Votre première question porte sur l'observation. Un observatoire observe, récolte, analyse, soutient et diffuse des outils. Nous réalisons des études en partenariat avec des acteurs et devons continuer à le faire, qu'elles soient petites, moyennes, larges, spécifiques, au sein de l'océan Indien ou des différents départements d'outre-mer. J'oserai dire que l'Observatoire de la parentalité de La Réunion est en train d'essaimer, puisqu'une structure similaire est en train de se monter à la Martinique, portée par la Caf et d'autres partenariats.
Je suis professeur d'université en anthropologie. Pourquoi l'université de La Réunion a-elle travaillé avec la Caf pour monter un Observatoire ? Travailler et mener des recherches, c'est très bien, mais en quoi affectons-nous les populations ? Je pense que ces partenariats entre la recherche académique et l'action sociale sont porteurs. Pour preuve, nous avons également monté l'Observatoire régional de l'océan Indien. Nous pouvons ouvrir ce dispositif aux départements, aux collectivités. Nous avons également noué des liens avec le rectorat ou d'autres associations et laboratoires de recherche. Ainsi, nous avons créé au niveau méso - au milieu - une cellule de réflexion présentant des atouts multiples. Il s'agit d'un lieu neutre, porté par l'État, la Caf et l'université. Notre éthique est l'objectivité, comme nous le faisons dans la recherche, et nous sommes au plus près du contact des associations. Les partenariats peuvent ainsi être très riches, puisque la cellule familiale est au coeur de l'économie, des organisations sociales, de nos structures du lien social.
Il est absolument essentiel que les politiques publiques puissent renforcer les budgets, les dispositifs, les pratiques, la concertation. Nous sommes très honorés d'être conviés à cette audition, surtout dans le basculement que nous sommes en train de vivre. Le XXe siècle vient de se terminer. Nous entrons dans une autre période. La cellule familiale, la filiation et le lien social parent-enfant, qui sont des liens primaires, sont à consolider. Vous le savez comme moi, les réseaux sociaux, les écrans créent du délitement et de la non-confiance. Combien de conflits éclatent aujourd'hui avec des adolescents dont les parents n'ont pas de matière à ordonner, à gouverner et à communiquer ? Pour cette raison, j'ai évoqué la communication non violente lors de mon propos. Elle doit être plus présente, à la fois dans les collèges et lycées, mais aussi dans le réseau du soutien à la parentalité.
Les résultats de nos travaux de recherche, partagés dans ce format avec les acteurs du terrain, nous permettent aujourd'hui de proposer de futures actions au coeur de la socialisation des jeunes femmes et des jeunes hommes, avant même qu'ils ne soient parents : lycéens, étudiants, jeunes travailleurs. C'est en amont de la parentalité que nous devons également agir !
Sur le site de l'Observatoire, nous avons publié de petits films de trois minutes dans lesquels des pères s'expriment. On comprend immédiatement leurs solutions pour aider les autres parents en souffrance. Ces supports sont à disposition du réseau pour animer des groupes de parole et briser la glace. Car il n'est pas évident de présenter sa problématique familiale, de parler de ce qu'il se passe à la maison, des liens intimes. Nous constatons que l'absence des parents dans les groupes de parole est en lien avec le fait que tout le monde se connaît dans les quartiers et les cités. Ainsi, nous disposons de très belles structures, appuyées par le département et la Caf, mais nous devons les rendre plus attractives. Pour ce faire, nous devons travailler en transversalité, avec le milieu professionnel qui peut injecter de la formation, mais aussi avec le rectorat, en prenant en compte les spécificités en lien avec la monoparentalité et l'isolement. Je pense que nous devons renforcer ce processus, et « aller vers » en travaillant sur les transversalités.