Intervention de Adeline Baldacchino

Commission d'enquête mutations Haute fonction publique — Réunion du 27 juin 2018 à 14h00
Audition de Mme Adeline Baldacchino conseillère référendaire de la cour des comptes

Adeline Baldacchino :

Cette question concerne des problématiques plus larges que celles de l'ENA. Elle touche au monde de l'éducation en général. Il me semble tout d'abord que nous assistons à une tendance sociétale, voire civilisationnelle, qui prône l'utilitarisme, notamment au sujet des études. Cette logique incite les étudiants à suivre des voies qui paraissent garantir la réussite à un concours, par exemple. En outre, l'originalité n'est nullement valorisée bien que les rapports de jury de l'ENA des dernières années affichent une volonté de recruter des candidats qui se distinguent et qui affirment leurs convictions.

Or selon moi, il est illusoire de croire à la neutralité du service public. Il existe évidemment une politisation de la Haute Fonction Publique, qui s'observe dans les parcours de carrière et notamment lors des passages en cabinet ministériel. Il serait plus honnête selon moi d'assumer le fait que les options de la vie publique comportent une dimension politique. S'il n'appartient pas aux fonctionnaires de la trancher, ces derniers doivent cependant être en mesure de proposer aux politiques l'éventail des possibilités qui se trouvent à leur disposition. Mais in fine, nous constatons une forme de facilité à adopter un discours ambiant du juste milieu qui correspond à une idéologie fonctionnelle datant des années 1990. Intellectuellement, cette idéologie relève de la « troisième voie » édictée par Tony Blair et permet de faire cohabiter des personnalités aux sensibilités politiques différentes. Il est ensuite possible d'atteindre un consensus habillé de références à des figures philosophiques telles qu'Habermas ou Ricoeur. Je perçois dans cette posture une forme de renoncement à arbitrer.

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