Intervention de Bernard-Marie Dupont

Commission des affaires sociales — Réunion du 29 mars 2023 à 9h30
Enjeux philosophiques de la fin de vie — Audition de Mme Monique Canto-sperber directrice de recherche au cnrs membre du comité consultatif national d'éthique Mm. Bernard-Marie duPont médecin juriste professeur d'éthique médicale andré comte-sponville philosophe essayiste et jacques ricot philosophe chercheur associé au département de philosophie de l'université de nantes

Bernard-Marie Dupont, juriste, professeur d'éthique médicale :

Je ne suis pas d'accord avec vous. Je suis un rural, originaire du Pas-de-Calais et j'ai bien vu ce que l'on faisait parfois des personnes âgées : parfois, on n'a rien d'autre à leur offrir que des Ehpad qui sont des mouroirs. N'y a-t-il pas dès lors une indignité dans notre comportement de bien portants, lorsque nous disons qu'il faut répondre à leur demande si elles disent qu'elles veulent partir ?

Le combat que nous devons mener est pour une vie digne et il doit inclure la possibilité d'une fin digne. Pour le reste, les frontières sont très floues et les dossiers auxquels sont confrontés les procureurs ou les juges sont éminemment complexes.

Quant aux conséquences sur le droit, on pourrait prendre l'exemple du secteur assurantiel. Les contrats d'assurance-vie ou d'assurance automobile évoluent dès lors que la personne est sous traitement médical. Les conséquences sur le droit seront énormes si l'on choisit de légaliser.

Pour ce qui est de mourir dans sa famille, une prise en charge existe déjà, mais qui reste très insuffisante.

Toutes les lois sont-elles morales ? Bien évidemment, non. Une dictature ne vit pas sans lois, bien au contraire. Le nazisme, par exemple, est un système éminemment juridique.

Ce qui m'obsède - et ce n'est pas une posture idéologique -, c'est que dans les pays où l'euthanasie a été dépénalisée ou légalisée, on n'a jamais pu maîtriser les dérives.

Vous parlez d'un choix individuel : certes, la question de la liberté est fondamentale, mais faut-il pour autant que, au nom de raisons idéologiques, politiques ou raciales, on choisisse à ma place sans que je sois informé ni d'accord ? Or, en dépit de la protection qu'offre la loi Leonetti et malgré l'existence de formations sur le sujet, qui restent insuffisantes, je peux vous assurer qu'il y a déjà des dérives, volontaires ou involontaires. La question de la liberté de choisir le moment de sa mort est certainement la question philosophique par excellence ; mais dans la pratique, elle est très compliquée à mettre en oeuvre et j'attire votre attention sur l'impossibilité de maîtriser les dérives.

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