Intervention de Stéphane Ravier

Réunion du 24 mai 2023 à 15h00
Douane — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la criminalité en bande organisée, dont les méthodes assassines, barbares, font grand bruit depuis le début de l'année à Marseille, prend racine dans les trafics transfrontaliers de contrefaçons, d'armes, de tabac et, bien évidemment, de stupéfiants.

On déplore vingt et un morts depuis le début de l'année dans la cité phocéenne. Des quartiers entiers passés sous un autre droit vivent dans la peur des balles perdues et d'éventuelles représailles de la part des narcoterroristes qui font la loi.

Ce texte, qui vise à sécuriser les capacités de fouille des douaniers, à alourdir les peines réprimant le trafic de tabac et à prendre des dispositions pour lutter contre les go fast, va dans le bon sens. Cependant, il ne change pas la philosophie du problème.

Dans un rapport de 2015, la Cour des comptes pointe très précisément les enjeux : « Il existe une contradiction latente entre la volonté () d'assurer la plus grande fluidité du marché intérieur () et la nécessité de garantir le respect des normes et règles dont les douanes veillent à l'application. () La tendance de la Commission a jusqu'à présent été de favoriser la libre circulation plutôt que le contrôle. » La Commission européenne, encore et toujours ce boulet idéologique qui refuse de prendre en compte la réalité !

En effet, l'absence de frontières nationales a engendré laxisme, désordre et ensauvagement. Les différents élargissements de l'Union n'ont d'ailleurs pas du tout été pris en considération dans l'évolution des moyens attribués aux douanes, bien au contraire.

Les flux de marchandises et de personnes intra et extra-européens ayant explosé, le besoin en douaniers augmente fortement. Pourtant, depuis vingt ans, la France a perdu 3000 agents, passant de 20 000 à 17 000 douaniers.

À Marseille, la direction régionale des douanes m'a fait part de ce problème : même si l'on doublait les effectifs sur le port, les douaniers ne seraient toujours pas assez nombreux pour répondre à l'ampleur des trafics.

On entend souvent parler des effectifs de la police nationale, municipale et de la gendarmerie, mais jamais de ceux des douaniers. Pourtant, si nous avions plus de douaniers, nous aurions certainement besoin de moins de forces de l'ordre à l'intérieur du territoire. Plus de saisies en amont, c'est moins de trafics en aval ! Or, sur les 900 emplois promis au moment du Brexit, en 2019, il en manque toujours un tiers, soit 300.

Ce lundi 22 mai, au col de Larche, dans les Alpes-de-Haute-Provence, un passeur a forcé un barrage des douanes avec son véhicule : douze clandestins ont été découverts à l'intérieur. Les douaniers, on le voit, jouent un rôle primordial de sécurité, avec la police aux frontières.

Par ailleurs, le marché de la cocaïne explose dans notre pays. En plus des saisies historiques effectuées en 2022 sur le port du Havre, avec 10 tonnes découvertes, le port de Marseille-Fos a connu lui aussi un record, avec 1, 7 tonne de cocaïne saisie par les douanes. Celles-ci sont à l'origine de 70 % des saisies de stupéfiants en France, mais elles sont victimes de la politique du chiffre qui les oblige, faute d'effectifs, à délaisser les stups pour atteindre les autres objectifs imposés par les bureaucrates des ministères.

Monsieur le ministre, plutôt que de communiquer sur des centaines de postes créés à la DGFiP, il serait plus judicieux de rendre à la douane sa compétence d'enquête sur les fraudes à la TVA, qui représentent 25 milliards d'euros, et de lui accorder les effectifs dont elle a besoin pour remplir sereinement et efficacement l'intégralité de ses missions.

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