concomitamment au plan d'action en mars dernier, ou une directive relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, également présentée en mars, et une initiative législative prévue au quatrième trimestre 2021, visant à lutter contre les violences sexistes et sexuelles.

Enfin, concernant le troisième et dernier axe de ce plan relatif à la protection sociale et l'inclusion, la Commission propose plusieurs initiatives visant à atteindre l'objectif de réduction de la pauvreté d'ici 2030. Parmi ces mesures, nous pouvons citer une recommandation du Conseil sur le revenu minimum, prévue en 2022 ; une plateforme européenne sur la lutte contre le sans-abrisme, prévue au deuxième trimestre 2021; un projet pilote, qui, de 2021 à 2023, étudiera la possibilité de recourir à une solution numérique pour créer un passeport européen de sécurité sociale, que nous avions déjà évoqué dans nos travaux passés.

Pour financer ce plan, je soulignerai, pour le regretter, qu'il n'y a pas de fonds spécifiques, ni de lignes de crédits supplémentaires annoncées, à part les instruments financiers déjà en place : Cadre financier pluriannuel, NextGeneration EU, Facilité de résilience et de relance, fonds sectoriels, et notamment le FSE + (Fonds social européen), doté de 88 milliards d'euros, qui reste le principal instrument de l'Union pour soutenir la mise en oeuvre du socle des droits sociaux.

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