La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui nous permet d’affirmer un principe sur lequel nous nous rejoignons toutes et tous : celui de l’accord préalable des parents pour l’inscription sur un réseau social pour les mineurs de 15 ans.
C’est un signal salutaire, à l’heure où 46 % des 6-10 ans disposent de leur propre smartphone et où 28 % des 7-10 ans se rendent régulièrement sur un réseau social.
Il nous apparaît toutefois de façon aussi évidente que ce principe, une fois voté, se heurtera à des difficultés pratiques dans sa mise en œuvre.
Mes collègues de la délégation aux droits des femmes, qui ont travaillé pendant des mois, dans le cadre du rapport Porno : l ’ enfer du décor, sur la complexité d’interdire, conformément à l’article 227-24 du code pénal – dont la première version remonte à 1994 –, l’accès des mineurs à des contenus pornographiques, pourront témoigner du gouffre existant entre l’intention du législateur et la réalité, sur le terrain, du numérique.
Ainsi, si la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales a rendu l’Arcom compétente pour intervenir auprès des sites qui ne vérifient pas l’âge de leurs utilisateurs, il a fallu attendre plus d’un an pour la publication du décret rendant opérationnelle cette disposition.
Sur le fondement de ce décret, plusieurs sites pornographiques ont été effectivement mis en demeure par l’Arcom. Toutefois, pour cinq d’entre eux, assignés pour être bloqués, nous devons attendre le verdict qui sera rendu par la justice le 7 juillet prochain, à la suite de la saisine du tribunal judiciaire de Paris.
Ce parcours du combattant a poussé le Gouvernement à donner à l’Arcom, dans le cadre du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique, la possibilité, sans passer par une décision judiciaire, de se prononcer sur le blocage, le déréférencement et la mise à l’amende des sites ne respectant pas cette obligation.
C’est un pas dans la bonne direction, qui rejoint d’ailleurs les recommandations mises en avant dans le rapport de la délégation.
J’évoque aujourd’hui cet épisode, car il doit nous alerter sur la solidité des garde-fous à mettre en place pour faire passer la protection du bien-être et de la santé de nos enfants avant les intérêts des plateformes privées.
Cela suppose également, au-delà des belles intentions, de doter une structure comme l’Arcom des outils administratifs et des moyens humains nécessaires pour faire vivre ces politiques.