Intervention de Emilie Casin-Larretche

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 31 janvier 2019 à 11h00
Audition de la fondation catholique « apprentis d'auteuil » : M. André Altmeyer directeur général adjoint et Mme émilie Casin-larretche responsable des relations extérieures

Emilie Casin-Larretche, responsable des relations extérieures :

Dans cette maison d'enfants à caractère social (MECS), qui compte cinq unités de vie (foyer ou maison), 30 % des enfants sont auteurs et/ou victimes de violences sexuelles. Dans l'unité de vie pour les petits de six à onze ans, cinq jeunes ayant été victimes sont eux-mêmes devenus auteurs de violences sexuelles.

Des plans d'actions ont été construits et mis en oeuvre dans l'ensemble des unités de vie. La MECS a développé depuis quelques années un partenariat avec des psychiatres spécialisés, des professionnels de l'aide sociale à l'enfance (ASE) spécialisés dans les violences sexuelles et des médecins spécialistes. Je fais observer que ces jeunes sont tous pris en charge à plus de soixante kilomètres de la maison d'enfants. La difficulté aujourd'hui pour les équipes est d'avoir à accompagner des auteurs et des victimes sur la même unité de vie. Les risques de reproduction des faits sont évidemment très présents.

Le directeur de l'établissement nous a donné cet exemple : depuis plusieurs années, il suit un jeune en situation de handicap qui bénéficie de l'accompagnement personnel d'un éducateur, à hauteur de 35 heures par semaine. Ce jeune de quatorze ans vit sur l'unité de vie, en dehors des temps scolaires. Il ne doit jamais rester seul car il a violé ses soeurs sur l'incitation de son père qui était mentalement déficient. Par ailleurs, il a tenté de violer deux autres jeunes filles accueillies à la MECS, avant de bénéficier d'un accompagnement. Il a été enfermé plus d'un mois, à treize ans, dans une unité de pédopsychiatrie, dans laquelle il a agressé une petite fille. Faute de place, l'unité de pédopsychiatrie n'a pas été en mesure de le garder et nous avons dû le reprendre sur une unité de vie de la MECS. Il n'y a pas d'accueil plus spécialisé pour lui, et plus généralement, en France, pour des jeunes ayant des pulsions difficilement contrôlables.

Nous avons donc dû construire avec nos partenaires des actions et des formes d'accompagnement spécifiques. Afin que l'accompagnement soit le plus efficient possible, l'intervention de l'ensemble des partenaires est indispensable. En effet, le maillage territorial et la complémentarité des différents corps de métiers (médecin, psychiatre, infirmière, psychologue, juge des enfants, conseil départemental, éducateur et professeurs) permettent à ce jeune de s'exprimer, de se soigner, d'être cadré, d'échanger et d'évoluer.

L'ensemble de l'équipe a été formée ; elle s'appuie sur les contenus diffusés en particulier par la FFCRIAVS, mais l'établissement est toujours à la recherche d'une institution qui pourrait accueillir ce jeune.

D'un point de vue RH, dans le cadre de ces prises en charge très spécifiques, il faut sans cesse rassurer l'équipe, mais aussi rappeler les principes de base. Nous avons ainsi constaté une amélioration notable à la suite de la formation dispensée par le conseil départemental sur les auteurs et les victimes de violences sexuelles. Le regard des éducateurs et des accompagnants a changé. Mais il faut avoir conscience que l'énergie et le temps que les professionnels consacrent à la problématique des violences sexuelles empiètent forcément sur le temps qu'ils consacrent aux autres jeunes. Pour ces raisons, il nous semble qu'une unité de vie plus spécialisée avec une équipe encadrante plus importante, qui accueillerait six jeunes au maximum, serait vraiment profitable à tous les jeunes ayant été confrontés à des violences sexuelles.

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