Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite vous rappeler le contexte de l'adoption de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, avant d'évoquer notre Constitution.
Seize années après l'adoption de la dernière loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, deux propositions de loi organique avaient été déposées en mars 2021, au Sénat, par notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe, alors rapporteur général, dont je salue le travail, et, en mai 2021, à l'Assemblée nationale, par M. Thomas Mesnier, député, rapporteur général, visant toutes deux à rénover le cadre organique des lois de financement de la sécurité sociale.
L'adoption de cette réforme s'était faite sans difficulté politique, avec le soutien du Gouvernement, et ne laissait présager aucune difficulté de mise en œuvre. À l'époque, M. Olivier Dussopt, ministre des comptes publics, s'exprimait ainsi devant l'Assemblée nationale : « Les deux propositions de loi organique et les deux propositions de loi qui les accompagnent constituent des avancées décisives pour le pilotage de nos finances publiques et pour les pouvoirs du Parlement. […] La proposition symétrique de Thomas Mesnier, consistant à prévoir la création d'un projet d'approbation des comptes de la sécurité sociale déposé au printemps, est tout à fait opportune, et le Gouvernement soutiendra cette disposition. ».
L'article 24 de notre Constitution dispose : « Le Parlement vote la loi ». Nous le faisons, après des débats riches de nos différences et de notre diversité. L'article 21 de notre Constitution débute ainsi : « Le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement. Il est responsable de la Défense nationale. Il assure l'exécution des lois. » La loi organique adoptée et promulguée s'impose donc dans son intégralité dès son entrée en vigueur, et le Gouvernement doit en assurer l'exécution par le biais de ses services.
En l'espèce, et contre toute attente, le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale que nous examinons aujourd'hui concerne une loi de financement qui n'a pas été intégralement exécutée. Les rapports d'évaluation des politiques de sécurité sociale n'indiquent pas les résultats atteints lors des trois dernières années, comme la loi organique le prévoit. De même, comme cela a été dit, l'annexe relative aux niches sociales ne comporte pas d'évaluation des mesures concernées.
Quelles sont les raisons de ces lacunes ? Soit le Gouvernement n'arrive pas à obtenir de ses services un projet respectant les exigences de la loi organique, alors que lesdits services sont reconnus pour leur grande qualité d'expertise et leur réactivité ; soit l'exécutif considère que l'information des parlementaires n'est pas une priorité. Il serait regrettable qu'il ne veuille pas informer correctement les Français de l'usage qui a été fait de leurs cotisations sociales. Ces dernières sont, pour notre groupe, trop élevées dans notre pays. Elles devront donc, à terme, être réduites pour améliorer la compétitivité de nos entreprises, n'en déplaise à certains dans cet hémicycle…
Je n'aborderai pas dans le détail le fond des dispositions, qui ont été particulièrement bien décrites par notre excellente rapporteure générale Élisabeth Doineau, dont je salue les analyses de qualité. Je relèverai seulement deux points qui, au-delà de la forme, justifient également le dépôt d'une question préalable.
Alors que nous venons de demander aux Français un effort important concernant l'assurance vieillesse, il est temps de nous attaquer au déficit de l'assurance maladie.
Notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe visait déjà en 2017 les actes inutiles et redondants. Citant un rapport de l'OCDE, il expliquait que « 28 % des actes prescrits sont jugés, par les médecins eux-mêmes, non pleinement justifiés. » Vous en savez quelque chose, monsieur le ministre, docteur ! Rapportés aux dépenses d'assurance maladie, ces actes représentent quelque 50 milliards d'euros.
Dans cette droite ligne, et en dépit des actes de correction mis en place depuis, la Cour des comptes émet une demande appuyée concernant l'amélioration de la maîtrise médicalisée. En effet, elle nous dit que, malgré trente années de mise en œuvre, la France reste éloignée des pays les moins dispendieux, avec une différence de l'ordre de 11 milliards d'euros à 19 milliards d'euros par an, ce qui grève d'autant l'assurance maladie et représente environ 150 milliards d'euros de dépenses cumulées sur dix ans !
Nous regrettons aussi le fait que le cahier des charges prévu en application de l'article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 n'était toujours pas publié ce matin, alors qu'il aurait dû l'être avant le 30 juin de cette année.
Au demeurant, monsieur le ministre, la grève des praticiens hospitaliers qui affecte l'ensemble du territoire national aujourd'hui et demain matin montre bien les attentes extrêmement fortes qui demeurent, malgré l'action mise en œuvre.
Les membres du groupe Union Centriste voudraient vous rendre attentifs à la difficulté budgétaire à laquelle sont confrontés les établissements et services sociaux, médico-sociaux et hospitaliers. Dans les Ehpad, des déficits importants s'annoncent. Dans les établissements hospitaliers, il en va souvent de même, malgré quelques crédits non reconductibles parfois alloués par les agences régionales de santé. Cela montre bien que, malgré les efforts effectués, malgré une situation difficile, il reste encore, pour ce qui concerne la mise en œuvre dans notre pays des politiques médico-sociales et médicales, des attentes extrêmement fortes sur le terrain. Il convient que le Gouvernement s'attache, avec le Parlement, à apporter à l'ensemble de ces services les moyens de fonctionner dans de bonnes conditions.
Le groupe Union Centriste votera, dans sa grande majorité, la motion déposée par la rapporteure générale. §