Intervention de Didier Raoult

Commission d'enquête sur la grippe A — Réunion du 26 mai 2010 : 1ère réunion
Audition de M. Didier Raoult professeur de microbiologie directeur de l'unité mixte de recherche des rickettsies à la faculté de médecine de marseille

Didier Raoult :

a affirmé que, face à un niveau de connaissance des virus et de leurs effets en rapide progression, il est particulièrement important que la France consacre ses efforts à prévenir les causes de mortalité réelles et n'engage plus de temps et d'argent dans la prévention de risques qui en fait n'existent plus, comme celui des incendies dans les hôpitaux. La grippe A a été la cause d'environ soixante morts à Marseille, dont plusieurs personnes jeunes et sans facteur de risque. Les cas graves ont également nécessité une action exceptionnelle des services de réanimation allant jusqu'à la mise en place, pour certains patients, d'une oxygénation extracorporelle d'une durée de trois semaines. Par ailleurs, la mortalité due aux maladies nosocomiales à l'hôpital, évaluée par le ministère de la santé à environ quatre mille morts par an, est très sous-estimée et se situe sans doute aux alentours de douze mille morts.

Il est nécessaire de procéder à un dénombrement exact du nombre de morts liés à la grippe. Ce dénombrement a été fait par le ministère de la santé, à l'initiative de Jean-François Mattei, pour les grandes crises sanitaires des cinquante dernières années. Il est ainsi apparu que cinq épisodes avaient fait varier la courbe de mortalité annuelle en générant un excès de plus de sept mille morts : les canicules de 1976, 1983 et 2003 et les grippes de 1957 et 1968. En revanche, on ne sait toujours pas exactement à quelle cause attribuer la surmortalité saisonnière généralement imputée à la grippe.

En plus de ce manque de connaissances fondamentales, la France a accumulé un retard en matière d'infrastructures. Les Etats-Unis ont fait le choix d'investir 20 à 30 % des dépenses de réponse aux crises sanitaires dans des infrastructures pérennes. L'Italie a, pour sa part, créé il y a vingt ans, deux hôpitaux spécialisés dans les maladies infectieuses, l'un à Rome et l'autre à Milan. En France, on n'arrive péniblement qu'à compter sept lits spécialisés à Marseille. Il faut apprendre à quantifier les risques, à créer un tissu solide pour y répondre.

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