Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je prends la suite de Jean Bacci pour exprimer un vif regret : le texte que nous vous présentons aujourd’hui n’est pas allé au bout de sa logique sur son volet financier. Il faut dire que nos collègues de l’Assemblée nationale, sous la pression « comptable » de Bercy, ont fait preuve de peu de considération en la matière, en particulier sur deux mesures phares de notre proposition de loi.
Nous avions plaidé pour étendre aux employeurs publics le bénéfice de l’article 34, qui prévoyait une réduction de cotisations patronales accordée aux employeurs en contrepartie de la disponibilité de leurs salariés sapeurs-pompiers volontaires. Nous n’avons pu obtenir gain de cause sur ce point, alors que l’inclusion des collectivités locales dans ce dispositif était parfaitement justifiée. Cela est d’autant plus vrai pour les communes rurales, pour lesquelles la mise à disposition de leurs employés représente une charge financière non négligeable. Il ne suffira pas de solliciter les employeurs privés pour remédier à la crise du volontariat des sapeurs-pompiers : les collectivités locales, notamment les petites communes, fournissent également un vivier de sapeurs-pompiers volontaires, dont nous nous privons en les excluant du dispositif. Je rappelle qu’il manque à ce jour 50 000 sapeurs-pompiers volontaires sur l’ensemble du territoire métropolitain.
J’en viens maintenant à l’article 10 de la proposition de loi, qui créait un crédit d’impôt pour les dépenses de travaux réalisés en application des obligations légales de débroussaillement (OLD) et qui, face à l’opposition de l’Assemblée nationale, a dû être retiré du texte final. La création de ce crédit d’impôt aurait pourtant pu provoquer un électrochoc pour inciter les propriétaires forestiers à procéder aux travaux de débroussaillement nécessaires à la protection de leurs habitations, dans un contexte où, à ce jour, seulement 30 % des OLD sont réalisées.
Face à ce constat implacable, la création d’un tel mécanisme d’incitation à la réalisation des OLD aurait été bienvenue, a fortiori pour les propriétaires forestiers les plus modestes. Sur cet article, Olivier Rietmann, également rapporteur de la proposition de loi, avait pourtant fait preuve d’ouverture en proposant plusieurs solutions de compromis en amont de la commission mixte paritaire, solutions finalement restées lettre morte.
Il est regrettable que des considérations budgétaires de court terme aient pris le pas sur l’objectif de préservation de nos forêts, alors même – j’y insiste – que les études sur la valeur du sauvé montrent qu’un euro investi dans la prévention et la lutte contre les feux de forêt en rapporte vingt à vingt-cinq fois plus. Je n’ai toutefois aucun doute sur le fait que le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 seront l’occasion pour le Sénat de promouvoir ces mesures. Monsieur le ministre, j’espère que le Gouvernement saura alors faire preuve de davantage de compréhension, dans l’intérêt de nos forêts et de nos sapeurs-pompiers.
Mes chers collègues, le Sénat peut être fier du travail accompli. Les avancées obtenues par cette proposition de loi étaient attendues tant par les acteurs de terrain que par l’ensemble de nos compatriotes, encore marqués par l’intensité des feux de l’été 2022. Je suis convaincu que les avancées que nous avons obtenues ensemble porteront leurs fruits dès cet été.