Intervention de Vincent Delahaye

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 29 mars 2023 à 9h00
Avenir des concessions d'autoroutes — Audition de Mm. éric Jeansannetas président et vincent delahaye rapporteur de la commission d'enquête sur le contrôle la régulation et l'évolution des concessions autoroutières 2020

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye, rapporteur de la commission d'enquête sur le contrôle, la régulation et l'évolution des concessions autoroutières :

La commission d'enquête n'aurait pas de raison aujourd'hui de ne pas maintenir ses conclusions, rien n'ayant changé, à part une prise de conscience du Gouvernement.

Bruno Le Maire a reconnu à l'Assemblée nationale la semaine dernière qu'il y avait une surrentabilité, ce qu'il n'avait pas fait lorsque nous l'avions auditionné dans le cadre de nos travaux. On assiste donc à une prise de conscience, comme en témoigne la saisine du Conseil d'État, en partie grâce au travail que nous avons réalisé et à sa médiatisation, qui crée une pression pour que les choses évoluent. Parce que la volonté des sociétés d'autoroutes est que rien n'évolue d'ici la fin des contrats et même qu'ils puissent proroger leurs contrats actuels. Après avoir atteint les 8 % de rentabilité que j'ai précédemment évoqués, les sociétés concessionnaires bénéficieront d'après nous d'une surrentabilité dont le montant oscillera 30 et 35 milliards d'euros, à partir de la fin 2023 pour Vinci et à compter de fin de 2024 pour Eiffage. Une discussion doit avoir lieu sur le partage de la rentabilité entre les concessionnaires, l'État et les usagers.

L'État doit montrer sa volonté. Les concessionnaires ne sont pas tout puissants en raison des contrats qu'ils ont signés. Ces contrats peuvent être critiqués. Dominique de Villepin, à qui j'avais demandé pourquoi les contrats n'avaient pas été modifiés en 2006, avait dit qu'on ne pouvait le faire dès lors que le capital des Autoroutes du sud de la France avait été ouvert au secteur privé. C'est un peu court comme réponse ! Dès lors qu'un appel d'offres était lancé pour une autre partie du réseau autoroutier, il me semble que l'on pouvait modifier les contrats. On a voulu aller vite...

Ségolène Royal nous a dit qu'elle n'avait pas eu connaissance du contenu du protocole signé en 2015 avant de le lire dans la presse ! Elle a signé sans savoir ce qu'elle signait, ce qui est aberrant. Ce protocole prévoyait bien quelques modifications, mais à la marge. La clause sur les excès de rentabilité prévoit des cibles inatteignables, quelle que soit l'évolution du trafic.

Il ne faut pas s'en laisser compter et ne pas céder au chantage des sociétés concessionnaires sur les risques de contentieux. En 2015, Ségolène Royal avait pris la décision de manière unilatérale de geler les tarifs, ce qui mettait l'État en position de faiblesse dans la négociation, cette décision n'étant pas conforme aux contrats. Le rattrapage prévu ensuite s'est étalé jusqu'en 2023, pour un montant total plus important pour les automobilistes que si les tarifs avaient augmenté uniquement en 2015. Encore une fois, la négociation s'est faite trop rapidement en 2015.

C'est pour cela qu'il est important d'anticiper l'avenir comme vous le faites aujourd'hui et comme l'a fait la commission d'enquête. Il ne s'agit pas d'éliminer les sociétés privées ou de dire qu'elles ne doivent pas gagner d'argent, mais la rentabilité doit être raisonnable. On peut tout à fait imaginer se remettre autour de la table tous les trois ans et, si la rentabilité a varié de plus ou moins 5 %, discuter des conséquences.

Quant à la durée des contrats, elle dépendra des investissements que l'on demandera aux sociétés de réaliser.

Enfin, une partie des 30 à 35 millions d'euros de surrentabilité pourra être affectée au financement d'autres infrastructures de transport, mais je ne sais pas quelle part pourra aller au rail. C'est une question que votre commission doit examiner dans le cadre de ses travaux. Je me méfie de la création d'une nouvelle structure, qui entraîne des coûts supplémentaires.

Je ne comprends pas qu'une contribution « volontaire » au financement de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ait été prévue. Il fallait prévoir une contribution, c'est tout.

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