Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous le disons, nous le répétons : l'espace numérique apporte au monde des atouts formidables, mais est aussi source de danger, tout particulièrement pour les enfants, qui naviguent sur internet dès l'âge de 10 ans – parfois même avant.
Dans le monde réel comme dans le monde virtuel, il est de notre devoir de garantir la sécurité, les droits et le bien-être de nos enfants. C'est pourquoi la protection des enfants dans l'espace numérique est l'un des cinq chantiers prioritaires fixés par la Première ministre à son gouvernement à l'occasion du premier comité interministériel de l'enfance, en novembre 2022.
Notre feuille de route est très claire : il nous faut lutter contre l'utilisation excessive des écrans, qui génère de nombreuses difficultés et de nombreux troubles du comportement, du langage, du sommeil et crée des addictions.
Il nous faut aussi interdire aux mineurs l'accès à des contenus inadaptés à leur âge, au premier rang desquels les contenus pornographiques. Sur ce point, Jean-Noël Barrot et moi sommes intransigeants : nous avons pris des mesures plus contraignantes encore, qui s'appliqueront aux éditeurs de sites pornographiques.
Il nous faut aussi combattre toutes les formes d'infractions dont les mineurs peuvent être victimes sur internet, au premier rang desquelles le cyberharcèlement et le grooming.
Enfin, il nous faut garantir les données et le droit à l'image des enfants sur les réseaux sociaux. Je le rappelle, une image sur deux d'enfant retrouvée dans les ordinateurs portables des pédocriminels – une image sur deux ! – a été volée sur les réseaux !
Depuis un an, l'ensemble des ministres concernés sont pleinement mobilisés. Je souhaite saluer l'action de mes collègues, Jean-Noël Barrot, Pap Ndiaye, mais aussi Gérald Darmanin et Éric Dupond-Moretti pour lutter contre les excès des réseaux.
Nous pouvons également compter sur l'engagement des parlementaires des deux chambres, les autorités de régulation et de nombreuses associations.
De fait, collectivement, nous prenons tous les jours un peu plus la mesure des risques que représentent les écrans, internet et les réseaux sociaux pour nos enfants.
Je me réjouis, en tant que secrétaire d'État chargée de l'enfance, de constater que nous élaborons, à tous les niveaux, une véritable stratégie pour prévenir les risques, mieux accompagner les familles, responsabiliser les acteurs du numérique, notamment les plateformes.
Au Parlement, trois propositions de loi visant à mieux protéger les enfants en ligne sont ainsi examinées depuis le début de l'année : c'est un message politique très clair et très fort. Caroline Janvier, Bruno Studer et Laurent Marcangeli ont, en effet, porté, à l'Assemblée nationale, des textes ambitieux qui ont été adoptés très largement.
Le Sénat a mené des travaux importants qui nourrissent notre action au quotidien. Je salue le rapport porté par Annick Billon, Laurence Rossignol, Laurence Cohen et vous-même, madame la rapporteure, sur l'industrie de la pornographie, et, bien sûr, la commission d'enquête conduite par le président Malhuret sur TikTok.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis convaincue que la protection des enfants en ligne peut une nouvelle fois nous réunir et nous unir aujourd'hui. Je ne crois pas me tromper en disant, comme vous, qu'il est insupportable de lire les rapports faisant état des dégâts causés par les algorithmes addictifs, la désinformation et les violences commises en ligne sur les enfants.
Loin de moi l'idée de diaboliser les réseaux sociaux et les grandes plateformes, mais, en tant que secrétaire d'État chargée de l'enfance, je me dois d'alerter sur ces risques et dérives graves qui abîment la santé des plus jeunes.
Il faut l'admettre, nous, adultes, avons été dépassés ; nous avons probablement baissé la garde par imprudence et, surtout, par méconnaissance et incompréhension.
Jean-Noël Barrot l'a dit : aujourd'hui nous sommes dans l'action pour essayer de rattraper le temps perdu. Face à ces défis, nous avons choisi d'agir sur plusieurs plans : en améliorant, à la fois, l'éducation des enfants, l'accompagnement des parents et la formation des professionnels ; en généralisant les ateliers de parentalité numérique sur l'ensemble du territoire ; et en renforçant les dispositions relatives à l'autorité parentale dans l'environnement numérique, et donc les obligations en résultant.
Aujourd'hui, votre assemblée peut déterminer l'âge à compter duquel un enfant pourra s'inscrire de façon autonome sur un réseau social.
Il nous faut de nouveau rappeler une évidence : s'inscrire sur un réseau social n'est pas un acte anodin, en particulier pour les enfants. Car, sur un réseau social, ces derniers sont confrontés aux mêmes risques que dans la vie réelle – je dirais même que, parfois, ils le sont encore plus.
On le sait, là où il y avait harcèlement, il y a aujourd'hui cyberharcèlement, dont l'impact sur les enfants est décuplé, démultiplié.
Là où il pouvait y avoir une incitation isolée à la haine et au suicide, il y a aujourd'hui un déploiement numérique de ce type d'influence. Les réseaux sociaux sont source de dangers réels et graves.
Dans ce contexte, contrôler et accompagner l'accès des mineurs à l'entrée des réseaux est une réponse efficace. C'est la raison pour laquelle, avec Jean-Noël Barrot, je soutiens la proposition de loi de Laurent Marcangeli pour qu'aucun enfant de moins de 15 ans ne s'inscrive sur un réseau social sans l'accord de ses parents. Ce sera un nouveau moyen d'accompagner les enfants dans leurs usages numériques et de les préserver des excès d'internet.
Je sais qu'en privilégiant l'intérêt supérieur de l'enfant il peut nous être reproché de porter atteinte à la liberté des adultes. En l'occurrence, nous voulons rappeler aux parents de ne pas céder à la facilité et de prendre leurs responsabilités. Je l'assume, nous l'assumons. Parce que prendre soin de nos enfants est la priorité du Président de la République, celle du Gouvernement et la mienne en tant que secrétaire d'État chargée de l'enfance.