Il n’en demeure pas moins que la question reste posée : à quoi servent les jardins d’éveil, si leur création n’est pas liée à un apport éducatif ? Là encore, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’ambition du Gouvernement est des plus minimes. S’agit-il de porter atteinte à l’école maternelle ? Tout porte à le croire, puisque, en favorisant les jardins d’éveil, le but recherché est de réduire le nombre d’enfants entrant en maternelle. Les chiffres présentés par les uns et les autres sont, à cet égard, éloquents.
Dès lors, l’argument est tout trouvé pour justifier la réduction du nombre d’enseignants. Nous avions les critères de Maastricht, mais on ne les respecte plus depuis fort longtemps ! En revanche, nous avons désormais un dogme gouvernemental auquel vous ne dérogez absolument pas, madame la secrétaire d’État : le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Moins d’enfants, moins d’enseignants, c’est, au final, plus d’économies pour l’État !
Je souhaite insister plus particulièrement sur ce point. En effet, si l’État réalise des économies « sur le dos » des enseignants et de l’éducation des futurs citoyens, il perpétue aussi son habitude de transférer le poids de ses charges aux collectivités locales. Il n’aura échappé à personne que le coût des jardins d’éveil sera, comme dans tant d’autres domaines, supporté une fois de plus par les communes. À cet égard, je rappellerai quelques chiffres. Une place en école maternelle coûte 4 500 euros, alors qu’une place en jardin d’éveil revient en moyenne à 8 000 euros : 3 200 euros seront pris en charge par l’État via la CNAF, 2 900 euros seront supportés par les communes, tandis que le reste sera payé par les familles, et encore, à proportion de leurs moyens. Face à la paupérisation des familles de certains quartiers ou de certaines villes, les jardins d’éveil représenteront, nous le savons, une charge supplémentaire pour les collectivités, c'est-à-dire pour les communes.
Autrement dit, les collectivités locales seront contraintes de supporter un nouveau poste de dépenses, pour financer les économies budgétaires réalisées par l’État pour son propre compte.
À l’heure où la réforme des collectivités territoriales laisse présager pour celles-ci une mise au pas politique et une subordination financière, la création des jardins d’éveil apparaît comme une véritable provocation.