Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est un texte important que nous examinons aujourd'hui.
Le groupe Union Centriste est particulièrement attaché – comme vous, monsieur le ministre – à la lutte contre l'ensemble des fraudes. En témoignent les nombreux amendements que ses membres, notamment Nathalie Goulet, ont déposés sur ce sujet, en particulier lors de l'examen des projets de loi de finances.
Cette lutte, qui requiert évidemment des moyens adaptés, est extrêmement importante, car la fraude gangrène la société dans laquelle nous vivons. D'une part, elle empêche l'État de disposer d'un certain nombre de moyens au service de l'action publique, ce qui pose un grave préjudice à l'ensemble de nos concitoyens. D'autre part, la fraude est une porte d'entrée à toutes les dérives possibles, par le biais des trafics de tout genre qui sévissent dans le monde entier. Je pense à la drogue, bien entendu, fléau particulièrement dramatique dans de nombreux pays et qui pourrait le devenir en France également, mais aussi au tabac ou à la contrefaçon et à tout ce qui a pour but d'empêcher que s'établissent des relations tout à fait normales entre les uns et les autres.
Il faut donc s'attacher à faire les choses dans le bon ordre. Notre code des douanes n'avait pas été refondu depuis des décennies ; il était donc important de le faire, ne fût-ce que, comme Éric Bocquet vient de le rappeler, pour répondre à l'obligation qui découle de la récente décision du Conseil constitutionnel. Cela nous donne également l'occasion d'adapter notre droit aux moyens technologiques dont on dispose aujourd'hui et dont il est indispensable de doter les services des douanes.
Monsieur le ministre, je veux vous remercier de l'initiative que vous avez prise en invitant les parlementaires volontaires à aller voir, sur le terrain, la manière dont les douanes travaillent. Pour ma part, je me suis rendu auprès des agents de la direction régionale des douanes d'Amiens, pour voir comment ils opéraient sur l'axe Paris-Lille. Je veux saluer le travail qu'ils mènent dans des conditions qui sont loin d'être faciles : l'activité, proportionnelle au flux de véhicules, est extrêmement importante et les moyens dont disposent les agents sont parfois trop réduits pour bien appréhender la réalité de ceux qui veulent détourner la législation de notre pays. Cependant, j'ai trouvé là des agents particulièrement volontaires et mobilisés, des personnes attachées à une bonne réalisation de leur travail.
Cet engagement porte ses fruits : l'an dernier, comme cela a été rappelé, 650 tonnes de cigarettes de contrebande et plus de 100 tonnes de stupéfiants ont été saisies par les douanes. Tout cela est à mettre à l'actif des nombreux agents qui effectuent cette mission sur le territoire national.
Mais pour que cela continue, monsieur le ministre, disons-le très clairement, il faut s'assurer que le périmètre dans lequel les agents des douanes peuvent agir soit le même que celui dans lequel les trafiquants opèrent.
On sait, et l'expérience qu'il m'a été donné de vivre l'a confirmé, que la plupart des marchandises de contrebande arrivent de ports étrangers, notamment de ceux de Rotterdam et Anvers, soit parce que leurs services de douane y sont, peut-être, moins regardants sur ce qui y arrive, soit du fait de l'ampleur des flux de marchandises qui y transitent. Cela nous amène d'ailleurs à nous interroger aussi sur la capacité de nos installations portuaires.
Puisque l'essentiel du commerce international et du transport de marchandises s'effectue par voie maritime, en développant nos ports pour qu'ils puissent réaliser plus d'opérations de transport, nous permettrions à nos services de mieux maîtriser la réalité des trafics qu'ils combattent. Devoir saisir ces marchandises illégales alors qu'elles transitent entre les pays de débarquement et ceux auxquels elles sont destinées, entre le nord et le sud de l'Europe, rend la tâche de nos agents particulièrement compliquée.
Je voudrais aussi appeler votre attention, monsieur le ministre, sur la fraude à la TVA évoquée par le rapporteur Albéric de Montgolfier. Comme il le soulignait, il faudra que le dispositif présent dans ce texte soit complété à l'avenir par d'autres volets si l'on veut lutter efficacement contre les fraudes ; les avancées déjà permises ici devraient néanmoins permettre aux agents d'être plus efficients.
Ma collègue Sylvie Vermeillet, qui suit attentivement ces questions, est particulièrement préoccupée par la lutte contre la contrefaçon et le trafic de tabac, dont l'ampleur est démontrée par les chiffres que j'ai cités. Les services des douanes m'ont affirmé avoir récemment pu démanteler cinq ateliers de fabrication de tabac installés illégalement sur notre territoire. C'est dire que, au vu des perspectives de profit qu'ils offrent, les opérateurs n'hésitent plus à installer des ateliers sur notre territoire.
Il faut donc que nous soyons beaucoup plus vigilants sur ce sujet. Nous devons nous assurer que les moyens donnés à nos agents pour lutter contre ces ateliers soient plus opérants, sans quoi ce type de contrefaçon va encore se développer.
Fort heureusement, le Gouvernement propose que les sanctions soient nettement renforcées, parce qu'il n'y a pas de raison que les sanctions soient particulièrement lourdes pour le trafic de stupéfiants, mais moindres pour le trafic de tabac. Bien sûr, la lutte contre les stupéfiants doit encore être renforcée, mais la lutte contre la fraude au tabac doit l'être aussi. Il faudra sans doute doter nos agents de meilleurs outils pour y parvenir.
J'espère à ce propos, monsieur le ministre, que le Conseil d'État va rejeter le recours en référé déposé contre le décret pris le 19 avril dernier pour permettre l'utilisation de moyens aéroportés de surveillance par les douanes et les forces de l'ordre. Là aussi, clairement, il s'agit de dispositions visant à doter nos services de douanes d'outils modernes, dispositions que certains attaquent au nom de je ne sais quel esprit de liberté, ce qui est particulièrement regrettable. Il faut que nous puissions continuer dans cette voie.
Vous nous demandez également, monsieur le ministre, de vous habiliter à refondre le code des douanes par ordonnance. Le groupe Union Centriste y est, bien entendu, tout à fait favorable. Simplement, nous souhaitons que cette ordonnance fasse ensuite l'objet d'une ratification. Il est important que le Parlement, quand il confie ses responsabilités à l'exécutif, puisse ensuite contrôler ce que celui-ci a réalisé. La question de la ratification des ordonnances se pose de manière générale, comme le recours à cette procédure a augmenté ces dernières années, mais elle se pose ici de manière plus spécifique : il importe particulièrement que nous puissions ratifier cette ordonnance-ci.
Cela étant dit, monsieur le ministre, le groupe Union Centriste votera avec enthousiasme ce projet de loi.