Intervention de François Fillon

Réunion du 21 juillet 2008 à 15h30
Projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la ve république

François Fillon, Premier ministre :

Monsieur le président de l'Assemblée nationale, monsieur le président du Sénat, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, mesdames et messieurs les parlementaires, je m'adresse à vous avec la conviction intime et déjà ancienne que nos institutions doivent être rénovées. Certes, l'organisation des pouvoirs ne dicte pas les pratiques politiques et les textes ne commandent pas les vertus humaines. Mais ils les inspirent et les guident.

Je crois à la nécessité d'un État agissant et respecté, tel qu'il est garanti par la Ve République. Mais cet objectif n'est pas, n'est plus, à mes yeux, dissociable d'un Parlement fort et influent, parce que l'équilibre des pouvoirs, qui aujourd'hui nous fait défaut, est à la source de l'efficacité politique et de la responsabilité démocratique.

Vous savez mieux que personne comment le temps a altéré l'exercice de vos droits. Vous savez comment l'élection du chef de l'État au suffrage universel, depuis 1962, puis l'instauration du quinquennat et l'inversion du calendrier électoral des législatives ont érodé les traits originels du parlementarisme rationalisé.

Évidemment, nous pouvions nous arranger de cette érosion. Rien n'obligeait le pouvoir exécutif, dans la position commode qui est la sienne, à proposer une révision dont les avancées bénéficieront d'abord au Parlement et aux citoyens. Pour tout dire, le Président de la République aurait pu se satisfaire d'une règle qui a profité à tous ses prédécesseurs. Mais voilà, nous avions pris l'engagement de rénover nos institutions et, aujourd'hui, nous tenons parole.

Pourquoi avons-nous choisi d'agir ? Parce qu'il existe un lien étroit entre la modernisation de la France et la rénovation des institutions. Parce que cette rénovation des pouvoirs aura une incidence positive sur la vie de nos concitoyens et sur leur façon de faire valoir leurs droits et d'exercer leur citoyenneté.

À cet égard, je ne souscris pas au jugement de ceux qui prétendent que la question institutionnelle relève d'un tropisme politique auquel les Français seraient étrangers. Étrangers, le sont-ils au regard de la qualité de la loi ? Le seront-ils vis-à-vis de leur possibilité de saisir le juge constitutionnel ? Le seront-ils vis-à-vis du référendum d'initiative populaire ou du défenseur des droits ?

Entre l'organisation de nos institutions et la vie de la nation, il existe un lien étroit. Pour insuffler dans notre pays une culture de la responsabilité, il faut, au sommet, responsabiliser les pouvoirs eux-mêmes ! Pour dégager des consensus autour des grands défis de notre temps, il faut pouvoir les bâtir ici ! Pour reformer et optimiser les politiques publiques, il faut renforcer les prérogatives de ceux qui sont précisément chargés de les voter et de les contrôler ! Pour revivifier la République, pour orchestrer sa pluralité et réaffirmer sa laïcité, il faut rehausser la voix de la représentation nationale !

Mesdames et messieurs les parlementaires, si vous n'incarnez pas la souveraineté nationale, qui l'incarnera à votre place ? Si vous n'équilibrez pas et n'éclairez pas le pouvoir exécutif, qui le fera ? Les sondages, la rue, les experts ?

La faiblesse du Parlement fait la force des slogans et des démagogues.

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