Intervention de Michelle Gréaume

Réunion du 31 mai 2023 à 15h00
Accès aux services publics — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Michelle GréaumeMichelle Gréaume :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, qui pourrait s’opposer au renforcement de l’accès aux services publics ? Pourtant, à consulter les différents votes survenus dans notre hémicycle comme à l’Assemblée nationale lors de l’examen des derniers projets de loi de finances, la réponse ne va pas nécessairement de soi. D’où quelques interrogations sur les raisons réelles qui ont conduit au dépôt de cette proposition de résolution !

Cependant, l’enjeu est réel, notamment en matière de cohésion sociale, d’accès aux droits et d’égalité entre nos concitoyens et entre les différents territoires. Cette proposition de résolution le rappelle d’ailleurs bien.

C’est la particularité de notre République, depuis la naissance de notre Constitution, d’avoir développé des services publics forts, utiles à l’intérêt général et auxquels l’accès est garanti à chaque citoyen, en tout point du territoire national.

Mais aujourd’hui, les temps sont durs. Les enseignants désertent un champ de ruines, les hôpitaux ferment des lits à tour de bras, les collectivités sont bien en peine à mettre en œuvre des politiques publiques pourtant nécessaires. Finalement, tous les services publics semblent concernés.

Les gouvernements successifs ont veillé à saper un modèle que beaucoup nous enviaient, pour céder au privé l’école, l’hôpital, les transports, jusqu’à notre énergie, notre eau et peut-être bientôt notre air, qui sait ?

Oui, il y a nécessité à renforcer les services publics et à améliorer leur accessibilité. On peut le faire par des recrutements en nombre, en renforçant l’attractivité des métiers de la fonction publique, par une meilleure rémunération et par la formation : 500 000 emplois sont nécessaires pour tenir nos objectifs sociaux, sanitaires, éducatifs, écologiques et économiques. Il y a tant à faire !

Alors, cette résolution aborde le problème, certes, mais elle n’apporte pas de solution véritable, d’une part parce qu’elle ne présume pas des efforts qui seront inscrits dans le budget pour 2024 – cela ne relève bien entendu pas d’une résolution –, d’autre part parce qu’elle s’intéresse principalement à la question du numérique, à son déploiement et à son utilisation.

Il me semble d’ailleurs que, en matière de déploiement, de réseaux la proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize, adoptée par notre assemblée, favorise déjà l’accès au très haut débit. Alors, pourquoi déposer une telle proposition de résolution ?

Il faut évidemment qu’internet soit accessible à toutes celles et à tous ceux qui le souhaitent, tant techniquement qu’en matière de compétences. Il le faut, parce qu’internet peut faciliter les communications ; c’est d’ailleurs son rôle premier. Il ne doit pas, en revanche, servir de prétexte à la dégradation de nos services publics : il est inadmissible qu’un enseignant soit face à des milliers d’élèves isolés derrière un ordinateur, qu’un médecin ausculte sans pouvoir intervenir, qu’un formulaire doive être rempli sans accompagnement, ou que les collectivités se sentent laissées à l’abandon.

Déjà 84 % des démarches administratives prioritaires seraient accessibles en ligne. Cela est pratique pour certains et beaucoup moins pour d’autres ; le vrai problème est que ces mêmes démarches sont de plus en plus difficiles d’accès physiquement. L’illectronisme et la précarité numérique concernent un quart de nos concitoyens. Pensons à eux aussi, je dirais même : pensons à eux d’abord, puisque ce sont souvent les plus précaires qui sont le plus confrontés au numérique pour leurs démarches, ce qui les décourage parfois. Notre devoir est aussi de lutter contre le non-recours aux droits.

En raison de toutes ces insuffisances, malgré des intentions positives, nous nous abstiendrons sur cette proposition de résolution, qui n’apporte rien de plus que la proposition de loi de Patrick Chaize.

Si nous voulons de véritables services publics, ce n’est pas avec un clic droit que cela se fera, mais dans les lignes budgétaires du projet de loi de finances !

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