Intervention de François Autain

Commission d'enquête sur la grippe A — Réunion du 28 avril 2010 : 1ère réunion
Audition de M. Le Professeur antoine flahault directeur de l'ecole des hautes études en santé publique

Photo de François AutainFrançois Autain, président :

a demandé à M. Flahault s'il ne craignait pas qu'une participation de l'industrie pharmaceutique au financement de formations nuise à l'indépendance de celles-ci.

En ce qui concerne la participation du secteur privé dans le domaine de la recherche, M. Antoine Flahault a indiqué que celle-ci est aujourd'hui encadrée, même si des difficultés peuvent encore se poser. S'agissant de l'enseignement, il pourrait être intéressant de faire appel, pour un enseignement portant sur l'industrie de santé, aux acteurs même de ce secteur qui paraissent les mieux placés pour présenter cette matière.

Abordant ensuite son exposé sur la pandémie grippale, M. Antoine Flahault a tout d'abord présenté une carte de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) du 27 avril 2009 montrant l'émergence du nouveau virus A(H1N1)v. A cette date, le virus avait déjà été identifié aux Etats-Unis et au Canada, les premiers décès étaient enregistrés au Mexique et l'Espagne venait d'être atteinte par le virus.

Il a particulièrement insisté sur la réactivité de l'OMS, qui a déclenché l'alerte sanitaire très tôt, ainsi que sur la rapidité avec laquelle les premières études scientifiques sur le nouveau virus ont été publiées, contrairement à ce qui s'était passé en 2002 avec l'épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS).

Analysant différents paramètres épidémiologiques du nouveau virus, il a indiqué que dès le mois de mai il était possible de considérer le virus A(H1N1) comme peu contagieux. En effet, le taux de reproduction de base (R0), paramètre qui synthétise le potentiel de transmission d'un agent infectieux et représente le nombre moyen de cas secondaires induits par un cas initial, était seulement de 1,4 pour le virus A(H1N1) contre 2 pour une grippe saisonnière. En termes de contagiosité, notion différente de celle de virulence, la grippe A(H1N1) était donc comparable à une grippe ordinaire.

Avant que l'OMS ne déclare le niveau 6 du plan pandémique, une étude qu'il avait réalisée en mai 2009 avec d'autres chercheurs en se fondant sur des simulations informatiques laissait entrevoir que l'hémisphère sud pourrait être touché par deux vagues d'ampleur réduite : la première entre les mois de juillet et d'octobre 2009, la seconde aux mois de mai et de juin 2010. En revanche, l'hémisphère nord ne serait atteint que par une seule vague, d'ampleur légèrement plus importante que celles de l'hémisphère sud, entre les mois de novembre et décembre 2009, qui devrait se terminer à la fin de janvier 2010. Ces prévisions, qui doivent être prises avec précaution, se sont révélées proches de celles effectivement observées.

En ce qui concerne l'intensité de la pandémie, trois scénarios étaient envisageables :

- une pandémie comparable à l'épidémie de SRAS de 2002, c'est-à-dire une pandémie qui « s'étiolerait » d'elle-même parce que les personnes atteintes par ce virus seraient facilement identifiables et que sa propagation serait donc aisément canalisable, grâce, par exemple, à des contrôles sanitaires dans les aéroports. Ce scénario n'avait pas été retenu comme probable car le virus A(H1N1) ne répondait pas à ces critères, un certain nombre de personnes atteintes ayant notamment développé des formes asymptomatiques de la grippe ;

- une pandémie incontrôlée comme la « grippe espagnole » de 1918 : ce scénario catastrophiste n'avait pas non plus été retenu ;

- une pandémie des « temps modernes », enfin, c'est-à-dire comparable aux deux dernières pandémies survenues en 1957 et 1968, contre lesquelles les mesures dites « barrières » avaient été inefficaces, avec un grand nombre de personnes contaminées et un taux de mortalité voisin de celui des grippes saisonnières. Dans ce schéma, 30 millions de cas et 30 000 décès étaient envisageables en France, sachant qu'il y a dans notre pays environ 6 millions de cas et 6 000 morts dans le cadre des grippes saisonnières. Ce modèle était considéré, à l'époque, comme l'un des scénarios possibles.

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