Intervention de Sabine Van Heghe

Réunion du 30 mai 2023 à 14h30
Bourses d'études et parent en situation de handicap — Vote sur l'ensemble

Photo de Sabine Van HegheSabine Van Heghe :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je salue notre collègue Jean-François Rapin et le groupe Les Républicains, qui ont permis, grâce au dépôt de cette proposition de loi, de mettre en lumière la situation très difficile des étudiants dont l’un des parents est handicapé. Les conséquences pour ces jeunes sont multiples et, actuellement encore, difficilement mesurées.

Sur l’initiative de notre rapporteure, dont je salue à mon tour la qualité du travail, l’objet de la proposition de loi a évolué et, de façon cohérente, son intitulé. Ce texte vise désormais « à tenir compte, dans l’attribution des bourses de l’enseignement supérieur, de la situation de l’étudiant, aidant d’un parent en situation de handicap ».

L’article unique initial de cette proposition de loi dérogeait au principe légal d’octroi de bourses sur critères sociaux en fonction du niveau de revenus des étudiants ou de leurs parents lorsque le taux de handicap de l’un des deux parents était d’au moins 80 %. Il était alors prévu d’attribuer à l’étudiant une bourse à l’échelon 7, soit 6 500 euros sur dix mois.

Lors des auditions menées préalablement à l’examen de ce texte, un certain nombre d’interrogations dépassant l’objet de cette proposition de loi sont apparues.

Ainsi, certaines organisations étudiantes ont insisté sur la nécessité de créer une allocation universelle d’autonomie pour apporter une véritable solution à notre jeunesse en situation de précarité et ont souhaité que l’attribution de bourses en fonction de critères sociaux ne soit pas remise en cause.

Nos interlocuteurs du Conseil national consultatif des personnes handicapées ont, quant à eux, insisté sur le manque de visibilité sur les effets de cette proposition de loi. Une évaluation est-elle prévue ? Ils ont aussi évoqué le risque que son adoption soit simplement l’occasion pour le Gouvernement de maîtriser les dépenses liées au handicap.

Beaucoup de questions ont aussi été posées sur le taux d’incapacité retenu, d’au moins 80 %, alors que, nous le savons, la vie de la personne concernée et de sa famille est perturbée dès que ce taux atteint 50 %.

La semaine dernière, la rapporteure du texte, notre collègue Toine Bourrat, a fait adopter en commission une nouvelle rédaction de l’article unique, dans laquelle est supprimée la référence à un taux de handicap d’au moins 80 % donnant droit à l’ouverture d’une aide pour un étudiant, la fixation de ce taux relevant du pouvoir réglementaire. Madame la ministre, notre groupe sera très attentif au décret d’application que prendra le Gouvernement.

Je m’interroge sur la suppression prévue, dans l’article tel qu’il résulte des travaux de la commission, de l’automaticité de l’aide sous condition du taux de handicap de l’un des deux parents : elle restreint le champ de cette proposition de loi et risque de provoquer des déceptions.

De même, la référence au dernier échelon des bourses, l’échelon 7, a été supprimée. Or cet échelon garantissait à l’étudiant concerné une aide d’un montant élevé. Certes, les taux seront prochainement supprimés, mais, pour l’heure, ils ont toujours cours. Nous serons donc, sur ce sujet également, très attentifs au décret d’application.

Enfin, l’introduction d’un critère supplémentaire – l’étudiant doit être un « aidant », cette notion n’étant pas définie – a suscité l’inquiétude de notre groupe. Néanmoins, Mme la ministre et notre rapporteure nous ont assuré en commission que la qualité d’aidant serait reconnue à tout étudiant dont l’un des parents est porteur d’un handicap et que la production d’un justificatif de ce handicap – vous l’avez rappelé, madame la ministre – suffirait à établir ce rôle d’aidant. C’est une très bonne chose, mais il aurait été préférable d’inscrire cette précision dans le texte.

En outre, les présidents d’université s’interrogent encore sur la façon dont ils pourront repérer ces étudiants aidants.

Madame la ministre, je vous demande donc de faire preuve de la plus grande vigilance afin que cette réforme ne reste pas lettre morte, faute de pouvoir être mise en œuvre, pour des raisons de gestion du dispositif.

Comme l’a souligné notre rapporteure, il revient au Gouvernement de résoudre l’ensemble des difficultés auxquelles sont confrontés les étudiants dont les parents sont handicapés pour mener à bien leurs études, au-delà des enjeux financiers.

La balle est donc dans le camp du Gouvernement, à qui il appartient de compléter le texte par son volet réglementaire, afin qu’il puisse être appliqué rapidement et qu’il ne soit pas qu’un coup d’épée dans l’eau.

Même si cette proposition de loi représente une avancée encore insuffisante ou incertaine pour les étudiants concernés, elle mérite d’être soutenue. Aussi, les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain la voteront.

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