Monsieur le sénateur Bilhac, vous avez suggéré que nous pourrions combler le déficit public en augmentant les recettes. Il n’est bien sûr ni impossible ni interdit de l’envisager. Mais ayons tout de même conscience – dans une autre vie, une personne que je connaissais avait parlé de ras-le-bol fiscal – que le consentement à l’impôt de nos concitoyens est écorné, qu’il existe des limites assez objectives à l’imposition des ménages et que nous ne pouvons pas pénaliser la compétitivité de nos entreprises.
Au total, j’ai donc le sentiment que les marges de manœuvre dans ce domaine – vous constaterez ma modération – sont limitées. Et comme elles le sont, les deux autres leviers à actionner sont la croissance, qu’il faut muscler – cela implique d’investir et, donc, de se désendetter –, et la maîtrise de la dépense, que nous contribuons à analyser au travers de cette revue.
J’en profite pour rappeler que la rationalisation des compétences nous paraît indispensable. Nous pensons que toute la sphère publique peut contribuer à la maîtrise des finances publiques.
Monsieur le sénateur Allizard, tous les défis que vous avez pointés, notamment dans le domaine de la défense, prouvent que nous devons faire des choix en matière de dépenses publiques et que nos besoins d’investissement sont importants.
Le Haut Conseil des finances publiques, que je préside, est en train d’examiner le projet de loi de programmation militaire qui vous sera bientôt soumis : un texte aussi ambitieux, qui prévoit une augmentation aussi forte des dépenses, limite naturellement nos marges de manœuvre.
Si la loi de programmation des finances publiques avait fixé des objectifs un peu plus ambitieux, on pourrait presque dire qu’un tel projet impose une réduction de la dépense publique plus importante que celle que la Cour elle-même pourrait suggérer. Cela étant, je ne voudrais pas anticiper sur l’avis qui sera rendu sur le sujet.
Il ne me semble pas nécessaire d’aborder la question de la soutenabilité de la dette, car je ne crois pas qu’il s’agisse d’un vrai problème aujourd’hui. En tout cas, il n’y a pas de crise de crédibilité de la dette française.
Pour autant, en la matière, je suis attentif à la divergence qui s’accroît entre la France et le reste de la zone euro. Il y a des limites à ne pas franchir, car nous partageons une zone monétaire commune. Je crains, si je me projette en 2027, que la France reste au même niveau d’endettement, et que tous les autres pays parviennent à réduire leur dette publique. Cela nous conduirait à occuper une place qui n’est pas digne de notre pays.
La France figure parmi les pays leaders dans la zone euro. Nous ne pouvons pas devenir le leader en matière de dette ; je me permets de le souligner ici.