… au regard de l’intérêt de l’enfant et des besoins des familles.
Pourquoi le groupe de travail sur la scolarisation des jeunes enfants avait-il été amené à proposer la création de jardins d’éveil pour les enfants âgés de deux à trois ans ?
Je me contenterai, en ce qui me concerne, de rappeler les considérations qui ont conduit notre groupe de travail à réfléchir à cette question controversée de la scolarisation des enfants de moins de trois.
Je souhaiterais vous faire part de certains constats auxquels nous sommes parvenus au terme de nombreuses auditions de professionnels de la petite enfance, de l’éducation, notamment de l’école maternelle, de chercheurs, de médecins, de représentants des familles et des parents d’élèves.
Dans un contexte de pénurie de modes de garde, marqué en France par un taux de fécondité élevé et un fort taux d’activité féminine, l’école maternelle fournit notamment un service aux parents avec la prise en charge des jeunes enfants.
Elle est d’ailleurs en situation de quasi-monopole pour l’accueil spécifique des enfants de deux à six ans. La découverte de la vie en société dans une structure collective s’effectue pour le plus grand nombre d’enfants lors de l’entrée à l’école maternelle.
Or les travaux de notre groupe de travail ont permis de dresser un bilan mitigé de la scolarisation des moins de trois ans, tant sur le plan des conditions d’accueil qu’au regard de l’intérêt de l’enfant, qui renvoie davantage à un trait historique lié au développement de l’école maternelle dans les années 1970-1980, dans un contexte de baisse démographique, qu’à une véritable politique volontariste en la matière.
Notre pays a très tôt fait le choix d’une structure préscolaire placée à la fois sous le contrôle de l’État et sous l’égide du ministère en charge de l’instruction. Ce trait historique est une clef d’analyse des enjeux qui se nouent aujourd’hui autour de l’école maternelle et de la scolarisation des jeunes enfants. L’école maternelle exerce un rôle emblématique de passerelle entre la famille et l’école élémentaire.
La possibilité ouverte depuis la création de l’école maternelle de scolariser les enfants dès l’âge de deux ans commence à être utilisée significativement à partir des années soixante. C’est la décennie 1970-1980 qui connaît la plus forte progression du pourcentage d’enfants scolarisés à deux ans.
Force est de constater que le développement de la scolarisation précoce au cours de ces années s’est réalisé en l’absence d’une démarche politique globale et de toute obligation légale. Elle semble être le fruit de circonstances extérieures au sujet même.
Il faudra attendre la loi de 1989 d’orientation sur l’éducation pour que ce mouvement trouve une traduction législative, toutefois très limitée. En effet, les travaux législatifs rejettent alors le principe d’une généralisation de l’entrée à l’école maternelle dès deux ans pour affirmer un droit à la scolarisation à partir de trois ans.
Il apparaît ainsi que l’éducation nationale, dans une conjoncture particulière, a pu répondre à une demande sociale et a offert aux familles une opportunité nouvelle.
Ce constat fait, le groupe de travail a été amené à se poser la question suivante : l’école maternelle s’adresse-t-elle vraiment aux enfants de deux ans ?
Il faut reconnaître que les personnes que nous avons rencontrées ont plutôt formulé des critiques à l’égard d’une scolarisation aussi précoce. Les critiques ont été plus nombreuses que les approbations !
Le plus souvent qualifiée de « variable d’ajustement des inscriptions en école maternelle », la scolarisation précoce apparaît peu adaptée à la tranche d’âge des deux à trois ans, marquée par une grande hétérogénéité physiologique et psychique : l’enfant doit passer du stade de « grand bébé » à celui de « petit écolier ».
L’enfant de deux ans a ses propres rythmes, des besoins particuliers. Souvent, il doit dormir à deux moments de la journée.