Ce débat sur l'accession à la propriété, demandé par mon groupe, aura permis des échanges substantiels. Il a montré que les chantiers sont encore à venir et que nombre de mécanismes juridiques méritent d'être repensés. Il s'agit d'un véritable sujet à tiroirs.
Je voudrais en conclusion revenir sur quelques chantiers ou difficultés qui méritent d'être soulignés.
Premier chantier, la fiscalité locale doit être repensée, afin de parvenir à un équilibre entre, d'un côté, la nécessité d'accroître les ressources des collectivités et, de l'autre, l'impératif d'accession des Français à la propriété.
À ce titre, la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales a des effets néfastes tant sur les communes que sur les propriétaires. L'augmentation de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), qui pèse sur ces mêmes propriétaires, en est le corollaire inévitable.
Madame la ministre, tout l'été, nous avons assisté à un jeu extrêmement malsain entre l'État et les collectivités locales sur le relèvement de la TFPB. Il faut en sortir. À cet égard, la fiscalité du ZAN est une piste envisageable : il va bien falloir financer ce modèle et réinventer une fiscalité locale – et une vraie ! – à l'aune de ces nouveaux objectifs.
Deuxième chantier, vous ne pourrez non plus vous contenter des conclusions du CNR Logement, exposées au mois de juin dernier. Elles ont en commun l'absence d'une ambition véritablement marquée à même de ralentir cette crise accélérée et historique du logement. Car c'est bien de cela qu'il s'agit, en toile de fond, cet après-midi.
Vous ne pourrez pas vous contenter de demander à Action Logement de pallier les insuffisances de l'État. Il va falloir faire preuve de davantage d'imagination.
Troisième chantier, celui du modèle pavillonnaire. Le malaise est né des propos malheureux de l'ancienne ministre déléguée au logement, en fin de discussion de la loi Climat et résilience.
Le malaise vient aussi d'un décret sur l'artificialisation que le Conseil d'État vient de censurer en partie. Certes, nous avions été associés à l'élaboration de ce décret lors de la commission mixte paritaire. Toutefois, et vous ne l'ignorez pas, en cherchant des stocks de foncier pour faire du pavillon sur le pavillon, pour faire de la ville dense, le Gouvernement a pu nous amener à penser qu'il voulait en finir avec le modèle pavillonnaire.
Dès lors, sans l'apport du Sénat lors de cette commission mixte paritaire pour sauver une certaine forme de pavillon – nous avons bien compris qu'il n'était plus possible de faire comme avant –, il n'y aurait pas eu d'avancée.
Or force est de constater que cette affaire de PTZ est venue tout remettre à plat : nous avons le sentiment que vous voulez en finir avec ce modèle, alors que l'accord auquel nous étions parvenus cherchait à concilier respect de l'environnement et maintien d'une forme de modèle pavillonnaire. À tout le moins, il s'agissait d'étudier les choses au cas par cas : dans la mesure où aucun territoire en France ne ressemble à un autre, le pavillonnaire peut parfois être la réponse, et parfois non.
Nous éprouvons une grande frustration devant la disparition d'un article de notre proposition de loi, qui offrait aux élus une forme de liberté en leur permettant d'indiquer les espaces qu'ils voulaient densifier et ceux qu'ils souhaitaient renaturer.
Dernier chantier, celui des outils. Nous avons parlé des établissements publics fonciers (EPF), qu'il est nécessaire de « muscler », car ce sont de bons outils. Mais il faut aussi évoquer les sociétés d'économie mixte (SEM), les sociétés d'économie mixte à opération unique (Sémop), les sociétés publiques locales (SPL) et peut-être les zones d'aménagement concerté (ZAC), qu'il faut faire évoluer, et les secteurs de renouvellement pavillonnaire, qu'il faut inventer.
Si nous ne menons pas ces chantiers, il n'y aura pas de déblocage réel de la crise du logement et il ne sera pas possible d'accéder à la propriété ; je pense notamment aux primo-accédants et aux zones rurales, comme l'ont souligné nombre de nos collègues.
Le débat de cet après-midi est un point d'entrée vers de nombreux autres sujets. Si la reprise de nos travaux pouvait nous inciter à travailler tous ensemble pour tout réinventer, ce serait une bonne chose. §