Intervention de Stanislas Guerini

Réunion du 14 juin 2023 à 15h00
Revalorisation du métier de secrétaire de mairie — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques :

Cela nécessitait d'agir dans plusieurs directions : d'abord par une meilleure reconnaissance de ce métier, ensuite à travers des perspectives de construction et d'évolution de carrière renforcées, enfin, et surtout, par des rémunérations étoffées.

Ces enjeux sont primordiaux – je crois que cela ne soulève pas de débat. Nous devons valoriser les secrétaires de mairie actuellement en poste – c'est une question de fidélisation –, mais aussi attirer de nouveaux profils pour ce métier, sachant qu'un tiers des secrétaires de mairie partira à la retraite d'ici à 2030.

Après l'adoption à l'unanimité de la proposition de loi de Mme la sénatrice Brulin, je veux également saluer le travail précieux que la délégation aux collectivités territoriales a mené ces derniers mois – sous votre égide, madame la présidente Gatel –, dans le cadre du rapport d'information sur l'attractivité du métier de secrétaire de mairie rédigé par Mme la rapporteure Di Folco, MM. les sénateurs Vial et Durain.

Je veux également saluer l'initiative du président Patriat et du groupe RDPI de présenter le texte qui nous rassemble aujourd'hui et que je crois à même de susciter une convergence de vues.

Je veux aussi saluer le travail que vous avez mené en commission, madame la rapporteure, afin d'intégrer au texte, dès la commission, des dispositions contenues dans la proposition de loi de Mme la sénatrice Brulin. Vous avez l'art de la synthèse, madame la rapporteure, et je vous en remercie.

En ce sens, le texte qui nous occupe me semble faire consensus. Vous l'aurez compris, j'y suis favorable et je vous proposerai d'y ajouter quelques dispositions complémentaires lors de nos débats. Je suis certain que nous pourrons travailler dans le même esprit transpartisan que celui qui a animé nos discussions le 6 avril.

Je vous le dis sans détour : je souhaite que ce texte puisse cheminer et être adopté le plus rapidement possible, c'est la raison pour laquelle j'ai pris la responsabilité politique d'engager, au nom du Gouvernement, la procédure accélérée.

Au fond, la proposition de loi dont nous débattons me semble extrêmement importante, tant pour les secrétaires de mairie que pour ce qu'elle traduit de ce que nous voulons faire du statut de la fonction publique : un formidable outil au bénéfice du développement des compétences des agents et de la reconnaissance de leur engagement.

La proposition de loi que vous avez déposée, monsieur le président Patriat, permet de mieux reconnaître les secrétaires de mairie. Il s'agit d'une priorité que nous partageons tous. Cela passe, comme vous l'avez souligné, madame la rapporteure, par l'inscription de cette fonction dans le code général des collectivités territoriales, et je vous remercie d'avoir introduit cette disposition en commission. Je la soutiens à tout point de vue.

Cela passe également par la reconnaissance du niveau de ces fonctions. Je l'ai dit : celles-ci correspondent, au minimum, à la catégorie B. Cela relève du domaine réglementaire, mais je prends l'engagement, dans cet hémicycle, de le traduire rapidement dans les textes correspondants.

Cela passe aussi par une nouvelle dénomination, qui a fait l'objet de nos débats. J'ai pris à ce sujet un engagement de méthode : respecter la parole des secrétaires de mairie et de toutes les parties prenantes, dont les associations d'élus, ainsi que le travail que vous avez mené sur cette question.

Il me semble qu'une forme de consensus est en train de se dégager – même si ce n'est jamais parfait – en faveur du nom « secrétaire général de mairie ». Je suis favorable, au regard de ce consensus, à l'inscription dans la loi de cette nouvelle dénomination.

Reconnaître ce métier, c'est aussi en faciliter l'accès au plus grand nombre, dès lors que les compétences sont au rendez-vous. Je me réjouis à ce titre que ce texte reprenne la disposition de la proposition de loi de Mme la sénatrice Brulin, qui permet aux communes entre 1 000 et 2 000 habitants de recruter directement des contractuels.

J'y ajoute un engagement – vous m'aviez appelé à en prendre. Avec ma collègue Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, je prends l'engagement de travailler en lien avec les universités pour favoriser l'émergence de formations initiales de secrétaire de mairie, comme le propose le rapport de la mission d'information de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, de façon à multiplier les candidats potentiels aux concours de la catégorie B ou A ou à des recrutements en tant que contractuels.

Au-delà des enjeux de reconnaissance et d'accès, la valorisation du métier de secrétaire de mairie passe également par la formation. Je viens d'en parler pour la formation initiale, mais je veux aussi évoquer la formation continue. Aujourd'hui – je le dis très directement –, le fait de se former n'a pas assez d'impact dans le parcours d'un agent public. C'est à ce problème que nous devons répondre. Or je crois que cette proposition de loi nous apporte des leviers en la matière, pour les secrétaires de mairie.

Elle le fait d'abord pour l'exercice des missions propres à ce métier. Là encore, je salue la réintégration faite en commission de la disposition de la proposition de loi Brulin qui impose une formation obligatoire à la prise de fonction.

Le texte fournit ensuite des leviers pour faciliter et encourager la promotion. C'est une nouveauté : il prévoit que les secrétaires de mairie qui exercent déjà ces fonctions, et qui auront suivi une formation qualifiante, puissent bénéficier d'une promotion hors quota pour passer en catégorie B. Je crois qu'il s'agit d'une excellente disposition.

Je veux aller plus loin : j'ai la conviction qu'il ne faut pas fermer les viviers de recrutement. C'est la raison pour laquelle je vous présenterai un amendement pour offrir, dès la promulgation de la loi, à un agent de catégorie C qui serait, par exemple, agent d'accueil dans un département et qui souhaiterait devenir secrétaire de mairie, la possibilité d'accéder à ces fonctions et, de ce fait, à la catégorie B, grâce à la formation qualifiante dont je ne veux pas qu'il soit exclu. Cela nous permettra, dans les cinq prochaines années, de constituer un vivier répondant à la nécessaire qualification en catégorie B de ce métier.

Si vous adoptez cette proposition de loi ainsi amendée, ce sera la première fois que la formation constituera, par la reconnaissance des compétences, une nouvelle voie de promotion et un accélérateur de carrière.

C'est toute la philosophie que j'entends défendre pour réformer et transformer la fonction publique dans son ensemble.

J'ai parlé de formation, je veux aussi parler de promotion. Ce texte contient en effet des dispositions importantes. J'ai pris auprès des collectivités et des employeurs territoriaux l'engagement d'assouplir les dispositifs de promotion pour mieux reconnaître les agents.

Une fois de plus, nous retrouvons de grands principes dans la proposition de loi, appliqués aux secrétaires de mairie, à travers les deux dispositions de promotion qu'il contient : la formation, dont j'ai parlé, et la mise en œuvre dans les prochaines années d'un plan de requalification et d'une validation des acquis de l'expérience (VAE) spécifiques et adaptés aux secrétaires de mairie et que nous définirons en travaillant avec l'ensemble des parties prenantes.

En revanche – et j'ai eu l'occasion d'en parler avec le sénateur Vial, notamment –, j'ai une réserve par rapport à l'une des dispositions qui ont été discutées. Prévoir un dispositif de même nature pour une promotion interne des secrétaires de mairie de catégorie B en catégorie A, également hors quota, m'apparaît moins justifié, puisque cela correspondrait moins à une logique de requalification – ces missions pouvant relever soit de la catégorie B, soit de la catégorie A.

Comme j'ai pu vous l'indiquer, j'ai aussi une réserve sur un article issu de la proposition de loi de Céline Brulin qui prévoit un pourcentage de places réservées aux secrétaires de mairie à l'intérieur des quotas eux-mêmes, car cette disposition est présentée au moment même où – je l'ai dit, et c'est mon objectif – nous visons plutôt à assouplir les quotas de promotion.

Enfin, il faut le dire clairement, la reconnaissance des secrétaires de mairie passe aussi par leur rémunération. Le calibrage de cette fonction en catégorie B est une voie pour apporter aux agents concernés une rémunération supplémentaire, un gain immédiat.

Toutefois, je souhaite que nous allions plus loin, et je soutiens à ce titre l'amendement de M. Patriat qui vise, au-delà de la facilitation des promotions, à offrir des accélérateurs de carrière au sein même de chaque grade. Je crois qu'il faut consacrer la particularité de ce métier et le niveau de responsabilité associé. Je sais que nous partageons cette philosophie.

Au-delà de l'aspect indiciaire, je sais également ce qui peut être fait en matière indemnitaire. Madame et messieurs les rapporteurs de la délégation aux collectivités locales et à la décentralisation, vous étiez favorables à la création d'une prime de responsabilité attribuée aux secrétaires de mairie. Je partage le sens de cette demande : ce métier est un métier de responsabilité. Le dispositif juridique actuel permet toutefois déjà cela, via la catégorie « indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise » (IFSE) du Rifseep. Si cette dernière est trop peu utilisée par les maires, je propose que nous travaillions ensemble, avec les employeurs territoriaux, dans le cadre, par exemple, d'une future charte d'engagement, pour prévoir les critères et les montants pouvant être utilisés afin de faire de cette IFSE une véritable prime de responsabilité pour les secrétaires de mairie.

Nous allons évidemment continuer à agir ensemble, chacun dans ses responsabilités : par la loi, par le règlement, mais également par la mobilisation de l'ensemble des acteurs et j'assumerai, là aussi, mon rôle de ministre de la fonction publique.

Vous m'avez demandé de prendre des engagements en matière indiciaire : c'est ce que je fais en soutenant ou en introduisant différents articles. Je travaillerai les décrets avec les employeurs territoriaux, en associant évidemment les parlementaires. Nous devrons mobiliser l'ensemble des associations d'élus, sur tous les leviers, de formation notamment.

Il faut développer plusieurs axes. J'en mentionnerai deux. Le premier est la mutualisation. Il s'agit d'une dimension très importante. Le cadre juridique existant permet d'ores et déjà de faire beaucoup – avec les centres de gestion et les intercommunalités –, mais il faut accompagner les différents acteurs pour permettre une meilleure mutualisation pour nos secrétaires de mairie. Le deuxième axe est la mise en réseau. Il s'agit d'un des apports essentiels de votre travail. Vous plaidez pour le développement des immersions et du tutorat. J'y suis pleinement favorable.

Je crois, moi aussi, à la force des rencontres, aux partages de pratiques, en proximité. Les secrétaires de mairie s'en sont d'ailleurs elles-mêmes saisies, mais cela doit être mis à l'échelle grâce à l'animation des centres de gestion et des intercommunalités. Je m'engage de mon côté à renforcer aussi les liens avec le réseau France Services.

Mesdames et messieurs les sénateurs, nous nous étions donné rendez-vous d'ici à l'été – c'était l'engagement que j'avais pris en séance. Nous y sommes. Soyons à la hauteur de nos engagements et de ce texte ambitieux qui, je le crois, servira l'attractivité et l'efficacité de nos services publics.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion