Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la justice n'est pas un service public comme les autres. Sa mission est essentielle à notre démocratie.
Pendant des décennies, elle n'a pas été financée à la hauteur de son importance. Son budget devrait désormais passer de 9 milliards d'euros à près de 11 milliards d'euros par an. C'est une très bonne nouvelle pour les professionnels concernés, mais surtout pour l'ensemble de nos concitoyens.
La programmation inscrit dans la durée une tendance due à votre initiative, monsieur le garde des sceaux, ce dont nous vous savons gré.
Le manque de moyens, notamment humains, a « embolisé » bon nombre de nos juridictions, ce qui a allongé dramatiquement les délais de jugement.
Le projet de loi ordinaire prévoit d'y remédier avec près de 10 000 recrutements, dont celui de 1 500 magistrats et de 1 800 greffiers qui rejoindront les juridictions dans les prochaines années. Les attachés de justice contribueront à alléger la tâche des magistrats, et leur permettront de dégager un temps précieux.
L'augmentation du budget doit aussi permettre la construction de milliers de places de prison supplémentaires. Nous en avons un besoin urgent : entre 2000 et 2019, le nombre d'années de prison ferme prononcées par nos tribunaux a progressé de près de 70 %.
Le texte prévoit par ailleurs d'améliorer l'efficacité de nos services par le déploiement de nouvelles techniques d'enquête. Particulièrement intrusives, elles nous semblent néanmoins suffisamment encadrées pour que leur impact sur les libertés individuelles reste limité.
Hélas, la justice pénale n'est pas la seule à être en souffrance. Consacrer davantage de moyens à notre justice est bien sûr une nécessité, mais il est également nécessaire d'innover pour plus d'efficacité.
Nous nous réjouissons de l'expérimentation du tribunal des activités économiques. En confiant aux juges consulaires des contentieux qu'ils sont d'ores et déjà en mesure de traiter, il libérera du temps pour les magistrats.
Dans le même esprit, nous avons soutenu le transfert aux commissaires de justice des procédures de saisie des rémunérations. Elles seront désormais effectuées par les 3 700 commissaires de justice que compte notre pays, sous le contrôle, bien sûr, du juge de l'exécution. Il restera bien entendu possible de mettre en place des délais de paiement si la situation du débiteur l'exige, mais les créanciers devraient bénéficier d'une exécution plus rapide.
Le projet de loi organique vise à ouvrir le corps judiciaire et à simplifier son fonctionnement. Il renforce également la responsabilité des magistrats et leur protection.
Pour une justice plus efficace, mais aussi plus attractive, il est nécessaire que l'État concentre ses moyens sur ses missions régaliennes. C'est de ces dernières que dépend le bon fonctionnement de notre démocratie et de notre société.
Ces mesures sont attendues et viennent s'ajouter à celles qui existent déjà. Reste le problème posé par l'inflation normative, un cancer qui a atteint toutes nos réglementations. Le code de procédure pénale en est l'un des symboles. Il faudra absolument le clarifier et le simplifier.
Cette inflation normative constitue une source majeure de difficulté pour les juridictions. Elle pénalise aussi l'activité de nos élus, de nos entreprises et, plus généralement, de nos concitoyens.
Nous devons réduire le nombre de normes et veiller à en améliorer la qualité. La commission des lois du Sénat et vous-même, monsieur le garde des sceaux, y êtes attentifs. J'espère que nous pourrons obtenir des avancées concrètes en ce sens dans les prochains mois.
En tout état de cause, le groupe Les Indépendants votera en faveur des textes élaborés par les commissions mixtes paritaires.