Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, nous le savons tous, est un espace de concertation et de recherche de compromis entre les deux chambres, afin d’essayer d’améliorer les textes. Cette définition est certainement souvent exacte, mais est-il réellement possible de transiger sur les principes et sur ce qui fait le fond de l’action politique ?
On ne devient pas à moitié pour la généralisation des peines planchers ou à moitié pour la période de sûreté : on est pour ou on est contre.
Certes, nous visons un objectif commun, à savoir la protection de nos concitoyens, mais nous divergeons sur les méthodes. Pour notre part, nous ne refusons pas la fermeté, car elle est souvent nécessaire. Toutefois, elle doit être comprise et juste.
Nous avons rappelé souvent, ces derniers mois ou ces dernières années, que l’empilement des lois sécuritaires était générateur d’insécurité juridique et qu’on ne réglait réellement aucun problème de sécurité sur le terrain avec des textes souvent inutiles, parfois redondants, en grande partie inefficaces et séparés du quotidien des palais de justice par un fossé de plus en plus large.
Les statistiques, quant à elles, sont à utiliser avec précaution. À ce propos – je le note après Anne-Marie Escoffier –, dans l’annexe du texte adopté par la commission mixte paritaire, à la page 44 du document qui nous a été transmis, on se glorifie que le nombre de personnes placées en garde à vue ait progressé entre 2002 et 2008 de 51, 52 % ! C’est assez révélateur de ce qui se passe aujourd'hui dans notre pays, me semble-t-il.
Répondre à chaque fait divers horrible par un texte législatif, à des fins essentiellement médiatiques, est aux antipodes de ce que doit être l’élaboration de la loi, l’effort de codification et de clarté pour les citoyens et, a fortiori, pour les professionnels.
Le 18 janvier dernier, lors du débat en deuxième lecture, j’avais déclaré : « Chers collègues de la majorité, vous jouez, et avec quelles conséquences redoutables, aux apprentis sorciers ».
En fait, depuis des années, vous jouez avec le feu en utilisant, avec les medias, l’émotion légitime et la souffrance des familles de victimes comme un combustible permettant de tenir toujours allumées les braises tant des discours sécuritaires que du thème de la rupture à l’intérieur de notre société.