Il est intéressant d'aborder la question des plateformes numériques sous un angle un peu différent. Je rappelle qu'il s'agit d'un secteur très disparate, dans la mesure où la nature des plateformes elle-même est très variée et où l'approche des usagers, qu'ils soient clients ou professionnels, fluctue beaucoup.
La présente proposition de loi nous permet de réfléchir à cet enjeu algorithmique, qui est à la fois très particulier et pas entièrement nouveau, puisqu'il existe depuis que les sciences mathématiques existent. Ce qui est inédit, en réalité, c'est l'existence d'un intermédiaire, la plateforme digitale, et l'importance qu'ont prise les algorithmes dans notre société.
Autre remarque, les enjeux algorithmiques ont trait à de très nombreux domaines et ne concernent pas que le monde du travail. Ainsi, j'écoutais l'autre jour un chercheur, qui affirmait avoir développé un programme permettant d'évaluer, trois à quatre ans à l'avance, le risque de survenue du cancer du sein chez les patientes.
Aujourd'hui, il nous appartient de répondre à plusieurs questions fondamentales : les algorithmes font-ils la loi ? Leur présence suffit-elle à requalifier en contrat de travail le lien actuel entre travailleurs indépendants et plateformes de mise en relation ?
Ce dernier sujet a déjà été abordé et ne fait pas consensus aujourd'hui, d'autant que les acteurs eux-mêmes, les travailleurs indépendants, sont partagés, certains voulant rester sous ce statut, d'autres non.
C'est pourquoi la requalification globale prévue par le texte conviendra peut-être à une majorité d'entre vous, mes chers collègues des groupes de l'opposition sénatoriale. La majorité sénatoriale défendra, pour sa part, comme elle le fait depuis toujours, une position plus nuancée sur le sujet, un peu différente de celle de Mme la rapporteure.