Appartenant à l'un de ces grands corps, je ne suis sans doute pas la mieux placée pour défendre et accabler ce système. Si ces grands corps ne recrutent pas en partie à la sortie de l'ENA, le phénomène de cooptation et d'endogamie que nous souhaitons circonscrire ne risque-t-il pas de ressurgir ? N'ayant personnellement aucune attache dans ces grands corps, je me demande par exemple si j'aurais pu y parvenir dans d'autres conditions. Par conséquent, et ce constat peut être le fruit d'un biais personnel, je ne suis pas sûre que l'on détruirait les phénomènes de cooptation en supprimant le recrutement des grands corps en sortie d'ENA.
La question relève davantage selon moi du poids de ces grands corps au sein de la sociologie administrative française. Pour ma part, j'ai choisi la Cour des comptes, car elle me permettait de garder le plus d'indépendance, cela étant inscrit dans sa mission même. J'avoue croire également dans le principe d'un contrôle de l'État qui est garant de la bonne application de l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dans lequel la société a le droit de « demander compte à tout agent public de son administration. » Dans mon métier, j'estime que nous contribuons à l'intérêt général et au bien commun.