Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, j'aborderai pour ma part deux sujets : la révision du cadre financier pluriannuel, d'une part, et la réforme des règles budgétaires européennes, d'autre part.
La révision du cadre financier pluriannuel me semble incontournable au regard, tout d'abord, de la progression des taux d'intérêt induite par l'inflation et, ensuite, des nouvelles dépenses rendues nécessaires par la guerre en Ukraine.
Le projet proposé par la Commission européenne en juin dernier comprend notamment une facilité pour l'Ukraine, une augmentation du budget européen pour faire face aux défis liés aux migrations et une nouvelle plateforme des technologies stratégiques pour l'Europe, dite Step.
Madame la secrétaire d'État, ne craignez-vous pas que cette révision du budget de long terme de l'Union européenne ne se fasse au détriment d'autres politiques communes ?
Par ailleurs, afin de répondre à ces besoins de financement supplémentaires, cette révision du cadre financier serait accompagnée d'un nouveau paquet de ressources propres. Il est ainsi question d'une ressource propre fondée sur les bénéfices des entreprises, d'une révision du système d'échange des quotas d'émission et d'une modification du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières. Les retards pris dans la mise en place du précédent panier de ressources devraient nous inciter à la prudence.
Madame la secrétaire d'État, quel est le calendrier de la mise en place de ces nouvelles ressources propres ? Celles-ci vous paraissent-elles être à la hauteur de la révision du cadre financier ?
J'en viens à mon second point : la réforme des règles budgétaires européennes. La suspension du pacte de stabilité et de croissance décidée lors de la crise sanitaire prendra fin en 2024, que les États membres se mettent d'accord ou non sur un nouveau cadre.
Les imperfections du cadre budgétaire actuel sont bien connues. Tout d'abord, ces règles budgétaires sont très – voire trop – complexes, car elles reposent sur des variables économiques non observables. Ensuite, leur application trop uniforme ne prend probablement pas assez en compte les différences de situations entre les États membres. Enfin, elles ne sont pas suffisamment souples pour permettre de différencier les dépenses qui doivent évidemment être maîtrisées de celles qui sont nécessaires pour faire face aux défis d'avenir.
Dans sa communication de novembre 2022, la Commission européenne a proposé que les États s'engagent sur des trajectoires pluriannuelles de moyen terme en décrivant leurs cibles budgétaires ainsi que les réformes et investissements envisagés, de tenir compte des investissements prévus pour la transition écologique, le numérique et la défense et de différencier les objectifs prévus pour chacun des États en fonction de la situation de leurs finances publiques.
Toutefois, dans ses propositions plus récentes d'avril 2023, la même Commission européenne, à la demande des États frugaux, dont fait partie l'Allemagne, a ajouté à ces orientations la mise en place de mesures de sauvegarde. Celles-ci intègrent notamment une réduction minimale du déficit à hauteur de 0, 5 % du PIB par an pour les États dont le déficit annuel est supérieur à 3 %, ce qui est le cas de notre pays.
Or les projections de l'application de ces nouvelles règles à la France montrent que, si elles étaient mises en œuvre dès 2024, la France devrait ajuster son solde primaire structurel de 1, 1 point de PIB par an entre 2025 et 2028, soit 30 milliards d'euros d'économies chaque année !
Dans ce contexte, madame la secrétaire d'État, je m'interroge sur la crédibilité de la France pour participer à la renégociation de ces règles. Je rappelle en effet que la dette publique de notre pays a dépassé en 2023 le montant de 3 000 milliards d'euros et que le déficit français ne devrait pas repasser sous la barre des 3 % du PIB avant 2027 au regard du prochain projet de loi de finances. La France est malheureusement à ce stade le plus mauvais élève de l'Europe. Il apparaît ainsi très probable qu'une procédure pour déficit public excessif sera – ou serait – ouverte contre la France au printemps prochain.
Madame la secrétaire d'État, partagez-vous cette analyse ? Pensez-vous que l'état de nos finances publiques nous permette de peser, de façon décisive, dans la renégociation des règles budgétaires européennes ?