Intervention de Eric de Montgolfier

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 22 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Eric de Montgolfier procureur près la cour d'appel de bourges

Eric de Montgolfier :

Sur Bourges, beaucoup moins. C'est autre chose, c'est la France !

En ce qui concerne les investissements immobiliers sur la Côte d'Azur, le problème est de savoir d'où vient l'argent. Lorsque la fille d'un Président russe, par exemple, achète une villa qui vaut des dizaines de millions d'euros, quand la villa Léopolda, qui appartenait à un financier tout-puissant, est mise en vente pour une somme colossale - on parle de 37 millions d'euros je crois-, il faut savoir si tout cet argent a été obtenu légalement ou illégalement.

D'ailleurs, la déclaration de soupçon, qui est de droit en matière de blanchiment, est faite systématiquement par l'administration fiscale au-delà d'une certaine somme, comme si le montant en rendait la provenance suspecte. Nous en arrivons à votre renversement de la charge de la preuve : l'administration fiscale, compte tenu des montants en jeu, considère qu'il y a fort à parier que l'origine des sommes est douteuse. Faut-il entrer dans cette logique ? Je m'y suis opposé : dépenser l'argent du crime, ce n'est pas nécessairement le blanchir. L'opération de blanchiment commence par une entrée et se termine par une sortie. C'est ce que j'ai expliqué pour la villa Léopolda, qui contient beaucoup de tableaux et de meubles. Si les sommes versées pour l'achat global incluent la valeur des meubles et des tableaux, une opération de blanchiment est possible en cas de revente de ceux-ci. Si seul le bien est acheté, il n'y a pas de blanchiment : c'est un investissement d'origine impure, mais c'est un investissement.

Par ailleurs, face à ce type d'investissement, le problème pour les magistrats est de savoir à qui demander d'où vient l'argent. Croyez-vous que j'obtiendrais une réponse si je demandais au Président russe, par voie de commission rogatoire, si celui de ses proches qui est concerné est un voyou ?...

Nous sommes aujourd'hui confrontés à l'internationalisation des systèmes. Nous n'avons plus de prise sur nombre de crimes en raison de la diversité des droits. On a ouvert les frontières : il fallait les remplacer par des bibliothèques de droit, chaque pays conservant le sien. Nous ne sommes pas dans cette situation et il nous est demandé d'affronter le crime avec de moins en moins de moyens. La lutte est inégale.

Vous savez pertinemment que si je cherchais à interroger le Président de la Russie sur l'origine de la fortune de l'un de ses proches, il y aurait, comme on dit, des mouvements divers...

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