Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 10 juillet 2023 à 16h00
Plein emploi — Discussion générale

Olivier Dussopt :

Je souhaiterais remercier les différents orateurs de cette discussion générale.

Même si l’examen des amendements va nous permettre de revenir sur chacun des éléments de ce texte, je voudrais au préalable apporter des précisions sur trois points.

Le premier point concerne la question des activités. Dans la version du projet de loi que nous avons transmise au Parlement, nous avons indiqué que l’intensité du contrat d’engagement réciproque, inscrit à l’article 2, devait être définie par l’organisme référent et les allocataires, en tenant compte de l’âge, du niveau de qualification, de la situation économique et sociale du bassin d’emploi, ainsi que des freins à l’emploi, aussi bien en matière de mobilité, de garde d’enfants que de santé. Ainsi, nous avons bien prévu que l’intensité soit définie dans le cadre du contrat.

Notre objectif est évidemment d’atteindre le plus souvent possible ces 15 à 20 heures d’activité. J’ai noté que la commission des affaires sociales avait souhaité être plus précise et plus offensive sur ce point, en adoptant un amendement indiquant la durée hebdomadaire d’activité qu’il sera demandé au demandeur d’emploi d’accomplir devra être d’au moins 15 heures. Je l’entends, et nous aurons le débat.

Selon moi, nous devons penser au fait qu’un certain nombre d’allocataires sont extrêmement éloignés de l’emploi et parfois extrêmement abîmés par des incidents de vie. Aussi, dans un premier temps, le niveau d’activité à atteindre peut être intermédiaire et plus progressif. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons prévu à l’article 6 la possibilité pour ceux qui sont les plus éloignés de l’emploi de faire uniquement l’objet d’un suivi social. Ainsi, tous les six à douze mois, un bilan serait fait pour voir comment ils pourraient être accompagnés au moyen d’un suivi professionnel, dans l’objectif de leur insertion professionnelle.

Le deuxième point que je voulais clarifier concerne les missions locales. Comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, leur statut ne change pas et leur autonomie n’est pas remise en cause. Ce sont des opérateurs spécialisés et des acteurs centraux de l’accueil des jeunes.

Nous avons eu des discussions avec l’Union nationale des missions locales (UNML), qui s’est inquiétée de la formule, présente dans une version de l’avant-projet, qui disposait que l’exercice de leurs compétences d’accueil de tous les jeunes serait assuré par délégation de France Travail. La formule « par délégation » a été supprimée du projet qui vous a été transmis, ce qui indique combien les missions locales sont respectées dans leur statut.

Du reste, je précise deux points. Premièrement, le conventionnement pour le financement des missions locales reste passé avec l’État, tout comme celui pour le financement des structures d’insertion par l’activité économique. L’opérateur – Pôle emploi aujourd’hui, France Travail demain – n’aura pas la compétence pour passer une convention financière. Il n’y aura donc pas de lien de subordination par le financement. Deuxièmement, les missions locales seront amenées – c’est une nouveauté – à participer au comité local France Travail, et donc à définir les orientations de la politique de l’emploi à l’échelle des territoires. C’est une prérogative supplémentaire.

Le troisième point que je veux évoquer concerne la question des moyens. Évidemment, il ne s’agit pas d’un texte financier. Aussi, l’octroi des moyens devra passer par deux canaux.

Le premier canal est celui du projet de loi de finances dans la mesure où nous nous sommes engagés à aider les départements dans la mise en place d’un accompagnement renforcé. Nous sommes évidemment, dans cette période, en train de préparer le projet de loi de finances pour 2024. Nous avons adopté une logique de déploiement progressif, puisque, vous l’avez vu, le projet de loi tend à généraliser l’accompagnement renforcé pour 2025.

Je précise que généraliser ne veut pas dire atteindre 100 % d’accompagnement intensif, puisque nous savons par exemple que 32 % des allocataires du RSA sont des foyers monoparentaux. Il s’agit pour l’essentiel de femmes avec des enfants, qui sont donc confrontées à des difficultés de garde. Ce frein majeur fait apparaître comme une évidence une mise en œuvre progressive du nouveau système.

Le deuxième canal concerne effectivement la convention tripartite qui existe aujourd’hui entre l’État, Pôle emploi et l’Unédic, laquelle stipule que l’Unédic affecte 11 % de ses recettes au fonctionnement de Pôle emploi. C’est ce que j’appelle une dépense active : les recettes des cotisations financent le service public de l’emploi. Si le service public de l’emploi améliore l’accès à la formation des demandeurs d’emploi, cela favorise le retour à l’emploi des demandeurs d’emploi. Ainsi, c’est une dépense active, car elle permettra d’avoir plus d’emplois, plus de cotisations et moins de dépenses d’allocations ; c’est vertueux.

Pour répondre à la question de M. Mouiller relative au modèle économique des Ésat, je dirais que nous devons, indépendamment même de ce texte de loi, mener une réflexion sur leur modèle économique. Les tensions de recrutement connues sur le marché du travail, que Mme Berthet, notamment, a rappelées, ont amené les entreprises à se tourner vers de nouveaux employés, qui sont par définition les plus employables de ceux qui restaient sans emploi jusqu’à ce jour.

Il faut avoir une véritable réflexion en la matière, qui plus est s’agissant d’une logique de convergence des droits – ce qui aura un impact financier sur les Ésat.

Monsieur le sénateur, à votre question sur l’AAH-2 et le plafonnement du temps de travail, je vous réponds que Jean-Christophe Combe et moi-même travaillons à un décret visant à déplafonner le temps de travail ouvert aux bénéficiaires d’une AAH-2 qui souhaitent travailler plus et qui ne seraient plus cantonnés à la règle des 17 heures 30 que vous avez évoquée. Il s’agit d’un sujet strictement réglementaire. Le Président de la République s’y est engagé à l’issue de la Conférence nationale du handicap.

Je reviendrai sur les différents autres points à l’occasion de l’examen des amendements. Du reste, Mme la rapporteure le sait, sur les deux tiers, sinon les trois quarts, des amendements adoptés en commission, le Gouvernement n’émettra aucun avis défavorable. Nous considérons que beaucoup d’entre eux ont permis d’améliorer et d’enrichir le texte.

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