Je ne suis pas sûr que l'on puisse établir un tableau à deux colonnes en reprenant, au bout de quelques mois, les avantages et les inconvénients de cette réforme.
Globalement, nous n'y voyons cependant pas de point négatif majeur. La réforme n'a pas créé dans le pays de dépression éducative majeure, mais a plutôt donné un élan local nouveau, parfois conflictuel, sur les questions à la fois scolaires et éducatives. Nous pensons qu'il faut corriger les choses progressivement, et tenir compte des divers enseignements, afin de ne pas répéter les erreurs - même s'il est très compliqué de dupliquer les choses d'un territoire à un autre. Il existe cependant des lignes de force...
Une condition est indispensable : assurer la pérennité du dispositif. Ne changeons plus le cadre général dans les dix ans à venir ! La productivité, en matière d'école, est à dix ans au minimum ; en matière éducative, nous ne le savons pas précisément. On ne mesure que des effets aléatoires. On prend souvent l'école pour une société qui n'existe déjà plus. Soyons donc modestes... Quelques indicateurs se dégageront cependant assez rapidement, notamment pour mesurer la confiance des acteurs entre eux et celle qu'auront les enfants dans l'école et dans les adultes qui les aident à grandir.
En second lieu, il faut étendre le chantier aux collèges et aux lycées, mais également travailler sur la question de l'année scolaire. Ceux qui ont participé à la concertation durant l'été 2012 pensaient que ce projet était prêt. Même les acteurs économiques, que l'on accuse parfois à tort d'être les seuls responsables de l'impossibilité d'ouvrir le débat sur cette question, étaient quasiment prêts à faire un certain nombre d'efforts et d'ajustements. Le projet a été retiré parce qu'il fallait gérer cette première période, mais, pour plus de souplesse et de possibilités, il faut bien évidemment poser la question de l'année scolaire !
Enfin, s'agissant des ressources, il faut tenir compte de la question de la professionnalisation. Nous sommes le pays de l'OCDE qui réserve le plus triste sort à sa jeunesse, notamment en termes de professionnalisation. Il y a sans doute là un gisement d'emplois non négligeable, à condition de travailler correctement à faire reculer la précarité de l'emploi et à imaginer d'autres emplois, comme l'articulation entre animateurs, responsables de projets locaux, etc. Prenons appui sur les communes dotées depuis vingt ans de projets éducatifs locaux !
Il va falloir tous faire preuve d'inventivité et d'imagination, et croiser les enjeux. La question de l'utilité sociale des retraités se pose chaque jour ; l'intergénérationnel ne consiste pas à utiliser les retraités pour remplacer les professionnels quand on n'a pas d'argent ; elle permet de répondre à un besoin culturel et social déterminant !
Le mécénat d'engagement, qui consiste à prendre une heure dans la semaine sur son temps de travail pour faire partager une passion, privée ou professionnelle, se développe doucement dans notre pays, de manière encadrée, la France ayant la chance de disposer d'un cadre laïque pour l'école ou pour tout projet éducatif.
La communauté scolaire travaille également à un projet de mobilisation de lycéens auprès des écoles primaires à proximité des établissements de second degré. On sait en effet tout l'intérêt qui existe à créer des liens d'éducation et d'enseignement mutuels. Les lycéens, qui ont un grand savoir-faire en matière de culture numérique, moyennant une formation complémentaire sur le droit à l'image, peuvent accompagner des groupes de deux ou trois élèves, avec des animateurs permanents, autour de cette question. C'est une expérience très profitable que l'engagement ! Elle permettrait à l'institution scolaire de reconnaître dans les acquis des élèves autre chose que les savoirs scolaires - engagement, savoir pratique - par la validation des acquis de l'expérience, dans le cadre de leur parcours professionnel et personnel.