Intervention de Olivier Henno

Réunion du 10 juillet 2023 à 16h00
Plein emploi — Discussion générale

Photo de Olivier HennoOlivier Henno :

Certes, c’est non pas le dernier jour, mais le dernier texte !

Elle a été une grande présidente de commission et ce fut un plaisir de travailler avec elle.

Je remercie Pascale Gruny de son investissement, alors que d’autres membres de la commission étaient moins disponibles compte tenu des échéances, et de son remarquable travail.

Mes chers collègues, ce texte intervient dans un contexte où notre pays a besoin d’apaisement, de calme et de confiance.

Pour ce qui concerne la confiance, le groupe Union Centriste du Sénat et, me semble-t-il, la majorité sénatoriale ne seront jamais du côté de celles et de ceux qui défendent la verticalité et qui pensent au fond d’eux-mêmes qu’une gestion du service public par la haute administration est toujours plus performante que celle qui est exercée au plus près du terrain par les élus locaux et territoriaux ou qu’une gestion paritaire.

La défense des corps intermédiaires, l’attachement au paritarisme ainsi qu’au dialogue social et la gestion au plus près du terrain par les élus restent notre cap en toutes circonstances.

À ce propos, nous voulons également saluer le remarquable travail des missions locales et du réseau des maisons de l’emploi.

Messieurs les ministres, nous vous avons écoutés et, si vous nous avez rassurés, nous resterons très vigilants sur ces questions.

Revenons au projet de loi.

Il vise à rénover la gouvernance du service public de l’emploi et de l’insertion, partant du constat que le suivi et l’accompagnement des personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles sont insuffisamment coordonnés.

Le défi du plein emploi est aujourd’hui moins une question d’offres d’emploi ou de dynamiques économiques qu’un défi d’adaptation au monde du travail et d’incitation au travail, ce qui est, à nos yeux, une bonne nouvelle.

Disons-le aussi : l’incitation au travail doit également permettre que le travail paie mieux ; c’est une nécessité.

Il est vrai que les personnes sans emploi sont inégalement accompagnées dans leur insertion professionnelle.

Pour ce qui concerne les allocataires du RSA, 60 % des bénéficiaires ne disposent pas de contrat d’accompagnement et seulement 41 % d’entre eux sont inscrits à Pôle emploi.

Chiffres terribles, insatisfaisants, inacceptables !

Toutefois, qu’on ne nous fasse pas le coup de montrer les départements du doigt : ils agissent avec efficacité, en fonction des moyens dont ils disposent.

Reste qu’une occasion est à saisir, au moment où le marché de l’emploi est tendu, où les opportunités sont nombreuses, y compris pour les personnes éloignées depuis très longtemps du marché du travail.

Immense défi pour notre pays doté de trois voies de formation : la formation initiale, la formation continue, mais aussi la validation des acquis de l’expérience (VAE).

Il s’agit donc de mieux articuler les parcours d’insertion et de mettre davantage en adéquation les actions avec les besoins du marché de l’emploi.

Le projet de loi vise également à lever l’un des principaux freins à l’emploi – la garde d’enfant –, en tentant d’améliorer la gouvernance de la politique d’accueil du jeune enfant.

Pour cela, il conviendrait qu’une offre fournie en modes de gardes formels soit accessible aux parents, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas.

La capacité théorique des modes d’accueil formels a même décru de 2014 à 2020 et la pénurie de professionnels réduit encore l’offre disponible, ce qui inquiète nombre de maires et pose des problèmes à de nombreuses familles.

Toutefois, revenons au réseau France Travail, mes chers collègues.

L’article 4 prévoit sa création. Ce réseau aurait pour mission d’accueillir, d’orienter, d’accompagner, de former et d’insérer les personnes à la recherche d’un emploi ou rencontrant des difficultés sociales et professionnelles.

Le groupe UC tient à saluer l’amendement de Pascale Gruny visant à éviter que Pôle emploi ne devienne l’opérateur France Travail.

La perspective de ce changement d’identité est une source d’inquiétude pour les acteurs de l’emploi, pour les personnes inscrites à Pôle emploi et pour les acteurs du service public.

Même si Pôle emploi joue un rôle clé au sein du service public de l’emploi, il ne nous semble pas souhaitable qu’il se nomme France Travail. Cela créerait inévitablement de la confusion, voire peut-être une forme de hiérarchisation, dont nous ne voulons pas.

En outre, il nous paraît nécessaire d’ajouter à ces missions celle de répondre aux besoins des employeurs en matière de recrutement, de mise en relation entre les offres et les demandes d’emploi et d’information sur la situation du marché du travail.

Afin de donner de la visibilité aux acteurs, je vous proposerai que le comité national France Travail puisse identifier les besoins de financement dans un cadre pluriannuel.

La coordination des acteurs et l’harmonisation des pratiques ne sauraient se transformer en un cadre contraignant et uniforme que l’État imposerait aux collectivités et aux acteurs locaux.

Chaque acteur doit pouvoir préserver ses prérogatives et développer des solutions adaptées aux besoins des territoires et des bassins d’emploi. Les moyens financiers pour leur mise en œuvre devront suivre. Or le texte est muet sur ce point.

Nous saluons un autre amendement visant à la définition par les collectivités territoriales, l’État et les partenaires sociaux, dans le cadre du comité national France Travail, avant leur approbation par le ministre, des critères d’orientation du demandeur d’emploi vers l’organisme référent chargé d’assurer son accompagnement, plutôt que leur détermination par arrêté ministériel pris après un simple avis du comité national France Travail.

Nous saluons également la décision de la commission des affaires sociales de supprimer la charte d’engagements.

Les collectivités territoriales disposent de compétences propres en matière d’emploi et d’insertion au titre desquelles elles ont vocation, dans tous les cas, à prendre part aux instances de gouvernance, sans avoir à signer une charte d’engagements.

Rappelons l’objectif principal de ce texte : poser le cadre commun d’un accompagnement plus intensif des demandeurs d’emploi, avec l’objectif affiché que les personnes éloignées de l’emploi, notamment les bénéficiaires du RSA, s’engagent sur une durée hebdomadaire de quinze à vingt heures d’activités accompagnées, sur le modèle du contrat d’engagement jeune.

Hélas ! l’article 2 ne traduit pas l’objectif, pourtant essentiel, de garantir un accompagnement plus intensif et de mobiliser les personnes éloignées de l’emploi pendant une durée hebdomadaire prédéfinie.

En matière de sanction des bénéficiaires du RSA, nous considérons que le président du conseil départemental est seul compétent pour prendre la décision. Je salue l’amendement de Pascal Gruny qui tend à l’affirmer clairement.

En effet, mes chers collègues, nos départements ont une certaine expérience en matière de RSA !

Pour ce qui concerne l’article 10 et la politique d’accueil du jeune enfant, nous considérons qu’il est contradictoire de vouloir confier aux communes davantage de prérogatives et d’encadrer l’action des collectivités territoriales par une stratégie prise par arrêté ministériel. Par ailleurs, des objectifs de développement de l’offre d’accueil sont déjà fixés dans la convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la Cnaf.

Nous nous rallions, une fois de plus, à Mme la rapporteure s’agissant de la demande de suppression de la procédure selon laquelle le préfet pourra, en cas de manquement d’une commune, demander à la CAF d’élaborer à sa place son schéma communal et de mettre en place un projet de création de relais petite enfance.

Il n’est pas souhaitable de confier aux communes de nouvelles compétences en les assortissant d’une forme de contrôle renforcé.

Nous pouvons faire confiance aux communes pour répondre aux fortes attentes des familles, dès lors qu’elles disposent de la capacité de le faire et surtout de moyens financiers indispensables.

Sous ces réserves, le groupe Union Centriste votera favorablement ce projet de loi amendé, car il répond à des constats et à des préoccupations auxquelles nous souscrivons, même si des inconnues demeurent quant aux moyens mis en œuvre et à la confiance que vous accordez aux collectivités territoriales.

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