Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 11 octobre 2023 à 15h00
Augmentation de la taxe foncière — Débat organisé à la demande du groupe crce-kanaky

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Pire, le Gouvernement décide unilatéralement d'actualiser des valeurs locatives plutôt que d'engager la révision générale, qu'il préfère repousser aux calendes grecques. Une ordonnance du 7 janvier 1959 avait prévu : d'abord, une « révision générale toutes les six années du loyer moyen fictif annuel » ; ensuite, une « majoration tous les trois ans » ; enfin, une « actualisation forfaitaire tous les ans ».

Une seule révision a eu lieu, en 1980, et on n'a vu aucune majoration !

Dès lors, demeure la solution de facilité, l'actualisation de la valeur des bases pour toutes les valeurs locatives, indistinctement de l'année de construction du bien, de son état général, de son confort, de ses besoins ou non d'investissement ; une augmentation de 7, 1 %, aveugle aux conditions de logements, aux évolutions urbaines et géographiques, qui, depuis cinquante ans, ont été bouleversées par la métropolisation du territoire. C'est votre décision.

Et je me dois de noter que la seule chose qui n'est pas indexée, ce sont les salaires des travailleurs et la DGF des collectivités. C'est un pari dangereux, contestable et contesté. Nous en discuterons ces prochaines semaines, dans le cadre du débat budgétaire.

Cette illisibilité des méthodes de détermination des bases et sa complexité inhérente engendrent des coûts de gestion globaux – frais d'assiette, recouvrement, coût des dégrèvements et admissions en non-valeur –, à un niveau de 1, 8 milliard d'euros. À bien y regarder, ce ne sont ni plus ni moins que 377 140 dossiers non collectés l'année donnée, pour un manque à gagner de 144 millions d'euros ! Les raisons ? Notamment la disparition du redevable, mais plus encore l'insolvabilité de nos concitoyens et concitoyennes. Cela doit nous mettre en garde sur cette taxe, qui doit être refondée et actualisée afin de se conformer aux réalités sociales.

Par ailleurs, les inégalités territoriales se creusent depuis que le dernier levier fiscal d'importance restant s'articule autour du foncier bâti et non bâti. Pour s'en convaincre, le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties, en 2021, était de 14 millions d'euros à Mayotte, par exemple, quand il était de 1, 06 milliard d'euros à Paris. En somme, les Mahoraises et Mahorais représentent 13 % de la population parisienne, mais 1, 3 % de ses recettes de taxe foncière.

Monsieur le ministre, j'aimerais enfin, s'agissant des inégalités territoriales, rappeler que votre augmentation de taxe foncière frappera aussi les offices HLM et leurs locataires, car la taxe foncière représente l'une des principales charges des bailleurs sociaux aujourd'hui.

Vous devez à tout le moins traiter le problème de la sous-compensation aux collectivités du régime fiscal actuel, qui prévoit une exonération d'une durée de quinze à trente ans pour les nouveaux logements sociaux. Pour ceux qui ont été financés avant 2022, la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties est évaluée à 12 % en 2019, soit 86 millions d'euros de compensations, sur un total d'exonérations de 715 millions d'euros. Nous demandons une compensation pérenne à 100 % des exonérations décidées par l'État. Le logement social se porte mal, très mal, et les décisions du Gouvernement depuis 2017 en sont les principales responsables.

Votre responsabilité dans les conséquences de votre hausse de la taxe foncière est pleine et entière. Cette augmentation affecte également les bailleurs et locataires du parc social.

Ce débat est là pour nous le rappeler ! Nous nous en félicitons.

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