Il faut effectivement pouvoir appréhender le marché à 360 degrés, c'est ce que demandent et les annonceurs et les lecteurs.
Il s'agit de capter l'attention sur le numérique, de concrétiser l'abonnement papier avec un rythme de lecture différent et de prolonger l'ensemble avec de l'événementiel. Il faut permettre aux entreprises d'être présentes sur l'ensemble de ces dispositifs auxquels peuvent s'adjoindre de la radio et de la télévision. Cette approche à 360 degrés, c'est la vraie vie des médias.
Nous manquons de chiffres sur ce sujet. En préparant cette audition, un chiffre m'a sidéré : un site comme Brut, par exemple, c'est 20 milliards de vidéos vues chaque année dont 20 % en France, et 250 millions d'utilisateurs réguliers. Or Brut s'adresse à 70 % aux jeunes de moins de trente-cinq ans. Il faut intégrer ces éléments dans la pertinence du marché. Les citoyens de demain, ce sont les jeunes.
Il faut évidemment modifier la loi de 1986 ; cela a été abondamment souligné.
Sur le terme de « concentration », j'attire votre attention sur le marché des annonces légales, normalement destiné à financer la diversité. Depuis l'ouverture aux services de presse en ligne et au numérique, on assiste à une ultra-concentration qui n'est pas en phase avec les objectifs du législateur et de la réglementation.
La concentration n'est pas uniquement le fait des rachats de medias, elle est de plus en plus horizontale avec une intégration des outils : plateformes de collecte de publicité et d'annonces, système d'enchères, outils de distribution, de mesures et de facturation.
M. le rapporteur a évoqué l'indépendance des rédactions. Je représente beaucoup d'éditeurs indépendants. J'en suis moi-même un ; nous sommes une société familiale. L'intérêt pour des entrepreneurs qui s'intéressent à la presse, voire, comme M. Ganz chez Prima, qui touchent le papier ou caressent l'écran et ont « les mains dans le cambouis », est de pouvoir piloter la ligne éditoriale en dialogue avec la rédaction. En mettant des barrières trop importantes, vous allez casser cette dynamique d'entrepreneuriat. L'envie de piloter est partagée dans la presse en ligne.
Cela ne signifie nullement l'absence de collectif. D'ailleurs, il ne peut pas y avoir de presse sans collectif. Le collectif, c'est entre l'éditeur et la rédaction. Ce qui fédère, c'est une ligne éditoriale. Celui qui décide, c'est le lecteur, qui achète ou non. Il ne faut pas casser cette dynamique. Gardons les dispositifs qui existent, comme la clause de conscience, qu'il faut peut-être même renforcer. Et incitons les deux pôles à travailler ensemble, et non pas les uns contre les autres.