Intervention de Émilienne Poumirol

Réunion du 29 juin 2023 à 10h30
Couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse — Vote sur l'ensemble

Photo de Émilienne PoumirolÉmilienne Poumirol :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis que le Sénat soit aujourd’hui réuni pour voter les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à favoriser l’accompagnement des couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse, qu’on appelait autrefois fausse couche.

En séance, ici même au Sénat, nous avons tous appelé à ce que les dispositions de ce texte entrent rapidement en vigueur, car elles amélioreront la reconnaissance et la visibilité des interruptions spontanées de grossesse. Je le dis en préambule, ce texte est un pas supplémentaire pour la santé des femmes, ce qui justifie notre vote favorable et notre soutien.

En effet, grâce aux travaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, le texte initial a été enrichi et le dispositif d’accompagnement étoffé.

L’article 1er A prévoit l’instauration, par les agences régionales de santé, d’un parcours spécifique qui associera les médecins, les sages-femmes et les psychologues dans la prise en charge des interruptions spontanées de grossesse. Celui-ci améliorera l’information et le suivi médical et psychologique des patientes et de leur partenaire et renforcera, c’est important, la formation des professionnels de santé.

L’article 1er B supprime le délai de carence applicable aux arrêts maladie consécutifs à une interruption spontanée de grossesse pour les assurées du régime général et assimilées, les agentes publiques et les assurées des régimes spéciaux. Je salue le travail du Sénat, qui a élargi la suppression de ce délai de carence aux travailleuses indépendantes et aux non-salariées agricoles.

L’article 1er C, ajouté par amendement au Sénat, instaure une protection de dix semaines contre le licenciement pour les femmes confrontées à une interruption spontanée de grossesse après la quatorzième semaine d’aménorrhée. Cette mesure a pour objet de lutter contre les risques de discrimination professionnelle dont les femmes sont, malheureusement, bien souvent victimes.

Enfin, l’article 1er bis, également issu des travaux du Sénat, étend le champ d’un rapport sur l’accessibilité de MonParcoursPsy, afin qu’il analyse précisément l’accès des couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse aux séances de suivi psychologique qui sont prises en charge.

Néanmoins, nous ne saurions parler de ce texte comme d’une avancée réelle et très importante.

En effet, nous ne pouvons que regretter que les sages-femmes soient privées de capacité prescriptive et ne puissent accompagner médicalement les femmes victimes d’une interruption spontanée de grossesse, alors que cette compétence leur est reconnue en cas d’interruption volontaire de grossesse. Je ne m’explique pas ce parfait illogisme, les sages-femmes formant une profession médicale spécialisée dans la santé reproductive des femmes.

De plus, nous regrettons que notre amendement visant à créer un congé spécial de trois jours pour les femmes confrontées à une interruption spontanée de grossesse n’ait pas été adopté. Il s’agirait d’un droit nouveau pour les femmes, auxquelles on laisserait le choix de ne pas dépendre de leur médecin pour bénéficier d’un temps de récupération nécessaire.

Enfin, la proposition de loi ne renforce pas le dispositif MonParcoursPsy, qui, vous le savez, monsieur le ministre, reste largement insuffisant pour garantir le suivi psychologique des 200 000 femmes qui font face à une interruption spontanée de grossesse chaque année. Alors qu’il existe depuis plus d’un an, 93 % des psychologues n’adhèrent pas à ce dispositif qui n’a bénéficié, en 2022, qu’à 76 375 patients – les chiffres dont je dispose diffèrent des vôtres, monsieur le ministre, mais ils sont insuffisants dans les deux cas.

Monsieur le ministre, si cette proposition de loi constitue une première étape vers la reconnaissance des interruptions spontanées de grossesse, et plus généralement de la santé des femmes, le chemin est encore long. Il est désormais indispensable d’accompagner les personnes confrontées à ces situations dans une approche holistique de la santé des femmes et de mettre enfin en place une politique publique globale de la santé sexuelle et reproductive en France.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion