La notion d'autonomie, je pense que ce rapport en traite tout le temps. Nous considérons l'autonomie comme un tout : au-delà des dimensions financière et juridique, c'est la capacité pour l'université d'assumer globalement un ensemble de fonctions - formation, recherche, vie étudiante, relations avec le tissu économique, entre autres.
Le Comp est-il le bon outil ? L'avenir nous le dira... Ce que je puis dire, c'est que la Cour des comptes n'a eu de cesse de demander la mise en place d'un tel outil - nous parlions de contrats d'objectifs et de moyens -, en insistant pour que les moyens soient contractuels, afin que les universités disposent d'une vision pluriannuelle de leurs capacités d'action. Nous souhaitons que ces contrats soient issus autant de l'université que du ministère : la stratégie de l'université, déclinée en objectifs, doit être conçue par elle et validée par le ministère. Il faut aussi que les Comp comportent au moins un bilan d'étape. Sous ces conditions, cet outil est de nature à entraîner des progrès.
Ce qui est fondamental, c'est qu'il s'agit de moyens pluriannuels, engagés sous la forme d'un contrat. Qu'arrive-t-il si les clauses de celui-ci ne sont pas respectées ? En tout cas, cet outil contractuel singularise les relations financières entre l'État et les universités, les rendant plus spécifiques à chaque établissement - université de 100 000 ou 3 000 étudiants, littorale, urbaine ou montagnarde.
Pour nous, le Comp doit être non seulement un outil financier, mais la traduction d'une stratégie locale, qui intègre le phénomène territorial.
S'agissant du déficit de poursuite d'études en deuxième cycle dans les antennes, il est sans doute lié à une sorte de contrat moral entre les universités et les étudiants : le premier cycle peut être accompli dans une antenne, le second reste la spécialité de la maison-mère - si l'on peut dire. Les enseignants qui pilotent les masters et les doctorats sont moins mobiles, même si certains se déplacent. En la matière, je me méfierais d'une recommandation générale : c'est à chaque université d'étudier de près l'opportunité de décentrer son deuxième cycle vers des antennes.
En ce qui concerne les Crous, nous avons lancé, dans la note structurelle dont j'ai parlé au début de mon intervention, une idée un peu forte, dans la perspective d'une université globale, ou université campus : le pilotage par les universités de tous les aspects de la vie étudiante, notamment par l'intégration des Crous. Le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous) avait émis de très fortes réserves, mais les autres acteurs s'étaient montrés ouverts. Nous avons été surpris, dans le cadre de ce rapport, de constater que les présidents d'université ne se sentaient pas encore prêts à assumer cette charge. Nous laissons donc vivre cette idée, sans en faire une recommandation. Elle peut toujours être expérimentée - un bon tiers des universités lui réservent un accueil favorable.
Vis-à-vis du monde économique, les universités ont beaucoup changé. Depuis quinze ans que je m'intéresse à ce domaine, je les ai vues devenir autres. Dans certaines, la relation avec le tissu économique est devenue une priorité. En revanche, il ressort de notre consultation de chefs d'entreprise que ceux-ci souhaitent être davantage appelés, happés dans le monde de l'université, notamment pour participer à la définition de certaines formations et à la stratégie d'insertion professionnelle. Je considère, pour ma part, que les chefs d'entreprise ne sont pas encore assez nombreux dans les conseils d'administration. Il faut aussi savoir de quelles entreprises on parle : petites et moyennes entreprises (PME), entreprises de taille intermédiaire (ETI) ou grandes entreprises.
Nous sommes assez étonnés qu'il n'existe pas d'incitation à calculer l'impact économique d'une université, ni de méthode pour le faire. Certaines le font de leur propre chef, en passant par des cabinets dont les travaux sont forcément intéressants, puisqu'uniques en leur genre, mais aboutissent parfois à des conclusions étonnantes - et, en tout état de cause, ne sont pas contre-expertisés. De fait, ce sujet reste un peu en jachère. Une incitation de l'État par un questionnement et un outil méthodologique généraux serait bienvenue.
S'agissant enfin de la recherche, nous avons, en effet, fait l'impasse sur ce sujet. Oui, mille fois oui, le Comp doit tenir compte de l'activité de recherche. Mais qui définit l'architecture de ce contrat, et qui le signe ? Le contrat est-il la traduction d'une stratégie locale ? Y a-t-il une stratégie de recherche dans l'université considérée ? Est-elle validée, et par qui ?