Intervention de Franck Riester

Réunion du 29 juin 2023 à 10h30
Lutte contre le risque incendie — Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Franck Riester, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé des relations avec le Parlement :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission mixte paritaire, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Marc Fesneau et de Dominique Faure, tous deux retenus par d'autres obligations.

Permettez-moi, à l'occasion de l'examen de ce texte, de rendre un hommage sincère à l'engagement des structures et personnes mobilisées dans la prévention et la lutte contre les incendies de forêt, qui seront remobilisées cet été, voire qui le sont déjà dans certains territoires, notamment dans les Pyrénées-Orientales, dans les Alpes-Maritimes et en Corse.

Je remercie une nouvelle fois, au nom du Gouvernement, tous les acteurs – sapeurs-pompiers, personnels de la sécurité civile, sapeurs-sauveteurs, forestiers sapeurs, forestiers – qui s'engagent pour la sauvegarde de nos forêts, de l'excellent travail qu'ils accomplissent au quotidien.

Je tiens également à saluer le travail qui a été réalisé par l'ensemble des parlementaires pour aboutir à un accord en commission mixte paritaire.

Si les incendies ont toujours existé, leur intensification nécessite une action conjointe du Parlement et du Gouvernement. Je me réjouis que, sur ces sujets, un travail de coconstruction ait pu se faire dans de bonnes conditions.

En effet, le climat change. Les incendies hors norme de l'été 2022, provoqués par la conjugaison de la sécheresse et de températures particulièrement élevées, ont apporté la preuve éclatante et douloureuse des effets à attendre du changement climatique en matière de feux de forêt.

Ces incendies laissent entrevoir une intensification du risque dans les régions historiquement concernées – Sud-Est, Sud-Ouest et Corse –, mais aussi, et surtout, une extension du risque dans des régions jusqu'à présent préservées. Je pense notamment aux régions de l'ouest, de l'est et du centre de la France, territoires qui n'avaient pas connu d'incendies de cette ampleur auparavant.

Notre politique de prévention et de lutte contre ces incendies doit donc être renforcée et actualisée au regard d'un risque amplifié et étendu sur davantage de territoires. Nos concitoyens attendent des réponses rapides et concrètes à leurs inquiétudes, lorsqu'ils voient les incendies parcourir de si grandes superficies de forêts dans l'ensemble du territoire national. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé d'engager la procédure accélérée sur ce texte et de l'inscrire sur son ordre du jour à l'Assemblée nationale, afin qu'il chemine rapidement jusqu'au terme de la navette parlementaire.

Le Président de la République a annoncé, au mois d'octobre dernier, plusieurs mesures visant à renforcer notre politique nationale de défense des forêts contre l'incendie (DFCI).

Tout d'abord, la prévention demeure essentielle. Notre stratégie est d'éviter le départ de feu et d'être en mesure d'attaquer les feux naissants pour éviter leur propagation. Des moyens supplémentaires ont ainsi été accordés cette année par mon collègue Marc Fesneau à l'Office national des forêts (ONF) pour lui permettre non seulement de renforcer ses missions de surveillance et de première intervention, mais aussi d'étendre celles-ci dans les territoires nouvellement concernés par ce risque.

Des moyens supplémentaires ont également été accordés à l'association régionale de défense des forêts contre l'incendie des Landes de Gascogne, massif riche d'une organisation impliquant les propriétaires forestiers. Ce renfort de moyens se poursuivra en 2024.

Il faudra toutefois davantage agir sur l'origine des feux. Lorsque l'on sait que 90 % des départs de feux de forêt sont liés à une activité humaine, notre priorité est d'intervenir sur les interfaces entre forêts et habitations.

Soyons clairs, les obligations légales de débroussaillement fixées dans le code forestier doivent être mieux mises en œuvre, alors que l'on estime qu'elles le sont seulement à hauteur de 30 % à ce jour. Pourtant, leur efficacité n'est plus à démontrer.

Nos moyens de lutte doivent impérativement être renforcés pour limiter la propagation des feux, protéger nos concitoyens et sécuriser nos infrastructures.

Lors des débats dans cet hémicycle, le sujet de la prévention a été longuement débattu et de nombreuses avancées ont été votées en ce sens. Toutefois, malgré tout ce que l'on peut faire, le feu arrivera. La lutte doit donc également être mieux organisée. Le Président de la République a ainsi décidé de renforcer les moyens terrestres et aériens dédiés, dès cette année.

Je tiens d'ailleurs à saluer la reconnaissance dans ce texte du caractère dangereux du métier et des missions exercés par les personnels navigants de la sécurité civile, comme la loi le fait déjà pour les sapeurs-pompiers professionnels depuis 2004. Cette reconnaissance symbolique était nécessaire, alors que leurs tâches ne cessent de gagner de l'ampleur.

Enfin, nous sommes loin de tout savoir sur l'évolution de ce risque. Nous avons ainsi missionné nos inspections générales pour actualiser la cartographie du risque incendie et nous permettre de définir nos organisations cibles pour y faire face dans les années à venir. Les conclusions de cette mission seront connues cet été et nous permettront de nous préparer pour l'année prochaine et les années suivantes.

Cette proposition de loi est donc plus que bienvenue.

Le texte propose d'abord l'inscription dans la loi d'une stratégie nationale et interministérielle de défense des forêts contre l'incendie, qui permettra de mobiliser pleinement et largement l'ensemble des acteurs concernés, publics et privés. La task force interministérielle, déjà mise en place par le Gouvernement, sera missionnée pour l'élaborer et organiser les concertations nécessaires.

Le texte propose également de faire évoluer la liste des territoires réputés particulièrement exposés aux risques d'incendie, ce qui permettra d'être plus réactif face aux évolutions du changement climatique. Cette liste doit aussi nous permettre d'assurer un déploiement efficace de nos moyens de prévention et de lutte vers les territoires reconnus comme les plus exposés.

En outre, le texte suggère d'améliorer l'articulation des mesures de défense des forêts contre l'incendie avec les autres politiques publiques, notamment celles des sites classés et de protection de l'environnement, ce qui renforcera la cohérence et la lisibilité de nos actions pour nos concitoyens.

En matière de politique de l'urbanisme, je salue les propositions pour améliorer l'information du grand public, des élus locaux et des futurs acheteurs sur la sensibilité au danger prévisible des feux de forêt et de végétation. Je pense aussi au monde agricole, qui a des solutions à apporter, que nous devons reconnaître et accompagner, notamment les coupures agricoles lorsqu'elles sont judicieusement positionnées.

Par ailleurs, comme je le disais précédemment, les obligations légales de débroussaillement sont essentielles et le texte prévoit des clarifications et simplifications utiles et attendues pour améliorer significativement leur mise en œuvre.

Je salue aussi la reprise dans ce texte de deux évolutions issues des assises de la forêt et du bois, à savoir l'abaissement à vingt hectares de l'obligation de disposer d'un plan simple de gestion, et la systématisation de la télédéclaration. La mise en place d'un document de gestion durable est en effet la première étape permettant à un propriétaire de connaître et de maîtriser les risques pour sa forêt.

Par ailleurs, l'inscription dans la loi d'une journée nationale de la résilience permettra de mieux nous acculturer collectivement aux risques naturels, notamment ceux qui sont liés aux effets du changement climatique.

Le texte comprend enfin des dispositions importantes pour les sapeurs-pompiers volontaires et les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis).

Il prévoit notamment, à titre expérimental, une exonération d'une partie des charges patronales pour les entreprises qui libéreront des sapeurs-pompiers volontaires pour aller en opération. C'est une avancée importante pour favoriser la disponibilité et la mobilisation des sapeurs-pompiers volontaires.

En conclusion, vous l'aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi est un signal fort envoyé aux propriétaires forestiers, aux riverains des forêts, aux associations de protection de l'environnement, aux élus locaux et à tous ceux qui s'engagent au quotidien dans la prévention et la lutte contre les incendies de forêt.

Il leur montre que nous sommes capables d'avancer ensemble pour mieux nous adapter au changement climatique.

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