Intervention de Dominique Dupagne

Commission d'enquête sur la grippe A — Réunion du 26 mai 2010 : 1ère réunion
Audition de M. Dominique duPagne médecin généraliste

Dominique Dupagne :

Observant que la question du président François Autain lui offrait l'occasion d'aborder un sujet qui lui tient à coeur, M. Dominique Dupagne a déclaré qu'en effet « on marche sur la tête ». Les conseillers qui entourent la ministre de la santé sont presque tous des hospitalo-universitaires. La médecine générale, très forte dans les pays anglo-saxons et notamment au Royaume-Uni, est en France totalement brimée. Sa filière universitaire est inexistante et, traditionnellement, la politique de santé française exclut de son champ de réflexion les médecins de terrain, médecins généralistes ou pédiatres libéraux. Cette situation est aussi liée au fait qu'aucun budget n'est prévu pour s'assurer la compétence d'hommes de terrain. Quand on n'est pas salarié à plein temps par un hôpital, quand on doit faire tourner un cabinet et gagner sa vie, on ne peut pas avoir des activités bénévoles. Il y a donc un problème de rémunération des experts.

Mais il y a un autre problème qui tient au discours récurrent selon lequel quelqu'un qui ne travaille pas pour l'industrie ne peut pas être compétent, discours incroyable et qui est une négation de l'indépendance de l'expertise. Que ne dirait-on pas si, dans l'affaire de l'Erika, les magistrats avaient tous étés des consultants de l'industrie pétrolière ? On aurait hurlé qu'on ne peut être juge et avoir des intérêts. Dans le domaine de la santé, il semblerait que ce soit au contraire la règle. Plus on travaille pour l'industrie, et pour plus d'industriels, plus on est indépendant. C'est ahurissant d'entendre des choses comme cela.

Il est clair que si la France veut se doter un jour d'une politique de santé publique cohérente, il faut qu'elle fasse l'effort de disposer d'experts indépendants qui s'interdiraient tout contact avec l'industrie pharmaceutique. Ces experts devraient écouter tout le monde, bien sûr, mais les instances qui rendent les avis, les comités, hauts conseils ou instituts variés, devrait être entièrement « habités » d'experts libres de tout conflit d'intérêts.

a noté que cela permettrait des économies considérables, même si ces experts étaient bien rémunérés. Il n'y a pas en France d'experts professionnels dont le métier est de porter un avis sur les différentes politiques de santé. Notant que certains experts lui ont dit que s'ils étaient mieux payés, ils pourraient se permettre de ne pas travailler pour l'industrie, il a conclu qu'il était absurde d'en arriver là.

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