Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui porte une ambition majeure : il tend à réorganiser le service public de l’emploi à tous les échelons territoriaux et à améliorer l’accueil et l’accompagnement des personnes en recherche d’un travail.
L’enjeu est de taille, car nous sommes encore loin du plein emploi : notre pays compte près de 3 millions de chômeurs ; près de 13 % de notre jeunesse est sans emploi et ne suit aucune formation ni aucun parcours d’études.
Ce sont autant d’occasions manquées d’insertion professionnelle et sociale, d’accomplissement personnel, et d’accroissement des revenus.
Je souhaiterais insister dans mon propos sur l’enjeu que représente l’amélioration du service public de l’emploi pour nos entreprises. Je me fais ici l’écho du récent rapport d’information que j’ai présenté avec mes collègues Michel Canévet et Florence Blatrix Contat, intitulé Former pour aujourd ’ hui et pour demain : les compétences, enjeu de croissance et de société, qui a été adopté à l’unanimité par la délégation aux entreprises.
En 2022, pour les entreprises, les tensions de recrutement et la pénurie de main-d’œuvre ont atteint de nouveaux sommets : désormais plus de deux entreprises sur trois y sont confrontées ; le taux de vacance des emplois est cinq fois supérieur à son taux de croisière. Par comparaison avec les pays européens qui nous entourent, nos entreprises ont plus de difficultés à pourvoir leurs emplois, en dépit d’un taux de chômage plus élevé. En cela, le service public de l’emploi a un rôle très important à jouer pour faire se rencontrer l’offre et la demande d’emploi.
Je rappelle que la loi confie explicitement à Pôle emploi la mission d’accompagner les entreprises dans leurs recrutements. Pourtant, la majorité d’entre elles, à quelques rares exceptions géographiques près, estiment toujours que son appui est insuffisant, surtout aux petites entreprises.
Je suis heureuse que la commission des affaires sociales ait adopté un amendement visant à réaffirmer et à renforcer la mission d’accompagnement de Pôle emploi vis-à-vis des entreprises, afin de mieux répondre à leurs besoins.
J’en profite pour féliciter notre collègue rapporteure, Pascale Gruny, pour son remarquable travail, ainsi que Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Le président de la délégation aux entreprises et moi-même proposerons d’aller plus loin dans cet accompagnement par un amendement visant à instaurer, dans chaque territoire, un guichet PME au sein du réseau France Travail. Il servira d’interlocuteur unique pour le dialogue et le suivi des PME. C’est cette logique qui fait le succès, par exemple, de la Team France Export auprès des PME. Il nous semble utile de l’appliquer à France Travail.
L’un des défis auxquels devra répondre la réforme est celui des métiers en tension, parmi lesquels figurent nombre de métiers essentiels à la vie de la Nation. Près de 120 métiers sont aujourd’hui en tension, contre environ 50 en 2015. Si le Gouvernement a déjà fait un pas en ce sens, au travers de la constitution de viviers de candidats pour certains métiers, il faut tout de même passer à l’échelle supérieure et couvrir davantage de besoins.
Aussi, nous vous proposons d’inclure systématiquement, dans l’accompagnement des demandeurs d’emploi, une sensibilisation aux métiers en tension selon les territoires, pour mieux informer et déconstruire les préjugés.
Par ailleurs, nous soutenons la proposition de Mme la rapporteure visant à assurer une participation de l’ensemble des acteurs locaux de l’insertion et de l’emploi au réseau France Travail. Ce sont des maillons essentiels de l’accompagnement du dernier kilomètre. Ils sont extrêmement agiles pour combler les « trous dans la raquette » de l’approche trop quantitative de Pôle emploi.
La commission a aussi introduit une plus grande coopération entre le service public de l’emploi et le service public de l’éducation. En effet, le dialogue entre l’école et l’entreprise, mais aussi entre le système éducatif et le service public de l’emploi, nous paraît fondamental pour que l’orientation de nos jeunes soit choisie et informée. À cette fin, nous présenterons un amendement visant à renforcer le suivi par Pôle emploi des jeunes diplômés de lycée professionnel, à partir de l’année de leur diplôme et pour les deux années suivantes. En effet, moins de la moitié des diplômés de CAP sont insérés dans l’emploi deux ans après leur diplôme ! Aussi, il faut inverser la tendance et mieux prévenir le décrochage.
Enfin, alors que ce texte a pour objet d’acter le lancement d’un second plan d’investissement dans les compétences, prenons garde de ponctionner les ressources dédiées à la formation professionnelle et à la formation des salariés, au profit de la formation des demandeurs d’emploi. Entre 2019 et 2022, plus de 6, 4 milliards d’euros ont ainsi été prélevés sur les ressources de France compétences au profit du PIC, alors qu’elles sont normalement dédiées au financement de l’apprentissage, à l’action des opérateurs de compétences (Opco), ou encore à des plans de développement des compétences élaborés par les entreprises.
Nous défendrons donc un amendement visant à plafonner le prélèvement annuel effectué sur les ressources de France compétences au profit du PIC.