Intervention de Gabriel Attal

Réunion du 3 juillet 2023 à 16h00
Approbation des comptes de la sécurité sociale pour l'année 2022 — Rejet définitif en procédure accélérée d'un projet de loi

Gabriel Attal :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, les déficits se résorbent, mais nous sommes encore loin de l’équilibre. Telle est l’image des finances de la sécurité sociale dont j’ai l’honneur de vous rendre compte, avec François Braun, à l’occasion du débat sur ce projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2022.

Avant d’aborder mon propos, permettez-moi de dire la reconnaissance et la gratitude du Gouvernement et – je crois pouvoir le dire – de la Nation et de ses représentants envers les 120 000 agents des caisses de sécurité sociale, le plus de 1 million d’agents de la fonction publique hospitalière et les centaines de milliers des professionnels de santé, sociaux, médico-sociaux qui donnent au quotidien un sens aux mots « sécurité sociale ».

La sécurité sociale est l’une des grandes fiertés de notre pays. Elle donne corps à notre devise nationale : la liberté de pouvoir entreprendre sa vie en étant accompagné, notamment en matière de politique familiale ; l’égalité, notamment devant l’accès aux soins ; la fraternité, au travers des dispositifs de solidarité.

Je veux ici remercier celles et ceux qui dédient leur vie professionnelle à accompagner les Français aux moments les plus importants de leur vie personnelle ou familiale : la petite enfance, la parentalité, la maladie, la retraite ou la perte d’autonomie.

Nos débats, prévus par la loi organique du 14 mars 2022, permettent pour la première fois d’examiner dès le printemps les comptes de l’année passée, comme c’est le cas pour le budget de l’État.

Si je regarde le panorama des comptes de la sécurité sociale en 2022, trois branches sur cinq affichent un solde positif. En particulier, je suis fier que la branche autonomie, créée par la majorité présidentielle au travers des lois d’août 2020, affiche un excédent de 200 millions d’euros. Deux branches restent en déficit : la branche maladie et la branche retraite.

Par rapport à 2021, le solde de la sécurité sociale s’améliore de 4, 6 milliards d’euros. C’est d’abord le fruit d’une politique économique qui fonctionne. En 2022, les recettes de la sécurité sociale ont progressé de près de 30 milliards d’euros. C’est la conséquence directe d’une masse salariale qui a augmenté de 8, 9 % et des 337 000 créations nettes d’emplois l’an passé, d’après les derniers chiffres de l’Insee.

Si je regarde le bilan depuis 2017, avec 1, 7 million d’emplois nets créés, ce sont au total plus de 25 milliards d’euros de cotisations en plus par an dans les caisses de la sécurité sociale. Plus d’emplois, moins de chômage, c’est plus d’argent pour nos hôpitaux, nos crèches, nos établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Pour le dire autrement, s’il n’y avait pas eu 1, 7 million d’emplois créés depuis 2017, le déficit de la sécurité sociale serait plus lourd de 25 milliards d’euros. C’est à mon sens une réponse à ceux qui remettent en cause la politique économique menée par ce gouvernement. En faisant reculer le chômage et en améliorant l’emploi, la politique économique menée par ce gouvernement améliore aussi les caisses de la sécurité sociale.

Je le rappelle à cette tribune, comme je l’ai déjà fait lors de nos précédents débats : oui, pour nous, c’est le travail qui crée la richesse ! Dans toutes les circonscriptions de France où je me déplace, je ne croise pas un seul salarié ou un seul patron qui me demande d’augmenter les prélèvements qui pèsent sur le travail. Au contraire, je rencontre des travailleurs des classes moyennes qui nous demandent de baisser leurs impôts et de soutenir leur pouvoir d’achat. Je vois des petits patrons de TPE ou de PME qui cherchent à recruter, mais n’y parviennent pas toujours. Je rencontre des indépendants qui nous remercient d’avoir allégé leurs cotisations durant la crise, mais demandent moins de complexité et de bureaucratie dans le système social.

Les dépenses induites par la crise sanitaire se sont logiquement réduites, passant de 18, 3 milliards d’euros en 2021 à 11, 7 milliards d’euros en 2022. Elles ont notamment permis de financer la réalisation de 139 millions de tests de dépistage au cours de l’année passée. Nous avons continué, début 2022, à soutenir les entreprises fermées ou affectées par les restrictions sanitaires, avec près de 9 milliards d’euros d’exonérations et aides au paiement des cotisations sociales entre 2020 et 2022, évidemment compensés par le budget de l’État.

Le budget de l’État a continué à honorer ses dettes envers la sécurité sociale grâce aux remboursements intervenus fin 2022. Pour la troisième année consécutive, en 2022, l’État n’est plus débiteur, mais redevient créancier de la sécurité sociale, pour 100 millions d’euros, alors qu’il avait accumulé au cours de la décennie passée des dettes s’élevant parfois jusqu’au milliard d’euros. C’est aussi un progrès pour la transparence de nos comptes comme dans les relations financières entre l’État et la sécurité sociale.

En 2022, nous avons aussi mis en œuvre des mesures d’économies et de maîtrise pour dégager des marges de manœuvre sur le budget de l’assurance maladie. La poursuite de l’effort en faveur de la pertinence des soins a permis des gains de 200 millions d’euros. Les baisses de prix de médicaments dont le brevet est tombé dans le domaine public ont permis des gains de près de 1 milliard d’euros, réinvestis pour 410 millions d’euros, soit près de la moitié, dans le soutien à la production en France de médicaments plus innovants.

Parallèlement, nous avons poursuivi l’investissement indispensable dans notre système de santé, singulièrement pour notre hôpital public, engagé avec le Ségur. En 2022, le Ségur de la santé a représenté un effort budgétaire de 12, 7 milliards d’euros pour les personnels des établissements sanitaires et médico-sociaux.

En un quinquennat, l’Ondam établissements de santé est passé de 79 milliards d’euros en 2017 à 98, 4 milliards d’euros en 2022, soit une progression de près de 20 milliards d’euros. Plus 25 % en cinq ans : c’est historique !

Sur la branche famille, nous tirons toutes les conséquences du rapport de la Cour des comptes et de son refus d’en certifier les comptes. Je note que ce n’est pas l’équilibre de la branche famille qui est en cause, puisqu’elle reste excédentaire de 1, 9 milliard d’euros. Quant aux erreurs de calcul des prestations versées par les caisses d’allocations familiales (CAF) que la Cour des comptes souligne à juste titre, nous avons d’ores et déjà annoncé des mesures majeures pour y remédier. La majorité de ces erreurs portent sur le revenu de solidarité active (RSA) et la prime d’activité.

Pour fiabiliser leur calcul, la notion de « montant net social » apparaîtra dès ce mois de juillet sur les bulletins de paie. Il permettra aux Français de connaître avec précision les ressources à déclarer dans les formulaires de demandes d’allocations auprès des CAF. Cela réduira les erreurs de bonne foi et facilitera le travail de nos agents.

En parallèle, nous expérimentons dans plusieurs CAF le préremplissage des ressources sur les formulaires de demandes du RSA et de la prime d’activité. C’est la première étape du chantier de la « solidarité à la source » voulu par le Président de la République et soutenu, j’en suis sûr, par une large majorité de cet hémicycle. Concrètement, d’ici à 2025, chaque allocataire verra ses ressources préremplies dans les formulaires du RSA et de la prime d’activité. Cela réduira drastiquement les erreurs, mais aussi la fraude. Ce sera une petite révolution pour l’accès aux droits et la simplification administrative.

Nous investissons également dans la modernisation des systèmes d’information des caisses de sécurité sociale pour mettre en œuvre les recommandations de la Cour des comptes, avec un plan de 1 milliard d’euros sur le quinquennat, qui permettra par exemple aux CAF de récupérer des indus frauduleux sur une profondeur de cinq ans, contre seulement deux ans aujourd’hui.

Évaluer, simplifier, mais aussi, et bien sûr, réduire les déficits : pour le budget de la sécurité sociale comme pour l’État, résorber nos déficits et rembourser notre dette est une exigence de souveraineté pour notre génération et de justice pour les prochaines générations.

C’est l’horizon fixé par le Président de la République et la Première ministre, pour permettre à notre pays de réduire son déficit de 2 points de PIB d’ici à 2027 et d’accélérer notre désendettement. Je le dis très franchement : on ne peut pas défendre l’indépendance de la France tout en critiquant le principe de réduction des déficits. On ne peut pas davantage critiquer le poids des marchés financiers, mais rechercher leur financement à travers toujours plus de dette publique. Réduire ses dettes, c’est aussi se libérer des marchés financiers.

Payer ses dettes, c’est dire haut et fort que la France n’a qu’une parole, que, quand la France s’endette, elle rembourse. C’est dire que la France est une grande puissance économique et financière, en laquelle les investisseurs peuvent avoir confiance.

Pour la quatrième année consécutive, nous restons le pays le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers. Les investissements annoncés lors du dernier sommet Choose France représenteront 13 milliards d’euros et 8 000 créations nettes d’emplois, notamment dans les batteries, les panneaux photovoltaïques, les médicaments ou encore l’automobile. Ce sont autant de recettes supplémentaires pour la sécurité sociale dans les années à venir.

Enfin, je veux conclure sur l’exigence qui doit nous rassembler de mener une lutte inlassable et implacable contre toutes les fraudes. J’ai présenté ces dernières semaines un arsenal de mesures pour aller beaucoup plus loin et beaucoup plus fort contre la fraude fiscale, contre la fraude douanière et contre la fraude sociale.

Sur la fraude sociale, l’année 2022 témoignait déjà de nos résultats : +50 % de redressements des Urssaf par rapport à 2017 dans leur lutte contre le travail au noir avec 788 millions d’euros l’an passé ; +30 % de fraudes détectées et évitées par l’assurance maladie avec 316 millions d’euros ; +30 % également pour les CAF et les caisses de retraite avec 506 millions d’euros en 2022.

Nous évaluons mieux les fraudes ; nous les connaissons donc mieux. L’assurance maladie approfondit son travail d’évaluation des fraudes secteur par secteur. La branche famille a évalué à 2, 8 milliards d’euros les fraudes en 2021 et reproduira l’exercice cette année. La fraude aux cotisations a été évaluée à 8 milliards d’euros par le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale. La branche vieillesse a évalué pour la première fois les fraudes à environ 200 millions d’euros sur son périmètre.

J’installerai dans les prochaines semaines le Conseil de l’évaluation des fraudes, qui fournira en matière sociale comme en matière fiscale et douanière des évaluations régulières en associant administrations, experts indépendants et parlementaires.

Nous évaluons mieux, nous repérons davantage les fraudes et nous les sanctionnons plus fermement.

En 2022, plus de 30 000 fraudes aux allocations versées par les CAF ont donné lieu à une pénalité financière, en plus du recouvrement des sommes dues. Un dossier sur dix est suivi de poursuites pénales. En matière de travail illégal des entreprises, plus de 200 millions d’euros de majorations ont été mis en recouvrement, en plus du redressement des sommes non déclarées, de même que 27 millions d’euros d’exonérations de cotisations sociales ont été remboursés par des entreprises recourant au travail illégal.

Au total, sur le précédent quinquennat, 3, 5 milliards d’euros ont été redressés au titre du travail dissimulé. C’est l’équivalent de 300 millions de vaccins contre la grippe, de 140 millions de consultations chez le médecin généraliste ou de 4 millions d’allocations de rentrée scolaire. Oui, nous pouvons être fiers de ce bilan, qui nous donne aujourd’hui la force d’aller encore plus loin au cours de ce mandat !

Avec François Braun, Jean-Christophe Combe et l’ensemble de mes collègues du Gouvernement, je poursuivrai inlassablement cette lutte contre toutes les fraudes, qu’elles soient fiscales, sociales, douanières ou aux aides publiques, parce que cette lutte conditionne la confiance que nos concitoyens placent dans la parole et la puissance publique. Nous le leur devons. Je continuerai d’apporter mon soutien absolu au service de la sécurité sociale et de tous ceux qui la font vivre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion