Merci pour ce travail particulièrement rigoureux et minutieux, qui rappelle un certain nombre de problèmes, déjà bien identifiés, de nos universités. Je pense notamment à l'absence générale de direction dans les réformes successives de l'enseignement supérieur, inspirées par des doctrines parfois contradictoires. L'alternance entre des périodes de division et de regroupement des universités ont rendu le paysage universitaire français assez illisible, au point qu'on ne sait plus, parfois, de quelle université on est diplômé. Ainsi de Paris VII, devenue Paris-Diderot, puis Université de Paris, puis Université Paris Cité... Difficile de s'y retrouver quand on est français, et encore plus si l'on est un étranger ! Cela peut être néfaste pour l'attractivité à l'international de nos universités.
Vous rappelez également le caractère obsolète du dispositif d'allocation de moyens, et notamment du fameux dialogue stratégique et de gestion, qui n'est plus en phase avec la réalité et ne permet pas de corriger les différentes inégalités que vous pointez.
Vous constatez des écarts particulièrement choquants et inacceptables, en matière de réussite étudiante, entre les universités qui concentrent les plus importants effectifs de licence, et obtiennent un taux de réussite au diplôme de 39 %, et les universités où les effectifs de licence sont moins nombreux, qui affichent un taux de réussite au diplôme de 61 %. Il y a bien une corrélation entre ces taux de réussite et la composition sociale de ces différentes universités. Les universités qui concentrent les plus importants effectifs de licence comptent davantage d'étudiants défavorisés : 27 % de boursiers, 32 % de bacheliers technologiques et professionnels et 16 % d'étudiants ayant obtenu une mention « bien » ou « très bien » au baccalauréat. Celles où les effectifs de licence sont moins nombreux n'accueillent que 14 % d'étudiants défavorisés, 18 % de boursiers et 9 % de bacheliers technologiques - avec 50 % d'étudiants ayant obtenu la mention « bien » ou « très bien ». Non seulement les politiques développées par le ministère ne corrigent pas ces inégalités mais elles les amplifient souvent.
Vous faites des observations descriptives sur la taille variable des universités mais peu de remarques normatives. On s'est beaucoup gargarisé du projet de faire du plateau de Saclay un Cambridge à la française. C'est un modèle qu'on retrouve peu en France. Une université de taille moyenne, c'est-à-dire environ 20 000 étudiants, se voit peu chez nous en dehors des grandes métropoles. Faut-il continuer à fusionner nos universités en de grandes structures métropolitaines, quitte à y adjoindre des antennes, ou bien nous faudrait-il plus d'universités, mais moins grosses ?
Votre rapport parle de périmètre, notamment pour définir ce qu'est une université et appréhender les enjeux liés à ce qu'on appelle la vie étudiante. Vous faites remarquer que les Crous s'occupent non pas seulement des étudiants des universités, mais de tout l'enseignement supérieur. On peut penser aux élèves des classes préparatoires. Justement, vous faites largement abstraction du système dual d'enseignement supérieur dans vos analyses alors que, pour beaucoup, les élèves des classes préparatoires ont vocation à rejoindre l'université. N'y a-t-il aucun impact de la carte et de la sociologie des classes préparatoires sur les disparités sociales et géographiques que vous constatez à l'université ? Ne faudrait-il pas réfléchir à de meilleures synergies entre les deux, voire à un rapprochement ?