Intervention de Yohann Saynac

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 15 juillet 2020 à 16h30
Table ronde avec des professionnels de santé libéraux d'île-de-france

Yohann Saynac, médecin généraliste, président de la communauté professionnelle territoriale de santé de Pantin :

Je pense que nous avions compris durant le mois de février que la France serait exposée à cette épidémie, mais nous n'en mesurions pas la gravité. Nous n'avions pas identifié à quel point elle allait déstabiliser notre système de santé.

La place des soins primaires dans le dispositif n'a tout simplement pas été pensée. Tout s'est organisé sans nous ! Or la covid est une maladie de médecine générale : elle est bénigne dans l'immense majorité des cas - les gens ont un syndrome grippal - et les formes graves restent assez marginales. Il fallait donc orienter au maximum les patients vers leur médecin traitant qui est équipé pour cela et qui travaille avec des infirmières, si le patient nécessite une surveillance à domicile. Demander aux malades d'appeler le 15 a tout simplement saturé le numéro d'urgence, y compris pour les appels des médecins et les pathologies autres qu'infectieuses.

La place de la médecine générale, des soins infirmiers et des pharmacies d'officine est en amont et en aval de l'hôpital. Dans cette crise, aucune de ces deux places n'a été respectée. C'est le cas pour les sorties de l'hôpital : souvent, le relais avec les médecins traitants ne s'est pas déroulé correctement.

En ce qui concerne les liens avec les institutions sanitaires, je dois dire qu'en Seine-Saint-Denis nous avons remarquablement bien travaillé avec l'assurance maladie, où l'interlocuteur que nous connaissons habituellement en matière d'organisation territoriale des soins a été très utile comme relais et source d'informations.

En ce qui concerne le matériel, j'ai passé des commandes de masques FFP2 en février, mais elles ont été réquisitionnées... Je pensais que les pharmacies pourraient nous fournir, mais cela n'a pas été le cas. Nous avons reçu les premiers masques FFPT2 fin mars. Nous avons reçu des masques chirurgicaux début mars, mais en nombre très insuffisant pour travailler dans des conditions correctes, c'est-à-dire se protéger soi-même et fournir ses patients. En deux jours, nous les avions tous utilisés et la dotation suivante est arrivée deux semaines plus tard...

Mme Sabrina Kadri, médecin généraliste à Paris 10e. - Nous avions naturellement une réserve d'équipements, mais elle a vite disparu, ce qui est logique en période de pandémie. Le véritable problème, c'est donc le réapprovisionnement. Il y a d'ailleurs certaines commandes, comme des lunettes ou des surblouses, que nous n'avons toujours pas reçues en raison de ruptures de stock.

En ce qui concerne les informations que nous recevions, nous avions souvent le sentiment d'un décalage de deux ou trois semaines : grâce aux différents liens que nous avions sur le territoire, notamment avec les hôpitaux, nous avions deux ou trois semaines d'avance par rapport à la population.

Sur le rôle de la médecine de ville, il est vrai qu'elle ne peut pas tout régler, mais nous nous sommes rendus disponibles. Les infirmiers se sont consacrés à cette crise, en arrêtant par exemple les visites à domicile des patients qu'ils suivaient habituellement et en privilégiant la télésurveillance. Au départ, ils ont été peu sollicités, puis des protocoles ont été mis en place.

Je rejoins ce qui vient d'être dit sur les sorties d'hospitalisation. Nous n'étions pas au courant, ce qui est dommage, car plusieurs infirmiers s'étaient rendus disponibles pour des visites à domicile et alors même que le système Prado de l'assurance maladie ne réussissait pas à trouver des professionnels de santé pour ces patients. C'était plutôt frustrant !

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