Intervention de Georges Fotinos

Mission commune d'information sur les rythmes scolaires — Réunion du 15 janvier 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Georges Fotinos ancien inspecteur général de l'éducation nationale

Georges Fotinos :

J'ai tiré de la soixantaine de conférences que j'ai donnée partout en France, en juin 2013, une sorte de photographie partielle de la situation. Les medias en ont un peu parlé...

Contrairement à ce qui a été dit, j'ai relevé divers dysfonctionnements : impréparation réelle et très fréquente des communes, sauf celles engagées depuis des années dans un processus d'aménagement du temps scolaire, résistance au changement de la part des collectivités locales, de l'éducation nationale, ou des associations, méfiance voire défiance entre les enseignants et les animateurs, entre l'éducation nationale et les collectivités locales et entre les inspecteurs de l'éducation nationale (IEN) et les maires. Le problème majeur et flagrant, en juin 2013, restait celui de la mise en oeuvre de cette politique à l'école maternelle.

Les comportements et les pratiques des responsables -maires, IEN ou directeurs académiques des services de l'éducation nationale (DASEN) - étaient très divers, allant de l'immobilisme affirmé à l'enthousiasme militant. Enfin, on pouvait noter l'absence quasi générale de dispositif d'évaluation.

Le conflit couve ; les braises ne sont pas éteintes. Que faut-il faire pour sortir de cette situation ? J'ai émis quelques propositions, dont on a un peu parlé...

En premier lieu, tout tourne autour du décret, dont certains demandent la révision complète et d'autres l'abrogation. Il faut rappeler qu'il existe cinq articles du code de l'éducation qui assouplissent le décret et ouvrent très largement les possibilités de changement de l'organisation du temps scolaire.

Je détaillerai donc cinq pistes différentes. Tout le monde s'est montré d'accord, dans le cadre des consultations, pour adapter le temps scolaire à l'âge des enfants.

En 1959, le ministre préconisait deux heures d'activité scolaire pour les enfants de moins de sept ans, quatre heures avant neuf ans, cinq heures vers onze ans, et cinq heures trente vers 13 ans.

En 1996, dans un ouvrage co-écrit avec François Testu, nous proposions 21 heures 30 pour le cycle 2 !

Les conséquences sont très intéressantes sur le plan organisationnel :

- révision de l'application des principes de l'aménagement des temps scolaires pour les écoles maternelles et association du personnel lié à la petite enfance au projet commun -pédiatres, etc. ;

- adaptation du calendrier scolaire à l'allégement de la journée ;

- réflexions sur l'organisation de deux calendriers scolaires, un pour le primaire et le collège, l'autre pour le lycée.

En effet, les élèves du collège, lors des examens, sont en vacances en même temps que les lycéens, au 15 juin dans certains endroits. Par ailleurs, en fonction de l'âge des élèves, on compte des examens, le bac, des stages. On l'oublie souvent, un tiers des lycéens doivent effectuer des stages.

Enfin, avec les admissions post-bac (APB), les liens sont de plus en plus affirmés avec les universités. Il est donc justifié de prévoir ces deux calendriers scolaires. C'est une bonne piste, qui a déjà été utilisée...

Il faut également amorcer la réflexion sur les rythmes de travail des collégiens et des lycéens. Tous les observateurs avertis - parents d'élèves, médecins, assistantes sociales, proviseurs ou principaux - affirment qu'un certain nombre d'adolescents sont vraiment fatigués. Une partie de cette fatigue, qui joue entre autres sur le résultat, est engendrée par une mauvaise organisation du temps scolaire. Un emploi du temps de collégien est quelque chose de monstrueux ! Or, on tient rarement compte des élèves dans l'organisation de l'emploi du temps. La Cour des comptes dénonçait fortement cette situation. L'emploi du temps est fait pour les adultes, par les adultes !

Si je poussais le paradoxe, j'irais jusqu'à dire que ce n'est peut-être pas l'école primaire qui avait le plus besoin que l'on se penche sur les rythmes scolaires, mais le collège !

La famille n'est pas non plus exempte de reproches s'agissant de la fatigue des jeunes : l'éducation nationale, les collectivités locales, les associations, pourront faire ce qu'elles veulent pour améliorer la situation, elles n'arriveront jamais à de bons résultats si les parents n'appliquent pas des règles d'hygiène réelles, tant pour les adolescents que pour les enfants du primaire.

Pourquoi ne pas imaginer une campagne nationale de santé publique faite par le Gouvernement, en relation étroite avec le ministère de l'éducation nationale sur ce sujet ?

Il faut également rendre quasiment obligatoire, pour tous les projets bénéficiant de l'aide de l'Etat, la mise en place d'un dispositif d'évaluation ? Comment ? Nous avons des exemples : on a vu comment les collectivités locales prenaient langue avec les universités... Certaines richesses locales le permettent.

Enfin, il faut fortement encourager les formations communes - enseignants, animateurs, IEN, et élus. J'ai été responsable de ces dossiers durant des années, et j'avais créé ce type de formations décentralisées, qui réunissaient l'ensemble des responsables sur plusieurs projets, et donnaient lieu à une formation continue sur le sujet. C'était une découverte, et cela fonctionnait !

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