Mais cette dernière ne faisait alors l'objet d'aucun système de règles concernant la prévention des conflits d'intérêts ou la déclaration des liens d'intérêt. Il a cependant été possible, sans texte, au niveau du règlement intérieur de l'Agence, d'imposer une obligation de déclaration d'intérêt à tous les experts participant aux différents groupes de travail ou commissions. M. Didier Tabuteau a précisé qu'il avait lui-même expliqué dans les différentes commissions pourquoi cette « règle du jeu » paraissait souhaitable et qu'il avait eu le sentiment que cette obligation avait plutôt été ressentie comme un soulagement par l'immense majorité de ses interlocuteurs.
Ces règles, après avoir été étendues en 1998 à toutes les agences sanitaires, ont été à l'origine des dispositions, introduites dans le code de la santé publique par la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades et la qualité du système de santé, qui sont aujourd'hui applicables aux membres des commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
La question de la déontologie de l'expertise, a souligné M. Didier Tabuteau, s'est posée dans un contexte difficile, après le drame du sang contaminé qui a conduit la France, en quelque sorte, à « prendre en marche » le train anglo-saxon.
Il a fallu « acclimater » ce système : c'est ainsi que la construction réglementaire prévue pour l'Agence du médicament a été élargie à toutes les agences sanitaires avant d'être généralisée, en tout cas dans la sphère de la santé et de la sécurité sociale, par la loi de 2002.
Cette première étape était en quelque sorte celle de la sortie de la préhistoire, car il n'existait auparavant que les dispositions du code pénal interdisant de prendre partie dans une affaire où on a un intérêt. Ce nouveau droit s'est progressivement disséminé, sans doute plus vite que la mise en place des mécanismes permettant son contrôle et son fonctionnement. L'on est donc entré dans une deuxième phase, où il faut parfaire l'application de ces règles : c'est là-dessus que se concentre aujourd'hui l'attention.
a précisé, à ce propos, que pour lui, la déontologie de l'expertise doit reposer sur deux dispositifs.
Outre l'impartialité subjective, celle qui doit garantir que l'expert se prononce, en son âme et conscience et qu'il rend, en tout indépendance d'esprit, l'avis que l'on est en droit d'attendre de lui compte tenu de ses connaissances, il faut en effet veiller à l'impartialité objective, qui dépend de la façon dont le système permet à l'expert d'exprimer son expertise.
C'est pour cela que l'efficacité administrative est importante : le bon fonctionnement des règles déontologiques dépend aussi du bon fonctionnement des structures. La dualité de l'expertise y contribue : il faut qu'à l'expertise interne, qui était un des enjeux de la création des agences de sécurité sanitaire, s'ajoute une expertise externe faisant appel à des personnes extérieures, des praticiens, des hospitaliers, des chercheurs, y compris des chercheurs travaillant pour l'industrie.
La diversité, le renouvellement de l'expertise sont aussi importants : l'appartenance à un même corps, à une même spécialité peut être un danger. Le fait de ne pas oser contredire quelqu'un simplement parce que l'on a du respect pour ses compétences peut aussi biaiser l'expertise. C'est pourquoi il est important de diversifier l'origine des experts, de les renouveler, de faire appel, y compris dans des champs très scientifiques, à des sociologues, à des associations de patients, ce qui favorise le débat contradictoire et permet d'organiser une sorte de « contrôle social ».
a enfin complété le rappel des textes en vigueur en évoquant la mesure, également prévue par la loi de 2002 et qu'il avait personnellement soutenue, qui fait obligation à toute personne s'exprimant publiquement sur un produit de santé de faire connaître au public ses liens éventuels avec des entreprises produisant ou exploitant de tels produits.