Intervention de Martine Filleul

Réunion du 5 avril 2023 à 15h00
Parité dans la haute fonction publique — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Martine FilleulMartine Filleul :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’issue du rapport d’information de la délégation aux droits des femmes sur le bilan d’application de la loi Sauvadet, Annick Billon, Dominique Vérien et moi-même avons souhaité déposer cette proposition de loi, car nous avons l’égalité entre les hommes et les femmes et la fonction publique chevillées au corps.

La fonction publique est l’un des piliers de notre démocratie. Depuis 1945, elle contribue à sceller le pacte républicain : pas moins de 5, 5 millions d’agents sont engagés au quotidien au service de la population sur tout le territoire, guidés par le sens du devoir.

Force est cependant de constater qu’elle est en perte de sens et d’attractivité. Manifestement, elle n’attire plus. J’en veux pour preuve le peu de candidats se présentant aux différents concours. La diminution progressive, mais drastique, des moyens alloués aux services publics, ainsi que celle du pouvoir d’achat des agents y est pour beaucoup.

Le choix du recours important aux contractuels a également affaibli le sens de cet outil au service de la République. Le revitaliser, le renforcer, le valoriser, le moderniser, le rendre exemplaire, est un impératif dans une société fracturée.

Exemplaire ! Nous sommes loin du compte en matière d’égalité entre les hommes et les femmes, et en particulier en matière de salaire. Vous l’avez dit, monsieur le ministre, les hommes sont rémunérés, en moyenne, 12 % de plus que les femmes ! En matière de parité, alors que plus de 60 % des agents publics sont des femmes, les postes de direction sont encore très majoritairement occupés par des hommes.

Certes, la loi Sauvadet de 2012 a donné l’impulsion d’un réel changement, en imposant aux employeurs publics un quota pour les primo-nominations, qui a atteint l’objectif fixé de 40 % de femmes en 2017.

Mais il faut résolument « changer de braquet », pour reprendre les termes du rapport de la délégation aux droits des femmes, car le compte n’y est toujours pas. La cible des primo-nominations ne permet pas d’augmenter le nombre de femmes réellement en fonction dans les postes de direction.

On observe que les sanctions mises en place sont contournées, en utilisant soit les statistiques, soit différents stratagèmes. Finalement, le nombre de postes soumis à la loi Sauvadet reste réduit ; il n’y a pas eu de « ruissellement ».

Cette proposition de loi progressive parie sur le long terme et repose sur quatre principes directeurs.

Premièrement, il s’agit de faire preuve d’intransigeance, en prévoyant la suppression de toute dispense de pénalités financières, afin qu’aucun employeur public ne puisse se soustraire aux quotas des primo-nominations.

Deuxièmement, il convient de faire preuve d’ambition, en relevant le quota de primo-nominations du sexe sous-représenté, pour atteindre 45 %, avec un élargissement des emplois concernés.

Troisièmement, il est nécessaire de faire preuve de cohérence, pour corriger la cible d’origine, en instaurant un quota de 40 % du sexe sous-représenté dans le stock des emplois concernés.

Quatrièmement, il faut faire preuve de rigueur. Pour que l’exigence soit au moins aussi importante dans la fonction publique que dans le secteur privé, cette proposition de loi prévoit la mise en place d’un index, qui devra être réalisé et rendu public tous les ans.

Le groupe socialiste, par la voix de Didier Marie, vous proposera de consolider ces principes.

Les conclusions du rapport d’information sur les dix ans de l’application de la loi Sauvadet sont sans équivoques. Nous devons aller plus vite et nous devons faire preuve d’une plus grande ambition : c’est tout le sens des amendements que défendra mon groupe.

La parité ce n’est pas 45 %, c’est 50 %, et nous devons inscrire cet objectif dans le marbre de notre législation.

Nous ne pouvons pas attendre 2029 pour l’entrée en vigueur du quota de 40 % sur le stock. Mettons-nous d’accord sur la date de 2027 !

Pour élargir le nombre d’emplois concernés par les quotas, nous proposons de dépasser le débat relatif à l’abaissement à 20 000 du seuil démographique, actuellement fixé à 40 000. Il suffit de généraliser l’obligation de nominations équilibrées, dès lors que la collectivité dispose d’un nombre d’emplois fonctionnels supérieur ou égal à trois.

Enfin, nous souhaitons que les communes les plus ambitieuses, les plus volontaristes, celles qui se donnent les moyens d’aller plus loin, ne soient pas pénalisées pour leurs efforts. Que Paris, Lille ou d’autres villes se voient appliquer des sanctions financières pour avoir trop de femmes à des postes de responsabilité est incompréhensible, à l’heure d’un déséquilibre majeur au niveau national.

En conclusion, cette proposition de loi ne constitue pas l’aboutissement de l’évolution s’agissant de l’égalité entre les hommes et les femmes dans la fonction publique, mais le texte s’inscrit dans le sens de l’histoire et du progrès, ainsi que dans le sens du féminisme. Comme l’a très justement dit Gisèle Halimi, « c’est un combat valeureux qui n’a jamais versé de sang ». J’ai l’espoir que d’autres, après nous, reprendront le flambeau pour poursuivre ce combat.

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